La part de l’ombre continue à dévoiler les secrets d’histoire

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Dans le premier tome, le lecteur découvrait qu’un homme avait été condamné à mort pour avoir tenté d’assassiner Hitler mais, dix ans plus tard, un duo de journaliste relance l’enquête. La part de l’ombre pose alors cette question : peut-on assassiner un dictateur ?

La suite de l’enquête

La part de l'ombre Francisco Ruizge et Pat Perna

Le premier tome de La part de l’ombre nous a permis de découvrir Maurice Bavaud, exécuté en 1941 pour avoir tenté de tuer Hitler. Selon la thèse nazi, Bavaud est un fanatique religieux qui a agi seul. Mais le scénario est plus complexe car le lecteur suivait en parallèle en 1955 à Berlin-Est le jeune apprenti reporter Wolf Fiala et Guntram Muller. Ce dernier est un ancien policier nazi qui cherche à survivre dans le monde complexe de l’Allemagne d’après-guerre. Désabusé et cynique, il a changé en se confrontant à l’idéalisme de Bavaud et décide de le réhabiliter. Mais, son rédacteur, poussé par les autorités communistes, lui confie la responsabilité d’interviewer Nikita Khrouchtchev, Premier secrétaire du parti communiste. Quête personnelle et changement géopolitique vont se croiser dans les rues de Berlin.

Ce deuxième volume prolonge les fils narratifs du premier faisant de La part de l’ombre un passionnant récit d’espionnage. Le scénariste Pat Perna enrichit la psychologie des personnages principaux. Fiala moins désintéressé qu’il n’y parait. Guntram Muller s’implique personnellement dans cette affaire car, s’il a n’a plus d’ambition, cet homme fatigué tient encore à son honneur. De nouvelles révélations sur son passé montrent que ce personnage est encore plus trouble.

Le frère de Maurive Bavaud a écrit une postface où il remercie les auteurs pour leur engagement. Perna fait passer un message dans La part de l’ombre. Il dénonce la fausse neutralité suisse pendant la Seconde Guerre mondiale qui lui a permis de sauver ses banques des nazis et des représailles des Alliés. Le scénariste donne aussi une image neuve des nazis. Il démontre leur violence et leur antisémitisme fanatique mais, pour autant, les nazis ne forment pas un bloc uni. La Gestapo, l’armée et l’Abwehr sont en concurrence pour obtenir les faveurs d’Hitler. De la même manière, les Américains sont certes des défenseurs de la démocratie mais un agent est une brute sans culture.

La prochaine guerre

La part de l'ombre chez Glénat

La suite de La part de l’ombre se concentre sur les années 1950. On découvre alors la complexité de cette nouvelle guerre par le personnage de Guntram Muller. Vivant à Berlin-Est, il doit faire attention aux autorités soviétiques qui connaissent son passé honteux. Les espions de la stasi, la police politique est-allemande, sont partout… et parfois très près. Mais Muller aide les services secrets américains. Il est le symbole d’une guerre qui ne dit pas son nom et utilise l’espionnage pour connaître, influencer et se préparer à un prochain conflit mondial. C’est pour cela que les anciens nazis ne sont pas pourchassés mais utilisés par les grandes puissances. Pourtant, il reste un signe d’espoir car Khrouchtchev s’apprête à critiquer officiellement la politique de Staline et donc à lancer la politique d’ouverture avec le bloc de l’ouest.

Francisco Ruizge apporte son talent pour mettre en avant le récit. Il retranscrit parfaitement les rues de Berlin avec les devantures d’époque et les affiches de propagande. Il joue sur le cadre pour marquer les deux périodes temporelles : noir pour les années 30 et blanc pour les années 50. Par son talent, on pénètre dans la Kehlsteinhaus, la résidence d’Hitler dans les Alpes.

Édité par Glénat, La part de l’ombre est un diptyque historique sur l’attentat le plus avancé contre Hitler mais aussi un témoignage de la complexité du monde né en 1945. Perna et Ruizge forment un duo performant pour plonger le lecteur dans le passé et dans les pensées des personnages. Le monde de 1955 est aussi sombre que les motivations des hommes.

Vous pouvez retrouver d’autres chroniques historiques sur le site comme # J’accuse… ! et L’insurgée de Varsovie.