Reboots et compagnie : une mode passagère ou un effet d’aujourd’hui ?

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À l’heure où l’on commence à parler des futures séries de la rentrée 2017-2018, revenons sur une mode bien ancrée depuis quelques années : celles des remakes, reboots, et autres spin-offs. À quoi est dû ce phénomène visible depuis quelques années ?

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En 2016, ce sont 455 saisons de séries différentes qui ont été diffusées aux Etats-Unis, selon des données de FX Research Networks. Un record (34 de plus qu’en 2015), lié au développement de programmes sur les plateformes comme Netflix ou Amazon. À l’été 2015, le patron de la chaîne FX, John Landgraf, a déclaré :

« 2015 ou 2016 représentera l’apogée de la TV aux Etats-Unis et après ça, commencera un déclin. »

À l’heure où la mode n’est plus vraiment aux créations originales, revenons un peu sur cinq notions importantes que sont le remake, le reboot, le spin-off, le prequel, et le sequel :

  • Le remake : en français, le terme signifie « refaire ». Un remake est une œuvre dont l’histoire a déjà été portée à l’écran. Il peut être l’occasion de changements significatifs de l’époque. Pour l’exemple, Hawaii Five-0 (depuis 2010) est le remake de Hawaï police d’État (1968 – 1980)
  • Le reboot : en français, le terme signifie « redémarrer ». L’univers de la série est connu, on repart sur les mêmes bases d’une franchise tout en offrant aux personnages de nouvelles perspectives scénaristiques. Pour l’exemple, MacGyver (2016) est un reboot de la série MacGyver (1985-1992) dans le sens où la série suit toujours le personnage central mais lui donne un coup de jeune.
  • Le spin-off : en français, le terme signifie « dérivé ». Le spin-off se focalise sur un personnage secondaire d’une série, que l’on extrait pour qu’il devienne à son tour le héros de sa propre série. Pour l’exemple, Private Practice (2007-2013) est un spin-off de Grey’s Anatomy (depuis 2004). En effet, Addison Montgomery (Kate Walsh) est apparue dans les trois premières saisons de Grey’s Anatomy avant d’être l’héroïne de sa propre série.
  • Le prequel : en français, le terme signifie « suite avant ». Le prequel nous conte l’origine du récit initial, ce qu’il s’est passé avant. Pour l’exemple, Better Call Saul (depuis 2015) est un prequel de Breaking Bad (2008-2013). On y suit les aventures de l’avocat Saul Goodman (Bob Odenkirk) bien des années avant qu’il ne devienne l’affreux personnage de la série Breaking Bad.
  • Le sequel : en français le terme signifie « suite ». Le sequel nous entraîne après l’œuvre original. Pour l’exemple, 90210 est le sequel de Beverly Hills, puisque la série se déroule des années après l’œuvre originale.

 

Les studios de production et par conséquent les producteurs font des séries dans un seul but : gagner de l’argent. Les scénaristes aussi, même si leur talent leur permet aussi, et avant tout, d’entraîner le téléspectateur dans un monde fictif, loin des préoccupations de quotidien. Depuis quelques années, toutes les chaînes ont un programme bien établi de séries, allant du mois de septembre au mois de mai, pour ensuite proposer un contenu plus léger l’été. Dans ce choix titanesque pour le quidam que nous sommes, nous retrouvons très régulièrement des noms familiers. En effet, la tendance, tout comme pour le cinéma, est à l’adaptation, au remake et aux suites. Un effet de la crise économique mondiale ? Une perte de créativité de la part des créateurs ? Ou bien l’envie de satisfaire le public coûte que coûte ?

 

Argent trop cher ?

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Les producteurs sont frileux. Financièrement parlant, une nouvelle série originale est plutôt onéreuse, pour un résultat aléatoire. En effet, miser sur la création comporte énormément de facteurs inconnus. Le public va-t-il adhérer à ce nouvel univers et à ces nouveaux personnages ? Dans un monde à tendance plutôt capitaliste, les producteurs n’aiment plus parier. Très peu le font d’ailleurs, la faute aux billets verts, qui peuvent ruiner la carrière d’un studio. Nous nous souvenons de l’échec plutôt violent de Terra Nova, en 2011. Avec un pilote de deux heures dont le coût total est estimé entre 16 et 20 millions de dollars, la société de production Amblin Entertainment, appartenant entre autres à Steven Spielberg, a bien vite déchanté. En effet, 9.35 millions de téléspectateurs étaient au rendez-vous, ce qui est plutôt peu pour l’époque. Le plus dur fut de constater l’érosion du public au fur et à mesure de la diffusion, ce qui a conduit la série à être annulée au terme de son unique première saison. Un véritable échec et surtout l’un des derniers gros paris dans le milieu de la télévision.

