Critique Les Enfants d’Hippocrate, tomes 1 et 2 : élémentaire, docteur !

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Les Enfants d’Hippocrate constitue la deuxième série publiée en France du talentueux Toshiya Higashimoto, auteur de l’excellent Bateau de Thésée (chez Véga). Vous êtes fan de Dr House ? L’humanité de Shaun Murphy dans The Good Doctor vous a donné des frissons ? Alors, ce manga est fait pour vous !

L’histoire

Le dévouement des professionnels de la santé est-il perçu à sa juste valeur ? Alors qu’à l’heure actuelle, la pratique médicale tend à épouser le modèle de rentabilité exigé par la société, certains praticiens voient leurs valeurs foulées aux pieds. Dans le même temps, des parents surprotecteurs exigent des résultats immédiats ou contestent les compétences du corps soignant…

Pourtant, tout cela est loin de décourager Maco Suzukake ! Ce jeune praticien en devenir se dévoue corps et âme à son métier. Avec lui, les petits patients du service de pédiatrie sont entre de bonnes mains ! Suivez son quotidien entre petits bobos et maladies graves, au chevet des enfants mais aussi de leurs parents !

Les Enfants d’Hippocrate : prêts pour un stage en immersion ?

Les Enfants d’Hippocrate se révèle prenant dès les premières pages. Toshiya Higashimoto nous montre une nouvelle fois sa maîtrise graphique, tant des décors que des personnages. Ces deux premiers tomes nous entraînent à la rencontre du jeune pédiatre Maco Suzukake, dont le style non conventionnel semble irriter ses collègues. Néanmoins, Maco est bien plus qu’un jeune homme un peu excentrique : c’est un médecin brillant. A la manière de Sherlock Holmes (version BBC), Higashimoto nous offre en incrustation le fil de ses pensées, jusqu’au diagnostic des maladies auxquelles ses patients sont confrontés.

A l’instar du culte Black Jack, d’Osamu Tezuka, ou encore Give my regards to Black Jack (Shuto Satô), la réalité du terrain ne nous est pas épargnée. De la bobologie quotidienne jusqu’à la cancérologie, le mangaka dévoile une clinique exigeante, parfois dure. C’est dans ces moments précis que la bonté et l’enthousiasme de Maco permet de faire redescendre la pression.

Les Enfants d’Hippocrate : portrait d’une époque

Là où Toshiya Higashimoto excelle également, c’est dans la psychologie de ses personnages. Au fur et à mesure des pages, leur complexité se dévoile et vient questionner le rapport intime de la parentalité. Ces deux premiers tomes sont ainsi l’occasion de découvrir quelques éléments du passé de Maco, et ses retrouvailles avec son père font resurgir de douloureux souvenirs.

Pareillement, lorsqu’un enfant tombe malade, c’est souvent l’occasion pour le couple parental de se rendre compte de ses difficultés, manquements ou attentes. Higashimoto nous rappelle que le symptôme est également un signe, qu’il est important d’écouter et de comprendre dans sa globalité.

Les Enfants d’Hippocrate vient délicatement souligner les pressions sociétales et sociales qui pèsent sur les parents, notamment les mères. Choisir entre maternité et travail, se tuer à la tâche au détriment des moments passés avec son enfant… Toshiya Higashimoto dresse le portrait d’une parentalité démunie face aux attentes mais aussi aux fantasmes diffusés autour d’une perfection idéalisée, donc inatteignable.

Les Enfants d’Hippocrate : récit d’une transmission

L’avenir se construit par les enfants et avec eux ; cela pourrait être le credo des Enfants d’Hippocrate. Enfants au sens biologique mais aussi philosophique du terme : ceux à qui l’on transmet. Le titre original du manga souligne ainsi cette dimension : Platanus no Mi, autrement dit « les fruits du platane », dont l’autre nom est l’arbre d’Hippocrate.

Le grand médecin de l’Antiquité grecque a en effet donné au monde un serment que prêtent tous les futurs médecins, et qui les engagent à respecter une éthique rigoureuse. Ethique que les méthodes de management d’aujourd’hui mettent à mal. Maco, quant à lui, perpétue cette volonté d’être au chevet des patients, en leur prêtant une écoute pleine et entière. En décalage avec les normes sociales, le jeune médecin pourrait pourtant bien imprégner ses collègues de son empathie ingénue.

Cela a d’autant plus d’impact lorsque l’on découvre le passé de Maco et surtout son lien à son père. Autrefois médecin froid et comptable obstiné, le drame traversé par la famille Suzukake l’aurait-il changé du tout au tout ? Les prochains tomes pourraient bien nous délivrer quelques réponses !

Les éditions Mangetsu continuent de nous offrir des titres de qualité et triés sur le volet. Après l’adaptation réussie de Frankenstein par Junji Ito, c’est au tour de l’univers médical d’être exploré. Toshiya Higashimoto confirme son talent inné de conteur d’histoire. Les Enfants d’Hippocrate s’inscrit déjà comme un classique, à mi-chemin entre le manga tranche-de-vie et le drame. Nous avons hâte de suivre l’évolution de Maco et de ses petits patients, dès le 17 août en librairie !