Critique « Annihilation » d’Alex Garland : le coup de génie pour Netflix ?

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Après l’excellent Ex_Machina, Alex Garland est de retour avec Annihilation, un thriller de science-fiction porté par Natalie Portman. Diffusé dans les cinémas américains et chinois, le long métrage débarque en Europe directement sur la plateforme Netflix, les producteurs étant frileux à l’idée de le sortir en salles. Tout ça au grand déplaisir du réalisateur qui a porté et conçu le projet du début à la fin comme un produit de cinéma et pas de divertissement domestique. 

Une oeuvre inégale qui oscille entre génie et série B

Annihilation Critique "Annihilation" d'Alex Garland : le coup de génie pour Netflix ?
Entrons directement dans le vif du sujet. Déjà il faut savoir que ce film est l’adaptation du roman éponyme, de Jeff VanderMeer (2014). Annihilation est très inégal et oscille constamment entre génie et futilité. Avec des idées d’écriture remarquables, Alex Garland parvient à capter la curiosité des spectateurs sans pour autant répondre à leurs attentes. Dès le postulat de départ, l’intrigante histoire tisse sa toile. Une contrée incertaine, une météorite qui s’écrase sur notre planète et créé le miroitement (shimmer en VO), un microcosme indépendant, dangereux et en extension. Cependant l’introduction ne tient pas la route : une mise en contexte totalement bâclée, qui introduit les personnages sans aucune forme, qui laisse les détails sur le bord de la route et qui place ses protagonistes directement dans le feu de l’action sans véritable préparation. Ces facilités, où le cinéaste ne se prend pas la tête, décrédibilisent son oeuvre et lui donnent un arrière goût de série B. Les dialogues plats et sans intérêt n’arrangent pas les choses, de même que l’absence de personnages secondaires. Le montage est rectiligne, et quelques superbes idées comme la perte de mémoire sont délaissées. Les personnages sont relativement fades et ce survival ne parvient pas réellement à inquiéter, notamment à cause de personnages CGI dégueulasses. Pour autant, après défauts, qui donnent au film sa saveur de série B, Annihilation a de très bonnes idées d’écriture, et de symbolisme.

Alex Garland connaît ses classiques

annihilation netflix journal des sorties 02 Critique "Annihilation" d'Alex Garland : le coup de génie pour Netflix ?
Le parallèle avec Stalker est inévitable. Une forêt qui a ses propres règles, où les personnages se retrouvent confrontés à eux même, à la recherche d’une réponse à une question qu’ils ne connaissent même pas. Pour autant, le film de Andreï Tarkovski va beaucoup plus loin. C’est une oeuvre profondément organique, lancinante et contemplative, le tout avec très peu de moyens techniques. Alex Garland essaye d’atteindre cette extase de sensations, et y parvient, le temps d’une séquence pénétrante, où Natalie Portman rencontre le cœur du miroitement. Appuyé par une bande son envoûtante (The Mark – Moderat). Grand instant du film, qui disparaît aussi vite que son arrivée. Alex Garland se réfère également à L’invasion des Profanateurs ou The Thing au choix, pour cette question de dédoublement, de métamorphose. Mais également à l’imaginaire de Hayao Miyazaki dans la manière d’aborder les décors (cette forêt de sel, sublime) et les créatures. Annihilation regorge de bonnes idées mais utilise un traitement trop superficiel pour totalement séduire. De son crescendo à sa conclusion où l’Homme se rencontre enfin, le film d’Alex Garland abonde en matérialisations de science-fiction confondantes, gâchées par un traitement usuel presque paresseux.

annihi Critique "Annihilation" d'Alex Garland : le coup de génie pour Netflix ?
Annihilation est une œuvre ambivalente, quelque part entre génie et stupidité, entre beauté et dégoût. Inégal, que ce soit dans le traitement ou l’esthétique, Annihilation est finalement une série B portée par de bonnes idées. Reste que la mise en contexte bancale, le montage paresseux, les flashs back inutiles et l’introduction des personnages inexistante, ne permettent pas au film de Garland de totalement briller. Mais certaines envolées sont sidérantes et superbes, portées par une bande-originale électrisante. Reste que Annihilation révise ses classiques dans une approche façon Stalker, une idée de duplication façon Les Profanateurs de sépultures, une esthétique qui rappelle l’univers de Miyazaki, un final quelque part entre Mission to Mars et Contact .

 

Bande Annonce Annihiliation