Quel est le genre du vin ?

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Alors que la première occurrence écrite sur le vin remonte au XXIIIe siècle avant J.C (par le roi de Lagash, cité sumérienne assez obscure), la première association internationale mettant en lumière les vigneronnes et viticultrices ne voit le jour qu’en 2017.

En tombant sur la « citation » d’un compte Instagram Food assez connu, une réflexion est apparue. Voici la citation en question : « Quand j’entends vin féminin, j’ai envie de mettre des gifles avec les œuvres complètes de Simone de Beauvoir ».

Laissons cette pauvre Simone tranquille et attardons-nous sur cette expression, devenue tellement courante, qu’elle alimente aujourd’hui la culture populaire des memes.

« Vin féminin » … Que serait un vin féminin ? Simplement un vin fait par une femme ou un homme peut-il également faire un vin féminin ? Par « vin féminin », comprenez plus facile à boire, moins tannique, plus léger, somme toute, plus élégant. C’est connu qu’après tout, les femmes ne boivent que des blancs (sucrés surtout) et des vins rouges très légers tandis que la gente masculine apprécie davantage les vins tanniques et très forts en goût.

vin féminin

Lors de certaines dégustations, on peut entendre, non sans surprises, que certaines appellations de vins bourguignonnes (Volnay, Vosne-Romanée…) sont féminines (comprenez par là qu’il s’agit de vins plus subtils, plus fins, plus fruités) par opposition à celles dites masculines comme les Nuits-Saint-Georges, les Pommard ou les Corton et qui serait plus rustiques, plus forts, plus tanniques.

Le vin genré ?

Outre la polémique de genre que cela peut engendrer, peut-on réellement attribuer un caractère féminin ou masculin à un vin ? Ne sommes-nous pas rendus dans une époque où la seule manière de promouvoir une minorité est de l’exposer ?

Outre la polémique de genre que cela peut engendrer, peut-on réellement attribuer un caractère féminin ou masculin à un vin ? Ne sommes-nous pas rendus dans une époque où la seule manière de promouvoir une minorité est de l’exposer ?

 Pourtant, les femmes ont toujours pris part au travail de la terre et de la vigne. Davantage reléguées aux tâches peu méticuleuses (taillage, ramassage des ceps…) pour laisser les tâches plus techniques (assemblage, vinification…) aux hommes, elles ont malgré tout marqué l’histoire du vin par de nombreuses avancées : Louise Pommery par exemple est la première à expérimenter le champagne brut qui n’était jusque-là qu’un vin de dessert effervescent et sucré.

louise pommery vin

Françoise Joséphine de Lur-Saluces également puisque c’est elle qui fait construire pour la première fois un chai à Yquem et fait de ce château, encore aujourd’hui, le blanc liquoreux le plus célèbre du monde.

Françoise Joséphine de Lur-Saluces

Quelques chiffres : En France, 31% des exploitations sont dirigées OU CO-dirigées par des femmes. Ces dernières représentent 25% des sommeliers en exercice et un tiers seulement des œnologues. Il y a du progrès me direz-vous puisqu’il y a encore vingt ans, sur les façades des grands domaines en Bourgogne, il y avait ces écriteaux « interdit aux dames ».

Retour à l’essentiel…

Mais avec cette stigmatisation, n’avons-nous pas ainsi oublié toute l’essence même du vin ? La neutralité ! Le vin comme la cuisine n’a pas de genre. Faire du vin ou en déguster c’est simplement se laisser transporter par le goût, l’histoire et les différentes sensations que cela provoque en nous. C’est découvrir une palette d’émotions sensorielles indépendante de clichés. Parler de vin féminin ou de vin masculin est en réalité un non-sens et c’est là la revendication de Women Do Wine mais aussi des différentes associations françaises comme les Fa’Bulleuses ou les Vinifilles.

Cessons donc d’accrocher une étiquette à ce breuvage millénaire et buvons, mais toujours avec modération !

note : image de couverture prise sur pexels

Ecrit par Sakina