L’apocalypse au féminin dans Larkia

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Une femme est prête à accoucher mais autour d’elle le monde n’est que ruines. Comment donner naissance alors que l’apocalypse est partout ? Tel est le dilemme de l’héroïne de Larkia publié par Glénat.

Le monde d’après

Larkia

Le monde moderne et progressiste n’existe plus. La vie a laissé place à la survie. Les villes sont devenues des ruines où quelques survivants se battent pour le pouvoir ou une boîte de conserve. Le danger est donc aussi omniprésent que la nourriture est rare. Pourtant, Larkia veut espérer et donne naissance à un garçon. L’accouchement se passe mal car, sans aucun médicament ni médecin confirmé, la jeune femme souffre le martyr et en garde des cicatrices. De plus, l’enfant ne peut ouvrir les yeux. Ce handicap mystérieux va en faire l’objet de luttes. En effet, dès le lendemain, Larkia et son fils sont poursuivis par une troupe lourdement armée. La toute jeune famille ne cessera de tenter de fuir pendant tout le volume, alors que l’on découvre par un flashback l’origine de l’apocalypse mondial. On découvrira également dans un passé récent comment Larkia est tombée enceinte.

Le monde d’avant

Étrangement, c’est le passé moderne qui est le plus sombre que le présent apocalyptique. On découvre que des recherches biologiques, le projet HB, sont menées sur des femmes enceintes. Dans les deux périodes de Larkia, on suit des familles en fuite car dans le passé, l’une des cobayes fuit avec ses filles mais meurt brusquement alors qu’elle pense être sur écoute. Est-elle paranoïaque ou la seule à comprendre ce qui se passe ? Cette tonalité très sombre est en contraste avec les dessins et les couleurs de Patricio Angel Delpeche. Des images proches de l’esthétique publicitaire côtoient une violence constante. Ses scènes d’action sont très réussies. Il refuse de multiplier les décours ou les détails qui feraient perdre le message du livre mais opte pour des formes rondes et un dessin très simple. Les couleurs vives apportent une chaleur à ce monde pourtant sinistre. On le voit car Glénat n’hésite pas à proposer une édition complète avec de nombreux bonus (une préface, des interviews de tous les artistes, les tests graphiques des personnages et des pages comparatives avant et après colorisation).

Larkia une héroïne féministe

Une aventure artistique

La scénariste Ingrid Chabbert est bien connue comme une autrice jeunesse mais elle s’ennuyait. Voulant trouver une nouvelle piste de recherche dans la bd, les éditeurs ne lui proposaient que des sujets « young adutl ». Refusant d’être cantonnée à la jeunesse, elle donne avec Larkia un sacré coup de pied au patriarcat. En effet, ce récit complet en un tome est construit comme un pur récit de genre dans un contexte post-apocalyptique. Chabbert limite les dialogues pour laisser s’installer l’ambiance. On retrouve comme dans Mad Max l’omniprésence des scènes d’action et un groupe de personnages qui tente de fuir des barbares dans un monde sans foi ni loi. Cependant, l’autrice va plus loin en mettant une héroïne au centre du récit. Cette femme forte n’a pas besoin des hommes pour s’en sortir. L’accouchement qui ouvre l’album plante le décor. La césarienne sans péridurale se passe dans une casse automobile par une accoucheuse gâteuse et sans hygiène. Cette scène n’est pas anecdotique car elle montre dès le début le courage de Larkia et explique ensuite pourquoi elle aura tant de mal à fuir. Cette femme est une dure à cuire, une survivante qui n’hésite pas à avoir recours à ses talents de tireuse d’élite pour défendre son foyer. Larkia est donc aussi une réflexion sur l’égalité des genres. Ingrid Chabbert ne cache d’ailleurs avoir été inspirée par le personnage de Charlize Theron dans Mad Max Fury Road.

D’une lecture très rapide, Larkia est un récit post-apocalyptique réussi, une suite de Mad Max qui aurait mis Charlize Theron au centre. Cependant, il est un peu court sur un seul tome car de nombreux mystères ne sont pas dévoilés.