Redemption ou le rencontre de Mad Max et John Wayne

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L’équipe créative de Bad Mother se rassemble à nouveau pour proposer un nouveau récit de genre mais fini le thriller féministe et place à Redemption, un western postapocalyptique édité par Panini comics.

Rendez-vous à OK Collapse

Redemption de jour

Comme prévu par les théories de la collapsologie, le monde s’est effondré. La scénariste Christa Faust explique que des émeutes ont provoqué une crise et oblige chacun à se battre pour boire. La population du village aride de Redemption a survécu mais à quel prix ?  Possédant le monopole de l’eau, un homme dirige d’une main de fer. Face à cette dictature, Rose Obregón lutte pour sauver sa mère condamnée à mort. Trouvera-t-elle dans la célèbre tueuse surnommée « la Terreur » une solution ? Ce résumé des premières pages montre l’objectif de Redemption : mêler deux récits de genre, le western et le récit postapocalyptique. On retrouve les codes du western avec une leçon de tir puis une bagarre dans un bar. Toute l’action se déroule au milieu d’un désert : dans et autour du village de Redemption. Cette ville n’est pas libre mais elle est dominée par un pasteur radical et un shérif… qui porte un vieil œil bionique. Les principaux personnages portent des tenues de cowboys et de cowgirls avec des chapeaux et des colts à barillet… mais avec des armes et des gadgets de science-fiction. Évidemment, on pense à Mad Max par la situation mondiale d’un monde après l’apocalypse mais aussi par la réutilisation de technologies anciennes. De plus, ce monde manque d’eau. Cela conduit l’essentiel de l’action de Redemption à devenir des courses-poursuites de véhicules improbables pour quelques gouttes. Plusieurs combats se déroulent dans des ruines.

La devise du village devrait être la foi ou la mort. Un groupe de survivants a vendu sa liberté contre la sécurité. Cette ambiance ne serait rien sans le dessin hyperréaliste de Mike Deodato Jr. qui rend parfaitement le dynamisme de l’action et le paysage désertique précis par de petites cases. Il sait être très efficace dans les scènes de combats, de brèves explosions de violence ponctuant Redemption. On peut comprendre son travail dans les nombreux bonus avec les couvertures alternatives et la comparaison entre le scénario et les images réalisées. La coloriste Lee Loughridge utilise le désert pour créer de forts contrastes de couleur entre la journée inondée de lumière et la noirceur de la nuit.

Mad Maxima

Redemption de nuit

Redemption va au-delà de l’hommage à un genre en réfléchissant sur le genre. En effet, ce récit complet est un western au féminin dans une dystopie. Une petite communauté de femmes lutte contre le patriarcat dès le premier chapitre. Le pasteur Stonewater fait fouetter Inez Obregón pour avoir réalisé un avortement sur une enfant violée. Ce pouvoir des hommes est multiple – la politique, la religion et la sécurité – par le maire-pasteur et le shérif. Cette domination corrompt car elle ne sert pas les habitants mais vise à maintenir le pouvoir des hommes. Au cœur de Redemption, on trouve la relation entre Rose et sa mère mais avec une femme forte : Cat Tanner, une chasseuse de primes, fait si peur aux hommes qu’elle est devenue une légende noire. Cette héroïne blessée a choisi de se mettre en retrait. Cependant, Rose est persuadée qu’elle est également l’espoir pour sauver la ville. Les décors ont aussi un message politique car les ruines représentent la fin du patriarcat. Ce message est cependant aussi direct que la violence est explicite. Si le fond est intéressant et le récit avance très vite, les dialogues sont parfois maladroits. On retrouve, comme dans Bad Mother, le même éloge problématique de l’auto-défense. A l’inverse, une réflexion sur la nostalgie est plus intéressante : Cat Tanner est-elle réelle ou seulement une légende ?

Vous pensez, comme beaucoup, que l’Imperator Furiosa est le meilleur personnage de Mad Max Fury Road ? Alors Redemption est fait pour vous. Le récit est très efficace et prenant. On s’attache à ces femmes fortes qui changent des figures du western ou du récit d’effondrement.

Vous pouvez retrouver notre choix parmi les autres sorties comics de juin et une autre chronique de la même maison d’édition avec Les maîtres de l’univers.