La jeune fille à la perle, l’univers d’un peintre d’exception selon Tracy Chevalier

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Se planter au musée devant une superbe toile et attendre d’en comprendre tous les tenants et aboutissants. Qui est cette fille, et pourquoi a-t-elle un tel regard ? Qu’est-ce que cette lumière en arrière-plan signifie vraiment ?

Autant de questions auxquelles on n’a généralement pas la réponse, parce qu’en fait, on n’était pas là pour comprendre en 1700. CQFD.

Tracy Chevalier, elle, s’est penchée sur cette jeune fille. Celle à la perle, de Vermeer (1632-1675). Cette américaine décrypte, à travers un roman historique, le plus emblématique des tableaux de Vermeer, La jeune fille à la perle. Le personnage de ce tableau a les traits flous et son identité demeure un mystère, séduisant par sa part d’ombre jetée à la lumière.

Le pitch

Griet, c’est une jeune fille du XVIIème siècle qui comme beaucoup, offre ses services dans les maisons pour l’entretien, les lessives, l’éducation des enfants. Elle fait partie de ces petites mains sans lesquelles les grandes maisons ne tiennent pas debout. Entre une maîtresse de maison acariâtre,  et une gouvernante défiant toute commune mesure de la méchanceté, elle se retrouve plongée dans le quotidien des Vermeer. L’atelier est une pièce sensible dans la maison et chacun le considère comme un véritable sanctuaire. Le peintre parce qu’il y passe toutes les heures de sa vie et l’épouse parce qu’elle vit sur ces pigments étalés sur des panneaux. Griet, elle, fait figure d’innocence dans les jeux de pouvoir des femmes du foyer qui montent crescendo lorsqu’elle a le privilège d’entrer dans le sacro-saint atelier.

Le peintre finit par lui demander de procéder au nettoyage de cette pièce en son absence, si chaque objet est reposé exactement à sa place. Les carreaux, eux, ne doivent pas être nettoyé régulièrement car ils jouent sur la lumière de la peinture en cours. Les deux individus finissent par se croiser dans l’atelier et de là une complicité nait car Griet sait s’intéresser aux travaux du peintre et aux couleurs et nuances, contrairement à sa femme.

Une intimité s’installe et Griet devient la jeune fille à la perle. Un scandale éclate, poussé par des rumeurs de plus en plus intenses. L’innocence de Griet s’effrite et finit par être sacrifiée par l’avènement de cette peinture.

L’oeuvre de Vermeer

Pourquoi La jeune fille à la perle est-elle l’œuvre la plus notoire de ce grand peintre hollandais ? Vermeer était uniquement connu de son temps par les gens de sa province et ses mécènes qui constituaient l’essentiel de son carnet de commande. Réputé pour être novateur, il peint essentiellement des scènes de genre. Sa signature en revanche, c’est le savant mélange de pigments qu’il réalise, créant des couleurs uniques et terriblement profondes. Dans la jeune fille à la perle, tous les éléments sont là : le bleu outremer, les pointes de jaunes, un regard surprenant pour les classiques de l’époque puisqu’il prend le peintre à partie et un contraste manifeste dans les lumières. L’éclat de cette perle, des lèvres de la jeune fille et cette netteté des traits sous lesquels on ne distingue pas de ligne guide soulignent une pureté incroyablement puissante. La perle est aussi un objet récurant dans les portraits de Vermeer. Symbole de chasteté mais aussi de vanité, la perle joue ici un rôle double entre l’innocence d’un visage léger et sincère associé à un regard et une bouche sensuels.

De quoi en effet attiser la jalousie de la femme de Vermeer dans l’œuvre de Tracy Chevalier mais aussi les ragots de toute la province hollandaise.

Le fait que cette œuvre, aujourd’hui exposée au musée de La Haye, ne soit pas datée et qu’aucune information n’ai été trouvée à propos de la véritable jeune fille à perle laisse libre cours à l’auteur de transcrire l’histoire inconnue d’un très célèbre tableau.

Plongez dans l’univers de l’un des plus grands peintres du XVIIème siècle et découvrez comment l’innocence transgresse les limites dans une société où rien n’est pardonné.