Au Théâtre 14
Jusqu’au 13 février
du lundi au vendredi à 19H
Adaptation : Benoît Verhaert et Frédéric Topart
Mise en scène : Benoît Verhaert
Distribution :
Stéphane Pirard (Meursault), Lormelle Merdrignac et Benoît Verhaert
Aujourd’hui maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J’ai reçu un télégramme de l’asile : « Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. » Cela ne veut rien dire. C’était peut-être hier.
L’Étranger, selon Camus lui-même, est l’histoire d’un homme condamné à mort pour n’avoir pas pleuré à l’enterrement de sa mère.
On ne présente plus l’histoire de l’Étranger, l’histoire de Meursault, cet homme « insensible », étranger à sa propre vie, qu’une série d’évènements anodins va mener à la condamnation mort sans même avoir pu avoir voix à sa défense. La ligne du roman de Camus est ici soulignée avec force : Comment et pourquoi rendre des comptes à une société dans laquelle on ne se reconnait pas ?
L’adaptation que nous propose ici Benoît Verhaert, qui se veut le porte-parole de l’auteur, pourrait s’avérer risquée tant nous avons nos propres images en tête. Et pourtant, ces trois comédiens relèvent le défi avec succès en parvenant à faire résonner le texte dans une mise en scène sobre et efficace (en guise de décor, une table, des chaises et un banc, les effets de lumière suffisant à créer les lieux et les atmosphères). Contrastes et subtilité de la mise en scène donnent aux mots l’impact brutal de l’écriture de Camus. Le passage de ce texte coup-de-poing à la scène nous expose de façon frontale et directe les problématiques de ce roman teinté de questions philosophiques.
Espace vide, représentant tout à tour la plage, la chambre de Mersault, la cellule de prison, espace occupé par trois comédiens, Stéphane Pirard interprétant Meursault, Lormelle Merdrignac jouant Marie, sa fiancée et Benoît Verhaert qui incarnera tous les autres personnages masculins que croise Meursault( le directeur de l’asile, le patron, Salamano, le procureur, l’aumônier…). Pertinente idée que ce seul comédien pour tous ces rôles, renforçant ainsi l’opposition entre Meursault, l’Étranger, et le « reste de la société», d’autant que l’interprétation brillante de Benoit Verhaert permet à la fois cette similitude entre ces M. Toutlemonde et la distinction nécessaire à la compréhension par une véritable métamorphose d’acteur dans le parlé, les mouvements, et les déplacements.
Le seul personnage que Meursault va regarder dans les yeux et qui aura donc un autre visage pour lui, c’est l’Arabe qu’il tue. Mais nous spectateurs, nous ne le voyons pas, le regard du comédien prend en charge cette présence menaçante…
L’Etranger, un bon moment de théâtre et une invitation à la réflexion