L’autre argument souvent choisi par les producteurs est l’adaptation. En effet, Shameless est une série à succès au Royaume-Uni, pourquoi une adaptation ne rencontrerait pas le même succès outre-Atlantique ? Le manque de créativité est évident et la recette du succès est plus facile à prendre chez les autres qu’à créer soi-même. Nous évoquerons aussi brièvement le cas de Broadchurch, ambitieuse série de la chaîne britannique ITV en 2013, qui s’est royalement plantée quand elle est devenue Gracepoint aux États-Unis sur la FOX (avec pourtant au casting le même David Tennant !) ou quand France 2 a proposé Malaterra, sa propre adaptation.

 

Surfer sur la nostalgie…

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Proposer aujourd’hui un reboot ou un remake est donc quelque chose de courant. Les producteurs ont compris les attentes d’une partie du public, à l’heure où l’on aime se tourner vers le passé pour retrouver des choses que l’on aime. Un sentiment de nostalgie a envahi nos petits écrans, du fait des multiples rediffusions de séries des années 80 ou 90 mais aussi grâce aux ventes de coffret DVD ou d’offres de replay. Visionner un vieil épisode de Starsky & Hutch était très compliqué il y a encore une quinzaine d’années, alors qu’aujourd’hui, la série est disponible quasiment partout. Et ça, les producteurs l’ont bien compris ! Nous pouvons découvrir de nombreux remakes et reboots depuis une bonne dizaine d’années, de manière à fédérer un public déjà existant. En effet, si le public aimait MacGyver en 1985, pourquoi ne l’aimerait-il pas en 2016 ? Il faut bien reconnaître que la logique est plutôt bonne, et que ces séries peuvent avoir une nouvelle vie. Il y a un pendant à tout, et pour un bide absolu d’un remake de Charlie’s Angel en 2011 ou de Bionic Woman en 2007, nous retrouvons de l’autre côté l’énorme succès de Hawaï Five-0 depuis 2010 ou bien encore celui de Battlestar Galactica en 2003 !

 

Donner aux fans l’occasion d’étendre l’univers

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L’un des points positifs de cette tendance évoquée au début de l’article est aussi de proposer aux fans un univers étendu. À l’image de Star Wars, de ses suites cinématographiques et télévisées (en séries animées), le fan pur et dur appréciera de découvrir un complément à l’univers qu’il affectionne. Pour cela, les spin-offs nous permettent de retrouver un personnage souvent apprécié des fans dans de nouvelles aventures. Découvrir Los Angeles et ses démons au travers des yeux d’Angel, en 1999, dans sa propre série étend l’univers initié dans Buffy contre les vampires. Plus récemment, NCIS : Nouvelle Orléans nous propose de suivre une nouvelle équipe dans une autre ville. Et tout cela en partant de la série-mère NCIS, qui, il faut le rappeler, n’est ni plus ni moins qu’un spin-off de la série JAG (1995-2005) ! Pourquoi les producteurs se priveraient-ils d’un filon qui fonctionne ? Si tel personnage plaît dans la série, pourquoi ne peut-il pas lui-même devenir le héros de sa propre série, avec ses propres intrigues et bien sur ses propres rentrées financières ? Une chaîne aura moins peur d’un projet découlant directement d’un succès que d’une création qui n’a pas fait ses preuves. Alors certes, depuis quelques années, nous assistons à une prolifération du genre, mais il ne faut pas se laisser berner : s’il y en a autant, c’est que cela fonctionne ! La majorité du public en redemande au vu des audiences de ces programmes. Il faut donc se tourner vers les séries du câble ou des plateformes en ligne pour chercher du matériel nouveau, et encore… Westworld n’est-elle pas l’adaptation en série du film Mondwest de 1973 ?

 

Avancer avec son temps ?

