Les éditions Kana ont choisi de donner sa chance à l’univers de Droners en lançant le premier tome de cette série le 27 août 2021. A la baguette, une équipe de créateurs français : Pierre Cabissole et Sylvain Dos Santos à l’écriture et Nicolas David au pinceau. C’est à l’origine un projet transmédia qui a débuté sa carrière comme dessin animé dans l’émission TFOU de TF1. Destiné à un public de jeunes enfants, le succès du programme conduit ses auteurs à le développer sous la forme d’un shonen. Celui-ci se présente comme un préquel à l’univers. Porté par un dessin dynamique, des héros attachants, ce premier volume séduira plus d’un lecteur adepte de courses endiablées dans des paysages exotiques.
Quand Waterworld rencontre F-Zero
Bienvenue sur Terraqua, une planète où l’eau compose 95 % de la surface. L’énergie est rare et les océans menacent d’engloutir les rares îles. Mais grâce à Wyatt Whale sont nées les G.E.N.I.E.S, une forme d’énergie intelligente et organique qui alimente les communautés humaines.
L’une d’elle s’est établie sur l’île de Nuï, paradis tropical. Corto y vit avec son père et pilote ses drones de livraison. Amoureuse de la vitesse, elle profite de chaque commande pour se livrer à des acrobaties et à des concours de pilotage au grand dam de son père. Lorsque Loopi, la meilleure pilote de l’île cherche un partenaire pour défier les Gratte-Rivages, Corto saute sur l’occasion. Sans se douter qu’elle va tomber dans le virus de la course et attirer l’attention de nombreuses personnes.
Droners : un univers exotique et référencé
Le manga se pose d’abord comme une version shonen du dessin animé d’origine. L’univers par rapport à celui-ci gagne en maturité et cela se ressent dès les premières pages. Tout est moins mignon, plus réaliste tout en conservant une fraîcheur bienvenue. Nous sommes plongés dans un monde où la technologie lutte face à une nature toute puissante ce qui n’est pas sans rappeler le monde de Nausicaa de Miyazaki. Sans être un récit post-apocalyptique, Droners prend une connotation beaucoup plus sérieuse en adéquation avec son public.
Ceci se ressent dans les œuvres qui ont inspiré les créateurs. Pour les courses on pense rapidement au jeu F -Zéro ou au film Speed racers. Le dessin exploite toute la force du concept : des drones transformés en bolides de course. Il mise sur le vertige, l’acrobatie. Le dessinateur va dès lors transporter ces joutes modernes dans des paysages exotiques – forêt, portique, pistes étroites – clin d’oeil assumé à Mario Kart et surtout à la série Oban Star Racers. Aucune course ne ressemble à une autre pour le pur plaisir des yeux. Il reste d’ailleurs une dernière inspiration que l’on retrouve dans ses pages : celle du jeu Beyond Good and Evil des studios Ubisoft. Un monde aquatique, des chasseurs d’épaves et toujours des courses comme dans Droners.
Une construction simple et intelligente portée par des personnages attachants
Le manga profite d’une narration très claire capable de présenter en quelques cases les enjeux, le contexte et la mythologie. Ce récit ne révolutionne pas la construction de scénario mais c’est très bien fait, ingénieux et précis. Comme dans de nombreux manga tel My Hero Academia, les auteurs insèrent dans leur histoire des pages « encyclopédiques » pour préciser tels éléments de l’univers, tel background personnel. Encore une fois l’artifice est connu, mais il est habilement employé. D’autant que le récit laisse planer bien des mystères : l’origine de l’énergie, le mystérieux Whale ; l’implacable lutte contre les eaux.
L’atout maître de cette histoire concerne ces personnages. Ils attirent la sympathie dès le début. Leurs buts sont clairs, leurs caractères précisément définis. Vous allez retrouver des archétypes du genre : le héros intrépide, le modèle, le rival. Mais grâce au dessin, à l’action, aux mystères, le lecteur est pleinement investi dans leur quête. Derrière la course se cache une intrigue où chacun doit aller contre les préjugés et s’accomplir. L’ensemble est renforcé par une belle dose d’humour/tendresse portée par l’héroïne.
Droners : une french touch qui fait la différence
Ce manga possède une dernière qualité révélée par les œuvres dont il semble s’être inspiré. La patte francophone. En effet comme dans Oban Star Racers ou dans Beyond Good and Evil, le récit baigne dans une poésie lyrique typique des œuvres hexagonales. Une once de philosophie, une dose de réflexion sociale, imprègnent ce récit. Cela fonctionne comme une musique douce, en arrière-plan, qui donne plus de profondeur à l’intrigue.
Cette french touch se voit surtout visuellement. Le dessin ne ressemble pas à celui d’un manga classique. Il en reprend les codes, le découpage. Mais il rajoute un cadre différent, il dessine autrement les visages et les corps, s’intéresse à d’autres aspects de la mécanique.
Au final, ce volume premier de Droners mérite plus qu’un simple coup d’oeil. Le pari était difficile, construire une œuvre qui ne soit pas qu’un simple produit dérivé de la série pour enfants. Il est pour le moment tenu et nous espérons continuer à suivre les aventures de cette équipe originale.