Le Royaume des Abysses : une aventure visuellement dingue et thématiquement bouleversante

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Après Monkey King (inédit en France), le réalisateur chinois Tian Xiaopeng est de retour avec son deuxième long-métrage d’animation : Le Royaume des Abysses. Présenté au Festival d’Annecy 2023, le film emmène les spectateurs dans une aventure féérique, psychédélique et introspective passionnante. Un projet ambitieux qui a nécessité plus de 7 ans de travail.

Le Royaume des Abysses : une œuvre techniquement irréprochable

Le Royaume des Abysses raconte le destin de la petite Shenxiu, une fillette de 10 ans, qui est aspirée dans les profondeurs marines durant une croisière familiale. Alors qu’elle a été délaissée par sa mère quelques années auparavant, elle croise la route d’un monstre marin qui pourrait lui indiquer le chemin pour la retrouver. En parallèle, elle travaille comme cuisinière à bord d’un sous-marin pas comme les autres : le mystérieux Restaurant des Abysses, dirigé par l’emblématique Capitaine Nanhe, sorte de Joker marin chinois déroutant et ambigu.

LE ROYAUME DES ABYSSES 15 © 2023 Beijing October Media Co. Ltd Le Royaume des Abysses : une aventure visuellement dingue et thématiquement bouleversante
Le Royaume des Abysses

Ce qui frappe, évidemment, dans Le Royaume des Abysses, c’est son approche visuelle hors du commun. Esthétiquement hallucinant, le film propose une forme d’animation inédite. Tian Xiaopeng a en effet utilisé de nouvelles techniques d’animation pour donner vie à son scénario : la peinture aux particules d’encre. Une méthode qui permet, comme l’explique le réalisateur, de :

Faire fusionner l’impressionnisme de la peinture chinoise à l’encre avec le réalisme de l’animation par ordinateur préservant ainsi la spontanéité et l’individualité de la peinture à l’encre tout en maintenant la profondeur de champ de la scène, ainsi que les variations d’ombre et de lumière.

Et il faut dire que le rendu visuel est totalement dingue. Il se passe toujours quelque chose à l’écran, que ce soit dans le premier ou le second plan. Le nombre de personnages qui évoluent à l’écran est toujours impressionnant, et Tian Xiaopeng propose des plans séquences proprement hallucinants. La fluidité de l’action est d’une précision dingue, et les slow motion n’ont rien à envier aux meilleurs moments de la filmographie de Zack Snyder. Quant aux décors, que ce soient les magnifiques plats de Nanhe, l’ondulation des vagues, ou l’animation du Fantôme Rouge, tout est à tomber par terre. Le cinéaste pousse même sa prouesse visuelle plus loin en proposant des morceaux esthétique où les personnages et les décors se confondent, fusionnent, ce qui permet de brouiller les repères des spectateurs avec une certaine maestria.

Esthétiquement, Le Royaume des Abysses met tous les gros studios d’animation américain à l’amande. Le film parvient également à proposer un style hybride entre une approche occidentale et un respect des traditions orientales. Véritable film immersif, chaos organisé, orgie visuelle, générosité débordante, Le Royaume des Abysses est une claque esthétique comme on en compte peu !

L’influence de Miyazaki

Le Royaume des Abysses doit évidemment beaucoup au cinéma de Miyazaki. En effet, Tian Xiaopeng n’hésite pas à emprunter quelques thématiques et quelques références au maître ultime de l’animation japonais. Difficile de ne pas voir un parallèle avec Le Château ambulant, tant le Restaurant des Abysses rappelle le mystérieux véhicule de Hayao Miyazaki. De même, le Poculus, cette drôle de créature semble être tout droit sortie de l’esprit créatif de Miyazaki. Enfin, la quête de la petite Shenxiu renvoie forcément à Le Voyage de Chihiro. Que ce soit dans sa découverte d’un monde alternatif, sa rencontre avec des créatures loufoques, la présence du Fantôme rouge qui rappelle spectre Sans-Visage, ou encore les thématiques d’abandon parental, les points communs entre Le Royaume des Abysses et Le Voyage de Chihiro sont légion.

le royaume des abysses photos3 2000x940 1 Le Royaume des Abysses : une aventure visuellement dingue et thématiquement bouleversante

Le Royaume des Abysses est surtout une puissante allégorie des tourments psychologiques de la protagoniste. Cette petite fille, en recherche d’amour maternel, va vivre une aventure surréaliste pour combler le vide de l’abandon. Véritable thérapie, voyage initiatique, Le Royaume des Abysses nous parle de solitude, d’isolement et de séparation avec beaucoup de tact, de sincérité et de sensibilité. Cette petite fille, mignonne au possible, aux ressorts émotionnels sans limite, vie une aventure folle pour se détourner de son quotidien morose, de sa tristesse et de sa solitude perpétuelles. En empruntant également quelques clés à L’Odyssée de Pie, Le Royaume des Abysses devient profondément bouleversant dans son dernier acte et dans son twist final, certes attendu, mais terriblement touchant, et plein d’espoir. Le récit initiatique de cette petite fille se transforme en une libération mentale d’une puissance folle, à travers une conclusion éclatante et saisissante d’émotions. Un dénouement renversant, compréhensif, sincère, empathique et compatissant, d’une beauté folle, qui va vous faire incontestablement sortir les mouchoirs !