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Si nous devons bien admettre un point positif dans ces remakes ou reboots, c’est l’avancée technologique. En effet, les moyens sont très loin d’être les mêmes à l’heure actuelle qu’il y a 20 ans. Les fonds verts, la CGI ou bien encore la motion capture sont des techniques qui n’existaient pas ou qui étaient bien moins performantes il y a quelques années encore. En 2009, lors du retour à la télévision de la série V, il était plus facile de créer un vrai vaisseau spatial et des aliens qu’en 1983 lors de la première mini-série. Cela nous donne l’occasion de découvrir parfois de belles relectures des œuvres que l’on aime tant, amplifiées par des effets spéciaux aux petits oignons. Et nous aurions tort de nous en priver !

 

Quid des acteurs ?

 Depuis quelques années, nous assistons à un phénomène intéressant. Pour les acteurs et actrices, les grands rôles ne se trouvent plus obligatoirement qu’au cinéma. En effet, on constate une effervescence autour de différents projets télés, souvent portés par un grand nom d’Hollywood. Qui refuserait en effet d’incarner un super-héros ou un personnage de la littérature par exemple ? Le jeune Lucas Till ne doit-il pas être fier d’enfiler les chaussures de Richard Dean Anderson ?

 

Un cas à part : le sequel

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Ni reboot ni remake, nous assistons depuis quelques années à l’émergence des sequels. Nous devons pour cela beaucoup à Neflix, qui donne l’occasion aux producteurs de proposer, des années après, de véritables retrouvailles. Dernièrement, Gilmore Girls est revenu pour une courte saison de 4 épisode d’1h30 pour le plus grand plaisir des nostalgiques. Et La Fête à la Maison : 20 ans après, avec John Stamos, nous propose de nous replonger dans le quotidien de la famille Tanner ! Les producteurs proposent quelque chose de connu, ils génèrent une véritable attente auprès du public, et même si ces retours ne sont pas toujours conformes aux attentes des fans, il faut bien avouer que c’est un peu comme retrouver de vieux amis, ça fait toujours du bien ! L’un des exemples français les plus célèbres est bien entendu Les Mystères de l’amour. Depuis 1992 et le lancement d’Hélène et les garçons, la petite bande squatte le petit écran, car après Le miracle de l’amour (1994-1996) et Les vacances de l’amour (1996-2004), c’est au tour des Mystères de l’amour (depuis 2011 sur TMC) de nous donner des nouvelles d’Hélène, de Nicolas et de tous les autres. Car le casting, depuis 25 ans, est le même ! Une exception française qui fait quand même du bien ! Bien entendu, ces suites ne sont pas toujours des succès, comme sur NBC avec Heroes Reborn en 2015. Quand ça ne veut pas…

 

Et dans l’avenir ?

Et dire que ce n’est pas terminé ! En effet, que ce soit dans le milieu des séries ou celui du cinéma, les projets affluent de toutes parts ! Alors que le grand écran nous offrira bientôt le reboot de Spider-Man (qui par la même occasion rejoindra les Avengers), on parle aussi d’un tout nouveau film pour Charlie et la Chocolaterie, prequel de celui de 2005 avec Johnny Depp. Du côté du petit écran, How I met your father, spin off de How I met your mother est toujours dans les tuyaux, tandis que Charmed devrait aussi revenir en 2018 pour un prequel.

 

Si nous voulons conclure convenablement cet article, nous ne pouvons que constater que le monde de la télévision est en mouvement permanent. La mode d’aujourd’hui n’est pas celle d’hier, mais elle sera totalement dépassée demain. Nous pouvons affirmer que les remakes et autres reboots de séries que nous subissons à l’heure actuelle est le fruit d’un grand nombre de choses. L’argent passe et passera toujours au premier plan des décisions des producteurs, mais même si la facilité est présente, l’envie de faire revivre ou tout simplement découvrir une œuvre plus ancienne est là. Oui, bien entendu, c’est simple pour les scénaristes. On prend du tout fait, on change quelques petites choses et hop, on le sert aux téléspectateurs. Mais ce n’est pas la fin de la créativité, loin de là. Les séries télévisées, quelque soit le format, ont encore de belles et longues années devant elle. Et surtout, il ne faut pas oublier qu’il faut de tout pour faire un monde, et que si le programme ne convient pas, il ne vous reste qu’une seule chose à faire : zapper…