Critique « En eaux troubles » de Jon Turteltaub : quand Jason Statham se bat contre un mégalodon

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Sur le papier cela donnait quand même envie : une série B décomplexée, un trip sous acide d’un Jason Statham qui va « Stathamer » un mégalodon, ce requin préhistorique de plus de 20 mètres. Le film pouvait prendre toutes les directions possibles : l’horreur pure comme Les Dents de la Mer, ou le gros blockbuster désincarné comme Piranha 3D. Il n’en sera rien de tout ça, puisque En Eaux Troubles est une série B passable et paresseuse, à peine sauvage, gore et trash.

Une série B nauséabonde

Comme bien souvent, Warner Bros n’a pas porté son courage a deux mains. Au lieu de faire un film classé R, violent, trash, gore et drôle, ce qui aurait été la classification parfaite pour ce genre de film, le studio préfère sortir un « survival » graveleux avec un requin géant. Jason Statham a râlé et on le comprend. Quel dommage de se limiter a un film tout public avec ce postulat de départ. Il y a avait tous les ingrédients pour obtenir un film d’horreur violent et décomplexé façon Piranha, pourtant le cinéaste n’en fait rien. Warner préfère rester dans les carcans habituels du genre, placer Jason Statham dans une romance inintéressante et ponctuer les blancs catatoniques par des vannes douteuses. En Eaux Troubles est totalement passé à côté de son coche.

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Ce qui aurait dû être un blockbuster horrifique décérébré est finalement un film très sage dans lequel Jason Statham affronte comme il peut un mégalodon matérialisé avec des effets spéciaux du début des années 2000. Le scénario est paresseux, l’histoire répétitive et le rythme ponctué par des pauses sentimentales plus mortelles que les crocs du requin préhistorique. Les personnages sont insipides et Jason Statham est fidèle à lui-même en anti-héros fatigué et violent, prêt aux pires sacrifices, bien que ce ne soit pas son plus grand rôle. Le film passe totalement à côté de son potentiel, notamment lorsque le Mégalodon se rapproche enfin des grandes villes et d’une plage surpeuplée, pour simplement faire une petite ronde et s’en aller. Le cinéaste tenait là l’aboutissement de son film, LA scène gore qu’il ne fallait pas rater, Jon Turteltaub aurait pu nager dans les traces de Piranha 3D et sa superbe scène de violence extrême, de nibards déchiquetés, de pénis flottants et d’hémoglobine à ne plus savoir quoi en faire. Il y avait matière à offrir une grande scène pop, horrifique, comique et trash au public, il n’en sera rien. En Eaux Troubles est un film très sage et conventionnel.

Des banalités pour masquer le manque de prises de risques

Plutôt que d’offrir un film véritablement trash et violent, il faut bien meubler le manque. Le cinéaste préfère donc mettre en scène une romance vide entre Statham et sa dulcinée, une confrontation entre Statham et son ancien collègue et mettre en scène des personnages secondaires inexistants et bourrés de clichés. En Eaux Troubles n’a rien d’autres à proposer que son mégalodon. C’est mal filmé, mal écrit et mal exploité. La tension est inexistante, à des années lumières de celle proposée dans Les Dents de la Mer. En Eaux Troubles n’arrive même pas à atteindre la tension de Instinct de Survie, petit film de requin passé inaperçu. Comme quoi la taille ne fait pas tout.

Critique "En eaux troubles" de Jon Turteltaub : quand Jason Statham se bat contre un mégalodon

En Eaux Troubles est symptomatique de la convention hollywoodienne. Des studios préfèrent saboter leurs films pour atteindre le maximum de public plutôt que de laisser un cinéaste aller au bout de sa vision. Au lieu d’avoir une série B violente et décomplexée classée R, on obtient une fade chasse au requin ultra sérieuse adressée au grand public. Cela ne fonctionne pas. On ne peut changer et charcuter un film pour le rendre adapté au grand public. En Eaux Troubles était destiné à autre chose. On gardera néanmoins une scène, où le mégalodon tente d’avaler un caisson de protection et où Jason Statham affronte le monstre directement dans l’eau. Seule scène qui vaut véritablement le détour : bien rythmée, impressionnante et maîtrisée. La morale est elle aussi relativement intéressante notamment dans la manière dont l’Homme aborde les choses inconnues : par la violence. Une nouvelle créature rare qu’il faudrait protéger est pourtant chassée et tuée de la main de l’être humain.

En Eaux Troubles est un divertissement passable pour les amateurs de requins et de Jason Statham. Mais le long-métrage passe à côté de son essence même et préfère se présenter comme une série B paresseuse et insipide plutôt que comme un joyeux bain de sang.