Critique de Mission Yozakura Family tome 1 : une série pleine de promesses

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Les espions ont la cote dans le monde du manga. Après l’excellent Spy Family (en cours de publication chez Kurokawa), le lectorat français peut découvrir Mission Yozakura Family chez Kana. Série de 7 volumes en cours de publication au Japon, c’est la seconde création d’un jeune mangaka Gondara Hitsuji. A la fois dessinateur et scénariste, c’est sa première série longue (la précédente comprenait 2 volumes) qui a conquis les lecteurs du shonen jump. Avec raison car le premier volume pose les bases d’une histoire décalée, très drôle, bourrée d’actions et d’émotion.

Mission Yozakura Family : une famille déjantée

Le héros de l’histoire s’appelle Taiyo, lycéen qui porte le deuil d’avoir perdu toute sa famille dans un accident de voiture. Depuis, il refuse de se lier d’amitié avec qui que soit afin de ne plus revivre le traumatisme de la perte. Une exception à cette règle, sa proximité avec Mutsumi Yozakura, son amie d’enfance. Cette relation fait enrager les autres garçons qui rêvent tous de sortir avec Mutsumi, mais qui sont soit éconduits soit victimes d’étranges accidents.

L’amitié entre les deux lycéens finit par attirer l’attention du sous-directeur du lycée qui se révèle être le grand frère de Mutsumi. Celui-ci décide d’éliminer Taiyo en qui il voit une menace pour la vie de sœur. Car celle-ci n’est pas une lycéenne comme les autres. Elle est à la tête de la 10ème génération d’espions de la famille Yozakura. Cheffe du clan, elle est une cible pour les autres groupes. Pour éviter un sort funeste, Taiyo décide d’épouser Mutsumi et ainsi d’intégrer la famille. Il doit maintenant veiller à sa protection tout en essayant de vivre une adolescence normale.

PlancheS 73926 Critique de Mission Yozakura Family tome 1 : une série pleine de promesses

Mr and Mrs Smith rencontre Full Metal Panic Fumoffu

Ce premier volume pose brillamment les bases d’une narration à deux niveaux. En effet à l’image du film Mr and Mrd Smith, nous sommes face à un récit d’action mâtiné d’humour, un polar d’espionnage jouant à fond la carte de la double identité. Cela fonctionne dès les premières pages au travers du personnage loufoque du grand frère. Et cela continue avec l’exploration d’une famille en or. Ses 5 membres en plus du grand frère ont des compétences différentes : force, expertise martiale, déguisement, infiltration. Et bien sûr leur maison est en adéquation avec leur métier. Elle est tout à la fois une réserve d’armes, un lieu rempli de pièges et un espace d’entraînement. Le lieu prend une saveur exquise sous les yeux de Taiyo le néophyte apprenant à vivre ou à survivre dans cet environnement dangereux. Les escaliers, les objets du quotidien sont autant de menaces et quant aux toilettes… Nous vous laissons la surprise.

Le récit fonctionne également par la collision entre l’univers des espions avec celui de l’école. Comme dans Full Metal Panic Fumoffu, les membres de la Yozakura doivent utiliser avec discrétion leur pouvoir ; expliquer de surprenants accidents ; savoir identifier qui est une menace, qui est un/une étudiante lambda. Grâce aux dialogues succulents, les très beaux dessins et le découpage des scènes, le manga offre des moments de pure comédie.

Mission Yozakura Family : des personnages décalés et travaillés

Ce n’est pas la moindre réussite de cette série que de construire des personnages à double facette. D’un côté vous avez affaire à des personnages hauts en couleur. Que ce-soit les membres de la famille (entre Nanao à l’improbable tête, Kengo au look kawaï) ou les espions/terroristes (le poseur de bombes poètes et addict aux réseaux sociaux..), ils ont tous une dimension excentrique. Et l’auteur joue la carte de l’ambiguïté : est-ce le vrai caractère ou une couverture. Le dessin et la narration donnent à cette anormalité toute sa force : gros plan grimaces, insert…

Mais à côté, ces personnages ont de vraies motivations que le manga distille habilement. Ce premier volume pose ainsi les motivations profondes du frère de Mutsumi tout en expliquant les origines de l’amitié entre celle-ci et Taiyo. L’auteur apporte une jolie touche de finesse à son récit et rend encore plus crédible les efforts des uns et des autres. Le deuil et la solitude jouent un rôle clé dans leur parcours de vie.

Mission Yozakura Family : un air de John Wick, un air de My hero Academia

La dernière qualité de ce premier volume réside dans l’univers suggéré et dans la construction de son héros principal. En effet, cet opus par certains côtés ressemble à la série John Wick. Il met en place, avec une touche plus humoristique, un monde underground, celui des espions/assassins. Celui-ci possède ses réseaux sociaux, ses revues permettant d’élire les espions les plus sexy, ses magazines spécialisés. Les espions se repèrent par des codes, des signes et interagissent avec le commun des mortels. Gondara Hitsuji prend beaucoup de plaisir à dessiner et écrire ce monde secret.

family

En ce qui concerne le héros principal, nous sommes dans la pure tradition du shonen dans le style My Hero Academia. Taiyo n’a pas de pouvoir particulier. C’est même l’inverse (voir la fin du manga et l’hilarant monologue de son beau frère). Pourtant, il va se dépasser, découvrir son potentiel et devenir digne de celle qu’il aime. C’est classique mais c’est efficacement inséré dans sa formation. Les épreuves que lui impose sa belle famille, les coups qu’il subit, nous le rendent éminemment sympathique.

Ce premier volume se révèle une très belle découverte. Rythmé, bien écrit, bien dessiné, c’est un shonen de très belle facture augurant d’une série de qualité.