Le gardien des brumes d’Eva De Kerlan : une aventure à l’image des passions de l’autrice

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Une nouvelle plongée dans la plume fantaisie de l’autrice d’Eva De Kerlan, avec sa nouvelle saga « La citadelle des brumes » parue aux éditions Alter Real. Le premier tome « Le gardien des brumes », nous fait découvrir le crépuscule d’un univers vivant en osmose avec la nature qui l’entoure. On suivra alors l’aventure exaltante d’un héros en devenir, Aidan, dans un monde ou douceur et harmonie se confronte à la brutalité. L’autrice revient sur la création de sa nouvelle histoire.

Propos recueillis par Emma Diedhiou.

Pouvez-vous nous parler du processus de création de l’univers ? De vos inspirations ? Univers du seigneur des anneaux ?

Les légendes arthuriennes à 150 % ! Je suis une grande fan de légende, de mythe, des récits anciens avec des créatures surnaturelles. Je suis également une ancienne archéologue donc forcément tout ce qui est cité perdue, Troie… j’aime beaucoup ! Je pense que cette passion se ressent dans mon roman, car on a pas mal d’inspiration à des mythes celtes, à des légendes comme celle de la citadelle perdue d’YS.
Au départ, j’avais envie de placer un peu Atlantis, mais ça c’est perdu en cours de route, pour autant la trame est là et ça pourra toujours servir, on ne sait jamais. La légende autour d’Atlantis est tellement étrange et mystérieuse qu’on peut se permettre d’y faire vivre notre imagination. Bien entendu dans mes inspirations il y a aussi un peu de Tolkien. Son style d’univers fait de différents peuples qui se côtoient, d’un monde avec des espaces gigantesque et des paysages sans fin… C’est typiquement le genre de lecture et de filmographie que j’adore et je pense que ça se ressent dès lors que j’écris de la fantaisie.

Ce livre, cette histoire, c’est beaucoup de moi. Dans ce roman, j’ai mis énormément mes inspirations, mais également, ce qu’en tant que lectrice, j’aime où j’aurais aimé découvrir. J’ai créé un univers dans lequel j’aurais aimé vivre !

Dans votre univers, vous faites vivre la nature comme avec les arbres qui chantent, comment l’idée vous est venue ?

Ce n’est pas vraiment une idée en soi, ça s’est imposé à moi tout simplement. J’ai grandi avec un jardin gigantesque et ai passé beaucoup de temps dedans ! C’était ma principale source de distraction où mon imaginaire et mon univers prenait toute la place. Ce sont les arbres qui abritaient mon jardin qui ont sans doute inspiré ceux de mon roman. Le bruit particulier que peut produire un arbre quand le vent souffle dans ses feuilles, m’a inspiré le chant de ceux dans mon livre. La nature est vivante et s’exprime ! Il y a quelque chose autour de nous qui respire, qui vit, qui agit, donc forcément dans un monde neuf, inédit ça s’est imposé : une nature inaccessible, mais qui a une présence. C’était nécessaire qu’elle soit là. Une évidence que la nature est une place importante et qu’elle soit liée aux personnages, notamment à Aidan.
Le personnage d’Aidan n’est pas comme les autres à plus d’un titre, ses capacités, son empathie et sa connexion avec le vivant découle de sa particularité… Mais ça, je vous laisse le découvrir en lisant !

Vous citez St Exupéry « On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux ». Voir au-delà des apparences a été la ligne directrice de votre livre, comment l’avez-vous construit à travers vos mots ? Est-ce la raison qui vous a poussé à créer un héros sensible curieux et empathique de toutes choses vivantes ?

Sans en faire un ambassadeur du monde du vivant, je voulais qu’il soit un personnage grâce auquel on peut comprendre qu’une vie existe à l’image d’une autre. Il n’est pas différent du renard qu’il va croiser, car il vit de la même manière que lui. Aidan garde cette connexion avec le vivant sous toutes ses formes, qu’on a peut-être nous à l’heure actuelle perdue.

Aidan est le représentant des possibles d’une certaine manière. Il voit ce que beaucoup d’autres ne voient pas, il ressent ce que beaucoup ne ressentent pas. Il a quelque chose en plus des autres, son regard qu’il porte sur le monde. Sans parler de ses pouvoirs ou de son empathie, c’est aussi la manière dont il observe les choses, dont il approche les vivants, d’égal à égal. Il voit au-delà des apparences. J’ai voulu faire ressortir ce trait de caractère du personnage, car c’est ce qui le rend très touchant, un gros enjeu pour moi, mais qui était nécessaire.

Pourquoi le choix d’aborder plusieurs points de vue, y compris celui de l’antagoniste ?

Pour ne pas me limiter. Parce que si je reste du point de vue d’Aidan uniquement, je vais passer à côté de beaucoup d’autres choses. Déjà, je n’aurais pas de point de vue extérieur sur mon héros. Car certes, c’est très important d’avoir accès aux pensées et au cheminement d’un personnage, mais avoir un autre point de vue, comme celui de son frère, permet de découvrir, de percevoir, d’une différente manière le personnage. Tout comme quand on passe du point de vue de Morgane, on passe alors d’un héros vu encore comme un être fragile à protéger, du point de vue de Shawn, à un jeune homme séduisant. Pour moi, c’était le meilleur moyen de montrer qu’une personne ne se définit pas par une seule facette, mais par une multitude. Les différents points de vue permettent de donner plus d’éléments et de détails au niveau de l’intrigue.

