Se relever de l’horreur après le 13 novembre

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Les attentats au Bataclan ont marqué la France mais aussi la vie de nombreuses victimes. Comment se relever après avoir subi l’horreur ? C’est la question que pose Après le 13 novembre édité par Delcourt dans une œuvre sensible.

Se relever de deux coups de feu…

Sophie Parra était présente au Bataclan le 13 novembre 2015 lorsque les terroristes sont arrivés pour faire un massacre. Même si elle a reçu deux balles dans le corps, Sophie est une des survivantes. Après le 13 novembre fait part des coups de feu et se demande comment Sophie peut retrouver le goût de vivre. A l’hôpital, elle réalise que cette attaque laissera des traces à vie dans son corps car une balle est restée figée dans son bassin. Elle marche avec des béquille pendant longtemps et la douleur physique reste car tout ne vient pas du corps.

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Il y a également une souffrance morale. Après le 13 novembre montre que le retour en arrière est impossible et que le quotidien est une épreuve. Dans un premier temps, elle n’arrive pas à sortir de chez elle et la nuit, elle craint que des terroristes reviennent pour « finir le travail ». Elle ne peut regarder les infos à la télé sans pleurer. Ensuite, elle arrive à se mêler aux autres mais pas partout. Une carte illustre les lieux où elle ne peut plus aller.
La douleur viendra également des recoins inattendu du net. Alors qu’elle est sur le lit d’hôpital, Sophie a le courage de lancer un message de paix à l’adresse des musulmans. Cette bonté lui vaudra une avalanche de haine islamophobe et une remise en cause de son témoignage par des adeptes de fausses théories du complot. Des journalistes de Voici achètent ses connaissances pour obtenir son numéro de portable.

… obtenir de l’aide…

A l’inverse, sa famille la soutient. Des anonymes ont aussi pitié d’elle mais Sophie ne supporte pas cette commisération. Les médicaments sont une aide mais les effets secondaires compliquent la vie de Sophie. Le lecteur découvre dans Après le 13 novembre qu’il existe aussi une aide publique. Gratuitement, elle est suivie par un psy reconnu mais ce n’est pas sa solution. Elle préfèrera choisir son spécialiste… plutôt plusieurs. Une indemnisation existe mais le circuit pour l’obtenir est un parcours du combattant ou plutôt du survivant. Une association de victime propose de revenir au Bataclan ou de voir un concert pour dépasser le traumatisme.

… pour se tordre de rire

Le scénario d’Après le 13 novembre est tiré de l’expérience de Sophie Parra que Davy Mourier a aidé à mettre en forme. Plutôt que de choisir le réalisme et la dépression, les deux scénariste optent parfois pour l’humour. Ils évitent bien entendu pour l’attentat. Sophie a un recul admirable sur sa situation. On sourit lors des premiers jours à l’hôpital alors que le médecin annonce que Sophie pourrait perdre l’usage de ses jambes. Ayant déjà une balle dans le corps, elle préfère éviter de se lancer dans une collection.

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Ce ton doux amer est caractéristique de la collection Une case en moins dirigé par Davy Mourier. L’objectif est d’une part de proposer des albums mixant dépression, tendresse et humour. D’autre part, Davy Mourier veut ouvrir les portes de la bd en allant chercher des musiciens comédiens, humoristes ou ici une témoin et de les accompagner dans la découverte de ce nouveau médium. Après le 13 novembre marque les débuts professionnels du dessinateur et coloriste Gery. Son style rond apporte une douceur et une tendresse qui est le contrepoint parfait au traumatisme de Sophie. Cette rondeur n’empêche pas de représenter les cauchemars éveillés de Sophie. La colorisation est aussi très juste en particulier dans le récit de l’attentat. Les couleurs froides du début laissent la place à des tons chauds puis au noir presque complet. De plus, ce style proche de la ligne claire permet de faire passer l’humour sans choquer.

Après le 13 novembre est le récit de la résilience de Sophie. Le lecteur est profondément ému par ses souffrance multiples mais aussi de son courage de cheminer vers la reconstruction physique et morale. Le parcours est complexe et personnel mais la fin apporte un rayon de soleil.
Vous pouvez d’autres témoignages en bd sur le site avec Une féministe révolutionnaire à l’atelier et L’itinéraire d’une garce.