Critique « Kong – Skull Island » de Jordan Vogt-Roberts : Plus c’est gros, mieux c’est ?

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12 ans sont passés depuis la dernière aventure en date de King Kong. En 2005 Peter Jackson offrait une vision moderne et violente du mythe, portée par Naomi Watts et Adrian Brody. Ce mercredi est sorti une nouvelle version des aventures du roi des gorilles : Skull Island de Jordan Vogt-Roberts, aidé par un casting composé entre autres de Brie Larson, Tom Hiddleston et Samuel L Jackson.

Une vision édulcorée pour une version beaucoup plus fun :

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Jordan Vogt-Roberts édulcore complètement la thématique de King Kong. Il délaisse simplement la romance entre l’animal et la femme, met de côté la volonté de l’être humain de contrôler et d’exhiber cet animal comme dans les versions précédentes. Pourtant, l’être humain est toujours une belle ordure. Samuel L Jackson, dans ses classiques rôles de méchant, cherche à tout détruire sur son passage, revendiquant la puissance infinie des Etats-Unis. Il veut ainsi réduire en cendres King Kong. Les personnages demeurent également moins profonds et apparaissent comme de simples stéréotypes : Tom Hiddleson est le héros au grand cœur, Samuel l Jackson le pantin borné et obsolète du gouvernement, John Goodman le scientifique fou, Brie Larson est la touche féminine et sensible, les soldats sont des roublards sympathiques et enfin John C Relly apporte la touche comique. Skull Island est également composé de nombreux clichés du genre blockbuster et est ponctué de dialogues parfois insipides. Un film sans surprise donc.

Pour autant cette nouvelle version est étonnement fun. Assez décomplexée, portée par des images de synthèses souvent somptueuses et agrémentée de quelques cadrages sublimes avec le soleil en arrière-plan, signature de Michael Bay, Skull Island est une aventure calibrée et efficace. L’imaginaire de la faune et de la flore est assez garni, Jordan Vogt-Roberts ayant déclaré s’être inspiré de Miyazaki, un apport qui se ressent régulièrement à travers les animaux que les personnages croisent, tous plus beaux les uns que les autres. Dans un univers qui rappelle parfois Jurrasic Park, l’émerveillement prend racine, avec l’aide d’un King Kong de plus de trente mètres, boosté aux hormones. Jordan Vogt-Roberts jette son spectateur directement dans le vif du sujet et esquive la longue introduction représentative du King Kong de Peter Jackson, tout en inscrivant son oeuvre dans une ambiance musicale rock. De même, les scènes d’action valent le coup d’œil. Rythmées et parfaitement exécutées, Jordan Vogt-Roberts trouve quelques idées sympathiques pour varier les plaisirs à l’image de l’hélice de bateau dont se sert King Kong comme d’une masse ou d’un arbre comme batte de baseball.

King Kong – personnage secondaire :

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Jordan Vogt-Roberts prend le parti pris de créer une certaine distance avec King Kong. Celui-ci n’est plus un élément central de l’intrigue comme sous la direction de Peter Jackson, où l’intérêt premier du long métrage était la relation entre Naomi Watts et le singe. Ici, il s’agit d’avantage d’un survival avec une sous intrigue concernant King Kong. Le spectateur suit les différents protagonistes qui doivent survivre dans un monde hostile. King Kong devient une entité divine, un mythe mis en avant par des discours, des légendes, des souvenirs. Il devient une icône reposant sur notre dimension mémorielle populaire et un apport de gigantisme salvateur.

Pour autant dans la version de Peter Jackson, Andy Serkis, alias Gollum, donnait ses traits au singe géant via le procédé de Motion Capture, ce qui offrait des expressions faciales très réalistes. Dans la version de 2017 la Motion Capture est également employé, utilisant les trais de Terry Notary, pourtant le rendu est moins expressif, et le ressenti à l’écran plus factice, moins axé sur les émotions de King Kong, qui apparaît incontestablement plus fade. Sans parler du fait que le singe semble changer de taille au cour du film, que ses empruntes sont à peines espacées de quelques mètres, invraisemblable au vue de sa taille, et qu’il parvient à être d’une discrétion absolue, exercice compliqué lorsque l’on mesure 30 mètres de haut. Jordan Vogt-Roberts tente d’offrir à King Kong une backstory plus ou moins crédible et le confronte à des monstres au design agréable, pour créer une sorte de connexion avec le Godzilla de Gareth Edwards (connexion qui se confirmera par la scène post générique).

Kong: Skull Island est un blockbuster classique mais non dénué d’efficacité, qui offre la part belle aux scènes d’actions, aux fonds verts et à la figure de Samuel L Jackson dans un ton décomplexé et fun. Pour autant la Warner n’est pas obligée de se lancer dans un univers étendu de monstre géant pour faire s’affronter Kong et Godzilla, comme cela semble se présager…