A l’occasion de la sortie de leur premier album, on a eu la chance de s’entretenir avec le leader et chanteur du groupe LNP Roots Family. Un groupe de reggae acoustique engagé, composé de trois membres d’une même famille, qui officie depuis 2012. LNP a commencé à se faire connaître avec le clip La Voix du Peuple. Début 2019, le groupe sort un EP intitulé Résigné. Mais cette fois ils se lancent dans le grand bain avec la sortie ce vendredi 24 avril de leur premier album : Raggacoustic. Dnom Aizen, le leader et chanteur du groupe, a accepté de répondre à nos questions. [Interview réalisée en novembre 2019].
Comment est-ce que tu définirais le raggacoustic ?
C’est une contraction de reggae et acoustique : le raggacoustic. C’est quelque chose qu’on a essayé d’inventer. Enfin d’inventer… Rien ne s’invente vraiment, tout se transforme. On a essayé de mettre ça en place avec l’EP Résigné, mais on est beaucoup plus satisfaits du travail avec cet album. C’est plus précis, ça ressemble plus à ce qu’on voulait atteindre. On a définit de nouveaux ingrédients, tenté de créer quelque chose de nouveau. Ça sert à se projeter pour plus tard aussi, que d’autres reprennent ce style, le travaillent, le transforment. Ça vient aussi beaucoup de M’Dezoen , qui est aux arrangements. En gros il y a de la guitare acoustique, quelle soit classique ou folk, un peu de percutions, une basse amplifiée. On essaye de limiter tout ce qui vient de la batterie. On ajoute parfois des sons à la bouche. Ensuite on sample nos propres instruments et on rentre tout ça sur un séquenceur.
Est-ce que vous gagnez votre vie avec votre musique ?
Non malheureusement pas encore. C’est pas toujours facile. Pour la plupart d’entre nous on a des enfants. C’est beaucoup de travail et on dort pas beaucoup. Mais c’est une passion, le jeu en vaut la chandelle.
Quelles sont les influences majeures de votre musique ?
Tryo principalement. En tout cas quand on a débuté on écoutait beaucoup ce groupe. On apprécie les chanteurs qui utilisent des textes, on est plus intéressés par les paroles. On est également très influencés par les DOM-TOM. M’Dezoen en est originaire, il est donc très influencé par ces sonorités. On apprécie énormément Dub Inc également, ils sont les patrons après tout. Un peu de Danakil aussi évidemment, Taïro, etc… Mais aussi ceux qui viennent du rap et hip-hop comme Kery James, Keny Arkana ou Blacko. Les chanteurs qui ont des textes quoi.
Avec qui aimerais tu faire un featuring ?
Oh il y en a tellement. Un peu ceux que je t’ai dis avant. Dub Inc évidemment, Danakil, mais aussi des groupes comme Jahneration, voir même aller vers le rap ou le hip hop.
Qu’est ce qui a été le plus dur à concrétiser pour cet album ?
En premier lieu ça été de trouver la recette du raggacoustic. L’EP était pas encore au top, on voulait améliorer notre travail, le peaufiner. Quand on a débuté l’album on n’avait pas encore de studio, il fallait se débrouiller avec les moyens du bord. On est un groupe indépendant, c’est pas toujours facile. Il fallait trouver la bonne recette et déterminer comment l’appliquer. Comment se projeter dans le temps aussi, savoir à quoi on voulait que ressemble notre album.
Qu’est ce qui vous pousse à faire des morceaux engagés ?
On a pas besoin de se pousser justement. Ça vient naturellement. Limite on se pousse pour faire des morceaux plus légers, plus dansants. Parce que le public aime ça aussi, et on veut se diversifier, donc c’est avec les morceaux plus abordables qu’on se force.
Des sujets que t’aurais aimé aborder ?
Il y en a plein évidemment. Les sujets sont nombreux, on peut pas parler de tout. Certaines idées viennent au moment de l’actualité et disparaissent avec elle, qui demeure très éphémère. On voulait parler de l’écologie aussi, mais on l’a pas mis dans l’album, on garde ça pour une autre fois. C’est un sujet qui nous tient très à cœur. On milite beaucoup pour ça, ça sortira bientôt.
