Prenez l’Asphalt Blues pour trouver l’amour

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L’amour est-elle une ligne droite ou une voie sans issue ? Telle pourrait être la question que pose Asphalt Blues, la dernière sortie des Humanoïdes associés. Un homme et une femme, anciennement en couple, suivent une route parallèle les conduisant à une étape cruciale de leur vie.

Hit the road Jack

Ashpalt Blues un dessin hypnotique

Dans un futur très proche, Nina et Mick sont séparés depuis treize ans et chacun a refait sa vie mais ils ressentent l’Asphalt Blues ou serait-ce la crise de la quarantaine ? Nina accepte mal la jalousie de son mari car elle attire autant la lumière que lui. Mick doit faire avec la dépression de son épouse. Sans s’en rendre compte, ce duo partage un quotidien très proche. Ces moments banals ou plus rythmés se succèdent et révèlent la fragilité du sentiment amoureux.

Jaouen Salaün conduit de main de maître l’ensemble des éléments du livre puisqu’il est scénariste, dessinateur et coloriste d’Asphalt Blues. Le lecteur est tout d’abord impressionné par le dessin axé sur un très fort réalisme. Peu d’informations passent par les dialogues mais on reste sur les impressions des personnages tout comme le dessin laisse une surface immaculée. Les couleurs illustrent l’ambiance générale car on glisse du passé rose à un présent glacial ou réaliste. Ces plages de couleurs donnent un effet mat par l’absence d’encrage mais cette image lisse révèle les failles des êtres. Le lecteur est au plus près de ces êtres par des cadrages très serrés qui découpent les corps.

Sur la route du sentiment amoureux

Le futur proche d'Ashpalt Blues

Au moment de leur vie commune, Mick est un connard arrogant. Il le sait mais n’arrive pas à changer à cause de son passé d’enfant placé. Épuisé par ces problèmes, Nina n’a plus de sentiment pour lui. L’eau omniprésente puis le parapente montrent que cette période est un temps suspendu où les amants flottent mais la gravité les rattrape. Asphalt Blues est avare de dialogues pour laisser s’installer une ambiance cotonneuse sur la nostalgie d’un temps révolu. Ce flou est aussi géographique. On est sans doute aux États-Unis mais ce n’est jamais explicite. Des scènes superbes marquent comme lorsque Nina s’allume machinalement une clope puis rentre progressivement dans la piscine alors que le bout incandescent de sa cigarette s’éteint.

Après la rupture, Nina a avancé. Elle travaille dans la mode et vit avec un cadre dans un entreprise menacée par le terrorisme écologique. Dans sa vie privée, Mick s’est posé en devenant père de famille mais sa femme est marquée par un accident de la circulation pourtant impossible de voiture car désormais tout est automatique. A-t-elle fait une tentative de suicide ? Bien que leur passé en commun semble révolu, des liens entre eux se multiplient et les rapprochent : une image, un problème commun puis une personne de leur entourage de plus en plus proche. Séparés, ils ont plus de points communs qu’ensemble : une misère sexuelle, une frustration économique et un passé qui inquiètent leur moitié. Par un lien, le récit s’élargit et devient politique.

Le récit d’Asphalt Blues se déroule dans le futur mais, au départ, par des détails. Il n’y a pas de robots mais le dialogue entre les amoureux passe en visio dans des voitures électriques qui changent de couleurs. Mais, la science-fiction arrive après la rupture par des robots et des bolides de plus en plus futuristes qui ponctuent les mésaventures amoureuses de Mick et Nina.

Bouclez votre ceinture et suivez le couple d’Asphalt Blues sur le difficile chemin de l’amour. Si le voyage est heurté, il se révélera splendide par le dessin de Jaouen Salaün. Le bout du chemin est un peu idyllique… quoique. Un dernier tournant change la perspective et offre un paysage inattendu.

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