Lewis Evans « Cet album c’est une histoire de retour, d’un comeback »

0
878

Lewis Evans sort un nouvel album L’Ascension. Un nouvel album fait de nouvelles méthodes d’écritures, un album incroyable. On vous propose aujourd’hui une interview avec cet anglo-normand à l’occasion de la sortie du dit album.

Vous êtes né à Liverpool mais vous avez un parcours un peu particulier pouvez-vous nous le raconter ?

La route a été longue, je suis né à Liverpool. Maintenant, je vis à Granville. Avant, j’ai surtout partagé mon temps entre Paris et la Normandie. Mes parents sont venus en France. Je pense que c’est cette double culture qui est importante. La Normandie est musicalement très tournée vers l’Angleterre. Beaucoup de musiciens, de groupes sont très portés sur la musique anglo-saxonne en Normandie. Je pense que cela vient de l’époque où les personnes allaient à Jersey pour acheter des vinyles. Beaucoup de groupes vivent cette influence.  Vu que je viens de Liverpool, les personnes pensent que je suis très inspiré par la scène de Liverpool. Dans les faits, je me sens plus proche de la scène de Manchester, comme Cast par exemple. C’est une attitude sincère que je recherche.

On a l’impression quand on écoute l’album qu’il y a un grand côté pop française. C’est ce que tu as voulu faire?

Pas forcément, après, c’est de la pop. De 16 à 20 ans, j’écoutais que Pulp en boucle, Jarvis Cocker c’était surement ma grande idole à ce moment-là. Je suis marqué par la scène des années 90, la scène punk surtout. Je pense aussi que la musique actuelle est très tournée vers les percussions. Dans les faits, je n’en utilise pas donc ça donne ce côté contrepoids, un peu pop à la Rolling stone. Je dirais que si l’on retrouve ce coté français c’est à cause de l’accordéon je pense sur certaines chansons comme Besoin par exemple. J’aime beaucoup la France, j’y vis déjà, je me sens français souvent. Quand on compose, je demande des instruments français comme l’accordéon ou la musette. On trouve un coté fête, un côté guinguette. J’essaye de trouver quelque chose qui vient d’ailleurs, pour le rendre pop anglaise.

Cet album a une histoire un peu particulière, Pouvez-vous nous la raconter ?

C’est une histoire de retour, d’un comeback, sur l’EP j’ai beaucoup mis un aspect autobiographique, c’était quelque chose de lourd biographiquement parlant. J’avais pas mal de soucis à ce moment-là. Durant le covid, ça a été particulièrement dur. J’ai pris un énorme virage pour devenir jardinier.  Je bossais aux espaces verts de Grandville, je voulais en finir avec la musique. Pendant que je travaillais, il y a eu des mélodies qui sont venues à moi, c’était quelque chose de quasi divin je dirais, peut-être spirituel. C’est un album que je ne voulais pas faire, mais au final, je l’ai fait dans un temps très court, en trois semaines. C’est comme si la musique m’avait dit « il faut le faire ». Sur mon EP le rayon vert, c’était disons, un peu lourd, biographiquement dense, là c’est plus spontané, féroce je dirais. Quelque chose de plus puissant. J’ai l’impression d’avoir fait comme pour mon premier album.

 

Vous en êtes fier de cet album ?

J’en suis super satisfait. J’ai l’impression que le fait de ne pas avoir réfléchi m’a permis d’y mettre autre chose. Je voulais qu’il soit fait avec le cœur. Sur les autres albums, on passait trop de temps, pour celui-ci, j’ai l’impression de l’avoir fait à l’instinct. Avec Frédéric Buchet, on a bossé dans une abbaye. C’est incroyable, de pouvoir évoluer dans un tel environnement. Avec lui, je dirige les morceaux et disons qu’il affine le tout. On a essayé de rassembler du monde autour de nous, des personnes issues de la scène indé folk de Granville. C’était super comme ambiance, j’était seul avec mon label qui m’a soutenu. C’était une ambiance de travail géniale faite d’idées et de fun. C’est marrant parce qu’on a travaillé sans pression,  en se disant qu’il n’y avait rien après.

Pendant longtemps vous avez fait partie d’un groupe,  est-ce que partir de ce groupe pour une carrière solo c’était une manière de trouver une forme d’indépendance.

Quand je jouais dans les Lankskies, tous les droits d’auteurs étaient séparés en cinq, c’était une ambiance très communiste, (rire). C’était une époque où je me suis beaucoup amusé. Je suis parti en solo parce que j’avais un besoin de musique douce, un peu comme Pete Doherty. J’étais jeune, j’ai cherché une musique calme donc je me suis lancé dans la folk. Je crois que l’on peut dire que la musique est un miroir de ma personne, je ne suis pas berné dans ma musique, je ne me limite pas à un style je dirais. Ma musique c’est moi je crois. Je ne suis pas du style à idolâtrer ma musique. J’ai vu aujourd’hui un retour vers le rock. J’aime cette liberté, c’est un reflet de ma vie, avec des changements aussi, comme ma vie. C’est un hybride. Le meilleur moyen de les définir c’est la sincérité. Ce sont des albums qui se portent eux-mêmes. Pour ne pas être vulgaire,  ce sont des albums qui portent leurs noisettes. (Rires)

 

 

Tous vos textes sont en anglais sur cet album. Comment pourrait-on définir les textes de Lewis Evans 

Les textes sur le nouvel album sont faits en auto-écriture. Je suis britannique, je dirais que j’ai un cœur français, mais un esprit britannique. En fait, pour faire clair, je n’aime pas me forcer. Pendant des années, je me suis forcé pour certaines choses. Il fallait par exemple faire des chansons françaises pour passer à la radio. J’ai besoin de fraîcheur dans la création, je n’aime pas rebosser les projets après, ça dénature un peu l’idée. La radio c’est un peu ça le problème, ça formate. Je n’ai plus envie de ça. J’ai envie de me faire plaisir. Je pense qu’aujourd’hui les radios sont de moindre qualité par rapport à la musique actuelle.

 

On a l’impression de quelque chose de très mystique dans cet album, dans l’écriture,  dans cet ange qui tombe sur la couverture, pourquoi cela ?

Sur cet album, je voulais, au niveau du storytelling, quelque chose qui se rapproche d’histoires qui ne sont pas forcément à moi, quelque chose de plus abstrait. Cet album, on l’a fait dans une abbaye, avec vue sur la cathédrale de Coutances. Pendant la création de l’album,  deux choses bizarres se sont passées. La première,  j’étais dans la douche chez moi et des cœurs sont apparus, ils ont été comme absorbés par la VMC puis je les ai vus dans mon jardin. Je tiens à préciser que je ne prends pas de drogue. (rires). Je l’ai vu comme un signe, je dirais divin quasiment. On a enregistré une chanson qui s’appelle The Devil. Sur cette chanson on a entendu des voix sans savoir d’où elles venaient.  Je dirais que l’on trouve une âme dans cet album. L’album s’appelle L’Ascension parce que je me sens moralement et physiquement nouveau, meilleur.

C’est quoi pour vous un artiste ?

Je dirais que c’est quelqu’un qui crée à partir de rien. Tout le monde est un peu artiste comme ça.