Le point de vue du méchant (Quara’k) est aussi présent, car pourquoi s’en priver (rires) ! Plus sérieusement, son rôle est important, par rapport à Aidan oui, mais aussi par rapport à tout l’univers du livre. On va découvrir au fur et à mesure de l’histoire, que les ramifications de ce fameux personnage, sont beaucoup plus lointaine que l’intrigue qui occupe le premier tome. Je suis remontée plus loin dans l’histoire et ça à un impact sur Aidan. Avoir le point de vue de Quara’k permet d’apporter plus d’éléments à cette course-poursuite.

Pourquoi avoir choisi d’opposer le héros et le méchant avec cette dualité d’ombre et de lumière ?

Cette idée d’ombres et lumière s’est imposée à moi assez facilement !
C’était évident dans un sens de mettre cette dualité, mais je voulais qu’elle soit plus nuancée. Car tout n’est pas noir ou blanc, les zones de gris sont importantes, et on les découvre dans les tomes suivants. Il y a toujours un vilain méchant dans les histoires de fantaisie, qui est d’ailleurs souvent très stéréotypé. Et il faut avouer que mon méchant est un peu comme ça (rires) ! Enfin, il est méchant du point de vue du héros et de ses proches, mais si j’écrivais toute son histoire et qu’on le découvrait un peu plus, est-ce qu’il serait si méchant ?

L’antagoniste le Quara’k n’est pas le seul méchant de votre livre, parlez-nous un peu de ce peuple envahisseur, pourquoi les représenter sous forme humaine ?

Pourquoi avoir fait ce choix ? Ma volonté était de montrer que nous ne sommes pas parfaits.

Je pense que ça doit venir de mon passé d’archéologue mais, j’ai toujours eu un regard différent sur les légendes, rumeurs et mythes, j’y vois toujours une part de vérité. Il suffit alors de remonter et d’extrapoler, toute créature surnaturelle présente dans les mythes et d’y accorder une part de réalité dans les événements que l’humain n’explique pas ou ne comprend pas. On peut le transposer à aujourd’hui, lorsqu’il y a quelque chose que l’on ne comprend pas, on a facilement tendance à le stigmatiser.

C’est à partir de cette idée, celle de diaboliser quelque chose que l’on ne comprend pas, que j’ai créé ce peuple. Ce n’est pas forcément un peuple « méchant », mais ils se retrouvent dans une nouvelle contrée face à un univers nouveau qu’ils ne connaissent pas. Et dans ces moments-là, il y a deux réactions possibles, soient ils acceptent, soient ils ont peur et détruisent ces éléments inconnus. La peur est une émotion forte et importante chez l’humain, je l’ai donc mise dans mon livre, ce peuple envahisseur, extermine quelque chose qu’il n’est même pas capable de comprendre.

A travers votre roman on part à l’aventure découvrant l’univers ses beautés et ses dangers tout comme vos personnages qui sortent de la sécurité du foyer. Pourquoi avoir choisi de les rendre aussi vierges d’aventures extérieures que les lecteurs ?

C’était important pour moi qu’il soit comme une feuille blanche où tout doit encore se construire, se façonner. Ça me permettait de pouvoir travailler en profondeur son évolution émotionnelle comme intellectuelle.
Il a toujours été protégé par les remparts de la citadelle, par Merlin, par son frère… Et lorsqu’il part à l’aventure, il s’émancipe de tout ça, il grandit et évolue au fur et à mesure de son périple. Pour moi, une aventure peut être un simple déménagement, car le regard que nous avons sur les choses change. Aidan, évolue, s’habitue, rien n’est figé dans sa manière de concevoir les choses.

Je voulais avant tout un personnage accessible pour le public. Qu’il est des failles, qu’il est des doutes, qu’il commette des erreurs, qu’il ne soit pas parfait en somme !

Pourquoi avoir pris le choix de rendre la fraternité essentielle au déroulé de l’histoire ?

Ils sont effectivement très proches l’un de l’autre. Par la force du destin, ils se sont retrouvés que tous les deux à la citadelle pendant 15 ans. Certes avec des enseignants, des mentors qui veillent sur eux, mais c’est tous les deux leur famille. Cette cohésion, cette manière de s’épauler est encore plus accentuée grâce à l’intrigue qui est liée à Aidan. Bien qu’évidemment leur relation évolue, l’amour prime toujours, mais des conflits vont exister.

Ce plus qu’apporte la famille, ses valeurs fraternelles sont d’autant plus importantes pour moi car j’en ai été privé. J’ai grandi sans mon père, sans mon demi-frère et ma demi-sœur. J’ai pu rencontrer cette partie de ma famille qu’à l’âge de 25 ans. C’est quelque chose qui m’a toujours manqué. Ça a fait de moi une personne de différentes, notamment à l’école, car j’étais la petite fille sans père ou frère et sœur, donc je pense qu’indirectement oui mon histoire à jouer dans le rôle que représente la fraternité dans mon livre.

Et pour finir, quel est votre personnage préféré ?

Aidan ! J’en suis amoureuse (rires).

Le site d’Eva de Kerlan : https://evadkerlan.com/