Les Cahiers du Cinéma : totale démission

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Il y a trois semaines, la revue Les Cahiers du Cinéma était rachetée par une vingtaine d’actionnaires. Hier, tous les rédacteurs ont démissionné brusquement.

Godart, Truffaut, Rohmer y étaient passés. La bible des cinéphiles connait un des plus violents virages de toute son histoire. Les dix-huit journalistes sont partis, dont le rédacteur en chef, Stéphane Delorme.

Que s’est-il passé au sein des journalistes et des critiques ? Le nouveaux rachat devait permettre de raviver la revue, la rendre plus belle et plus clinquante. Le sauvetage express venait de personnalités « amoureuses du 7e art » comme Xavier Niel, Marc Simoncini, Alain Weill, Marc du Pontavice, Toufik Ayadi, Christophe Barral, Pascal Caucheteux…  De nombreux producteurs en somme, ce qui représentait une ligne rouge pour l’éditorial.

Cahiers du cinéma

Les journalistes craignaient les conflits d’intérêts

Ce nouveau groupe d’actionnaires venait représenter tout ce que Les Cahiers du Cinéma avait combattu jusque-là. Ce vieux cinéma « à la papa », conventionnel et loin des excentricités qu’ils avaient l’habitude de défendre. Le nouveau directeur de la société avait tenté de les rassurer sur leur indépendance. Mais les journalistes n’ont cessé de pointer les probables conflits d’intérêts à venir. Aussi, quand des contradictions sont apparues avec la charte d’indépendance (et notamment l’obligation d’un rapprochement avec le cinéma français), la réaction fut unanime.

Dans un long déchirement, la rédaction a choisie de se séparer du journal, refusant un regard partisan sur les sorties cinématographiques. Pour éviter la suspicion de complaisance et rester fidèle à ce qu’ils ont toujours écrit, ils ont fait jouer « leur clause de cession ». Ce dispositif les autorise de quitter l’entreprise en percevant les indemnités de licenciement si le journal change de propriétaire.

Reste à savoir qui viendra rejoindre la nouvelle équipe. Celle-ci aura probablement une autre tonalité que l’élitisme de la précédente. Cédé par Richard Schlagman, ancien des éditions Phaidon, il n’empêche que Les Cahiers du Cinéma ont toujours été déficitaires depuis 1951.