Rai, le samouraï du futur

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Vous le savez sans doute mais le monde part à sa perte. La preuve est dans la Rai où un samouraï du futur part sauver ce qui reste de la civilisation en récupérant des morceaux de Père. Étrange, non ?

Alice au pays de Mad Max

Rai par Juan José Ryp

Rai représente le futur de l’univers super-héroïque Valiant. Dans le récit précédent, Fallen World, on découvrait que ce samouraï déchu était devenu le gourou de survivants sur une planète dévastée. Au temps de sa gloire, il était le protecteur de la station orbitale de Néo-Japon mais il s’était rebellé contre Père, l’intelligence artificielle qui dirigeait d’une main de fer la cité spatiale. Cette révolte avait provoqué la chute de la station dont les débris forment désormais des îlots de civilisation au milieu d’une planète livrée à la loi du plus fort. Par sa rébellion, Rai pensait avoir détruit Père. Hélas, le dictateur numérique a pu faire des sauvegardes de lui-même dans les différents débris du Néo-Japon et il doit les rassembler pour récupérer sa puissance. Rai quitte alors son rôle de chef de clan pour détruire Père à l’aide de son frère robotique, Raijin.

Dès le premier épisode, le scénario résume tout ce qui précède par une discussion entre Raijin et un barman. Mais le créateur de cocktail éprouve des difficultés à se concentrer car on voit à travers les fenêtres Rai défoncer une bande de barbares. On est loin du space opéra mais plutôt dans la science-fiction à l’anglaise par ces éléments absurdes dignes d’Alice au Pays des merveilles. Rai et Raijin font un road trip et une quête à la fois extérieure et intérieure. Pour y arriver, ils font des haltes dans plusieurs communautés : une maison témoins, une seigneurie fortifiée, une cité romaine et une nouvelle cité mésopotamienne.

Un Œdipe cyborg

Rai et Raijin

Par cette recherche des débris de Père, Rai est également un récit familial où les relations sont pour le moins compliquées. Raijin est le grand frère de Rai mais son corps robotique est celui d’un garçonnet. Rai a tué son père et pas seulement symboliquement comme l’écrivait Freud. Il doit à nouveau le faire en éliminant les sauvegardes nommées progénitures. Le scénariste Dan Abnett ajoute plus d’humour en particulier la dynamique entre Rai et Raijin. Rai se méfie du petit et il a raison car son sourire pervers surprend. Mais Rai est aussi inquiétant par son fanatisme : il ne veut laisser aucune trace de Père même si ces programmes servent désormais à faire le bien. Les deux frères évoluent au fil du récit et l’humour laisse place à l’inquiétude et à la tristesse. La série Rai devient alors encore plus forte.

Le dessinateur Juan José Ryp est dans la lignée du style des super-héros avec beaucoup de dynamisme dans les cases et de fluidité dans la lecture. On le voit très bien dans les scènes d’action, particulièrement le très réussi combat final. Il ne vise jamais l’exagération mais, par le cadrage, Raijin nous fait sourire ou inquiète. Ryp reprend l’esthétique asiatique avec Père en position du lotus sur un trône comme une imagerie bouddhiste. Abnett le situe d’ailleurs à Katmandou.

Rai est au final une fantastique plongée dans le futur mais surtout une proposition rafraîchissante sur la science-fiction et la quête de soi. Ce volume est la fantastique deuxième partie d’une trilogie comme l’annonce la tout dernière page de ce volume.

Vous pouvez retrouver les débuts de cette aventure par la chronique sur Fallen World et une excellente série d’enquêtes historiques du même dessinateur, Britannia.