La lutte des familles dans le tome quatre de Saint-Elme

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Intitulé L’œil dans le dos, l’avant-dernier tome de Saint-Elme, un important succès de la bd arrive. Les éléments qui pouvaient sembler incongrus ou déplacés prennent alors tout leur sens…

Le Parrain des montagnes

La vengeance fantastique de Saint-Elme
La vengeance fantastique de Saint-Elme

Saint-Elme est la visite magico-mafieuse du village éponyme. Cette station de tourisme de montagne est totalement dominée par la famille Sax qui a racheté l’usine d’embouteillage d’eau minérale faisant la fierté de Saint-Elme. Ce premier achat n’a été que le premier d’une frénésie d’acquisitions. Ces dépenses sont financées par la contrebande et les trafics illégaux.

Cependant, l’harmonie ne règne pas chez eux. La mère boit trop et le père Roland refusait de signer le projet des enfants… jusqu’à ce qu’il soit abattu. Le véritable parrain est le grand-père, Gregor Mazur qui arrive dans ce tome. Par hasard, les Sax croisent une autre famille : les Sangaré. Venu pour enquêter sur la disparition d’un jeune homme de bonne famille, la maladroit Franck Sangaré a été séquestré par les enfants Sax. Il a pu s’enfuir par les égouts et vient de retrouver son frère Philippe venu le chercher. Gravement blessé, Franck se repose à l’auberge de la Vache Brûlée. Il refuse pourtant de fuir mais tient à rester pour organiser la revanche.

En effet, Saint-Elme décrit une étrange mais inquiétante guerre entre ces deux familles depuis la mort de Roland Sax. Si les Sangaré n’y sont pour rien, ce décès fait venir à Saint-Elme l’oligarque russe Gregor Mazur et son entourage. Il est bien décidé à régler toute cette confusion d’une manière définitive. Le lecteur assiste à l’opposition de deux familles mais aussi de valeurs. Les Sangare sont un groupe ouvert et tolérant alors que les Sax excluent et ont une soif continue de pouvoir.

L’enterrement du père Sax marque le début de la guerre ouverte par une explosion accidentelle. La belle machine mafieuse est grippée par des incompétents et la guerre des clans est désamorcée par l’humour du scénariste Serge Lehman. Le fils Sax est hilarant par sa maladresse provoquée par l’abus de drogue. Stan Sax retrouve son meilleur pote Yérim font la tournée de bars de la station de Saint-Elme, mais, totalement défoncés, ces pieds nickelés vont passer un lendemain explosif.

L’apprenti mafieux, Arno Cavaliéri, est aussi drôle par sa bêtise mais devient inquiétant par son regard glacial. Ses yeux grands ouverts et injectés de sang semblent ne jamais se fermer. A chaque tome, l’ancien drogué bascule davantage dans la folie, devenant une machine à tuer.

Quand le fantastique de Saint-Elme devient logique

Une dense page de Saint-Elme
Une dense page de Saint-Elme

Avec ce quatrième tome, les touches de mystères des tomes précédents de Saint-Elme commencent à faire sens. Acolyte des Sangare, Dombre se souvient que Philippe est cliniquement mort puis, en revenant à la vie, ses yeux étaient tous noirs. Franck a désormais les yeux tout vert. Une thématique écologique émerge par le fantastique. Le berger Paco lit les messages secrets de la nature. n’a cessé d’être distant avec les autres.

Ce tome révèle pourquoi. A Saint-Elme, les animaux sont étranges. Franck affirme que la nature est du côté des habitants. Il est guidé par des grenouilles envahissantes qui accueillent également chaque nouvel arrivant. Gregor Mazur atterrit avec un gros chien noir aux yeux vert semblant tout comprendre sans ne rien dire.

Cette étrangeté passe par la colorisation très originale du dessinateur Frederik Peeters. Avec la nuit violette, on plonge dans l’étrangeté. Elle nous sort du réalisme pour servir le récit. Le contraste est fort entre les couleurs vives presque joyeuses et le sombre scénario. Le dessin très dense donne une sensation de claustrophobie renforcée par le monochrome des décors. Les visage ne respectent pas les canons de la beauté. Bon ou mauvais, les personnages ne sont pas beaux. Les actes les séparent plutôt que la beauté.

Édité par Delcourt, la série Saint-Elme confirme sa singularité. L’alliance de Serge Lehman Frederik Peeters produit un cocktail explosif mélangeant le polar et le fantastique. De plus, les touches d’humour sont à nouveau présents et nous font rire.  La conclusion est encore brillante, donnant une nouvelle clé. Vivement la fin !

Vous pouvez retrouver sur ces liens une chronique sur le deuxième et le troisième volume de la série.