Jusqu’au Printemps de Charles Masson: La Poésie de la Vie Face à la Maladie

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Marie est une Gone Lyonnaise de 70 ans, diagnostiquée avec un cancer. En consultant le Docteur Charles Masson et en apprenant qu’elle n’a que quelques mois à vivre, sa vie bascule. Mais elle garde sa féroce indépendance et ses petites habitudes. Cette mamie discrète mais bornée exsude l’indépendance et la joie de vivre. Si bien qu’elle aura marqué à vie ce médecin qu’au point où il en fera un livre.

Marie nous apprend la poésie de la vie:

Une citation de Flaubert vient à l’esprit en lisant cette oeuvre.

“Ce qui me semble beau, ce que je voudrais faire, c’est un livre sur rien, un livre sans attache extérieure, qui se tiendrait de lui-même par la force interne de son style, comme la terre sans être soutenue se tient en l’air, un livre qui n’aurait presque pas de sujet ou du moins où le sujet serait presque invisible, si cela se peut. Les œuvres les plus belles sont celles où il y a le moins de matière.”

Ce livre parle de Marie, mais aussi de Charles Masson, ORL. Il n’y a pas vraiment de fil conducteur dans cette histoire mais on peut la séparer en deux actes. Le premier où l’on découvre la personnalité et la vie de Marie, puis le second où l’on voit en fin de vie à travers des yeux de son médecin. Pas d’intrigue, pas d’élément fantastique, ce recueil peut se passer comme un mémoire. Comment une patiente a marqué l’esprit de son médecin sans faire quelque chose d’épique.

En plus de présenter une histoire en deux actes, les lecteurs peuvent suivre Marie à travers les 4 saisons où on la voit vivre sa vie, vieillir et aimer ses petites habitudes. On comprend les raisons de sa vie seule, sans être engouffrée dans la solitude. Marie est bornée, elle a des choses à faire et veut survivre jusqu’au printemps, sa saison préférée. On pourrait penser que cette BD est l’histoire de Maire, mais en fait, c’est l’histoire du docteur.

Bien que ce livre parle d’elle, elle est en fait un personnage secondaire. A travers ses pages, il rend la vie à Marie, et révèle au monde pourquoi elle ne l’a jamais quitté. L’auteur écrit de son point de vue, le lecteur voit les choses de sa perception à lui et non à elle. Cela n’enlève rien de la force et l’impact de cet oeuvre. On voit la résignation et la bienveillance du médecin envers sa patiente et cela anime bien la dynamique entre ces personnages.

Les Lyonnais s’y retrouvent

Ce livre est rempli d’argot et de jargon Lyonnais. Les Gônes, comme on les appelle, s’y retrouveront bien. En revanche, pour les personnes qui ne comprennent pas l’argot, ils devront faire un petit détour sur internet pour comprendre certaines expressions.

Mais l’utilisation de ce type de langage rend les personnages plus réels, plus vivants aux yeux des lecteurs. L’utilisation d’un langage courant, et spécifique à une ville, ajoute une couche de réalisme dans les dessins.

Les dessins sont simples et le couleurs se limitent au noir, blanc et une peinture pastel en fond. Une seule couleur vive traverse les pages. Un rouge vif que porte Marie toute sa vie. Cela symbolise bien la démarcation parmi les autres patients du médecins et permet au lecture de ne jamais la rater. La présence de ce rouge sur chacune des pages où est représenté Marie, rajoute une autre métaphore: du fil rouge du destin.

Ce livre est une ode à la vie. Le temps est précieux et même si l’on n’en fait pas grand chose avec, il faut en profiter quand on peut. Malgré la nostalgie et une fin aigre douce, les lecteurs ont la chance de pouvoir comprendre comment un médecin essaie d’aider ses patients comme il peut, tout en respectant leurs volontés. On découvre un homme nostalgique et ému par cette “madame tout le monde,” qui fait que les lecteurs y sont aussi attachés.

Jusqu’au Printemps des éditions Delcourt est disponible en librairie.