Pourquoi avoir choisit Soldat comme single ?
Soldat était le meilleur compromis dans notre style, entre ce qu’on faisait avant et ce qu’on fait maintenant. Entre le roots posé qui nous qualifie et un style plus rythmé qu’on a cherché à aborder. On a pas beaucoup sorti de morceaux rythmiques par le passé, en tout cas sur les réseaux sociaux et les plate-formes. Ceux qui nous suivent en concerts connaissent cette facette de notre groupe, mais ceux qui nous écoutent en digital sont plus habitués au roots tranquille. On voulait leur montrer qu’on pouvait faire autre chose, qu’on savait être plus musclé, plus rythmique. Aussi pour séduire les maisons de disques et les programmateurs.
Qu’est ce que signifie LNP ?
Ça signifie Love and Peace. C’était le nom de notre groupe en 2007 et 2008 quand on débutait, quand on était aux touts premiers balbutiements. Mais quand on a rejoint Meltin Recordz, ils nous ont suggéré de changer de nom. Par rapport aux programmateurs, ils avaient peur qu’ils imaginent qu’on était des punks à chien et qu’on ne trouve pas assez de dates. Donc on a changé de nom, mais on garde LNP devant. Après tout c’est un délire entre potes et c’est notre genèse. On a donc contracté.
Pourquoi ne pas parler du cannabis dans vos chansons ?
Je vais être honnête : déjà parce qu’on fume pas. Je fume pas, ma sœur non plus, mon frère en de rares occasions. Ça ne nous touche pas forcément, on n’est pas les plus légitimes pour parler de ça. On n’a pas forcément envie de militer la dessus. D’autres artistes le font très bien déjà, comme Yaniss Odua et son Chalawa, qui dénonce ses méfaits et met en valeur ses qualités. On veut pas pousser les gens à fumer. Même si on va pas se cacher, notre public est majoritairement fumeur. Mais on n’y voit pas d’intérêt pour le moment. Si on devait aborder le sujet ce serait davantage sur un point de vu politique, pas rapport à l’État et sa pénalisation. On réfléchit à la bonne façon de la faire. Peut-être plus tard.
Quel est le morceau dont vous êtes le plus fiers ?
C’est difficile de répondre à cette question vu que nous sommes un groupe et que chacun a forcément ses goûts personnels. Mais je pense que « Je ne voterai pas » est une chanson dont nous sommes très fiers, pour son message et sa forme. On a réussi dans ce morceau à vraiment retranscrire ce qu’on pensait, et surtout les émotions qui accompagnent les propos.
Je ne voterai pas, tu n’as pas peur que ce morceau divise les fans ?
C’est un peu le but aussi. On a la chance de pouvoir le tester en concert. C’est vrai que le morceau divise mais c’est aussi ce qu’on aime. Certains trouvent ça génial et sont entièrement d’accord, d’autres trouvent nos paroles un peu abusées. Certains sont pas d’accord mais veulent en discuter. C’est très catégorisé. On n’a pas peur de perdre du public, on se dit pas que les gens vont arrêter de nous écouter à cause de paroles tranchées. C’est aussi ce qu’on veut, amener à réfléchir, amener le débat, diviser les avis aussi. On veut pas qu’on nous déteste non plus, c’est ce qu’on pense, on voit plus d’intérêt dans le vote, mais on n’oblige personne à ne plus voter. Si au fond de toi c’est ce que tu veux et tu penses ça utile et bien vote pas de souci. Mais nous on n’est plus d’accords avec ce qu’il se passe.
C’est quoi la suite ?
L’album déjà. On a très envie qu’il sorte. On en est très fier et on espère que les fans seront au rendez-vous. Il y a quelques clips de prévus avant la sortie de l’album. On a deux clips de prévus pour le moment. On va faire des cessions studios aussi. Quelques live. Et quelques anciens morceaux à retravailler.