Critique Ashidaka – The iron hero, tomes 1 et 2 : orage mécanique

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Ashidaka – The iron hero est la troisième œuvre de Ryo Sumiyoshi publiée en France, après Centaures (chez Glénat) et MADK (sous le nom de Ryo Suzuri, chez Taifu). Cette saga promet des combats épiques dans une atmosphère steampunk des plus saisissantes !

L’histoire

Il y a un millénaire, le Démon aux cent bras d’acier détruisit le monde. Pour le contrer, le Dieu qui possédait également cent bras descendit sur Terre et le combattit férocement durant sept jours. Après avoir terrassé son adversaire, il dispersa les cent bras du Démon sur la Terre. Ainsi naquit une humanité dotée d’une paire de bras d’acier. Ceux-là sont les descendants de Dieu. Mais les individus qui en possèdent plus d’une paire sont considérés comme la progéniture du Démon, tués ou abandonnés à la naissance.

Le jeune Ashidaka est l’un de ces multibras. Avec son compagnon Genji, il survit en chassant des droïdes dans une forêt de débris métalliques. Jusqu’au jour où surgit une gigantesque créature, un monstre colossal en acier et doté de cent paires de pattes… Face à cette image d’un lointain et terrifiant passé, Ashidaka parviendra-t-il à éviter la destruction de son monde ?

Ryo Sumiyoshi, grande prêtresse des opprimé(e)s

Ashidaka – The iron hero nous frappe d’emblée par son graphisme unique et maîtrisé. Ces deux premiers tomes sont l’occasion de retrouver le style inimitable de Ryo Sumiyoshi. La mangaka, par ailleurs très active sur Twitter ainsi que sur son site, régale ses lecteurs avec un chara-design puissant, faisant la part belle aux émotions.

A l’instar de ses précédents mangas, l’auteure reprend ici un thème qui lui est cher : dénoncer l’oppression de la différence et les conflits majeurs qui peuvent en découler. Que ce soit le génocide dont sont victimes les multibras, l’esclavage qui est fait des centaures, ou bien le rejet social d’un jeune garçon aux pulsions morbides, Ryo Sumiyoshi se fait le chantre de la différence et l’érige en valeur glorieuse.

Le personnage d’Ashidaka est en ce sens très intéressant. Abandonné à la naissance par sa mère, il aurait très bien pu, lui aussi, détester les « monopaires ». Pourtant, lors de l’attaque du mille-pattes géant, il prend la défense de ceux qui l’ont ostracisé et risque même sa vie pour eux. Ashidaka fait alors du rejet qu’il a vécu une force et le transforme en puissance de résilience. Ce sera un terrible point d’achoppement entre lui et les membres de l’armée visant la destruction des démons mécaniques. Si le positionnement du jeune garçon peut apparaître comme de la naïveté, il fait pourtant preuve d’une grande maturité et d’une ténacité à toute épreuve. Son refus de tout manichéisme et son humanité pourraient faire de lui un grand leader…

Une mythologie en acier trempé

L’autre force de Ryo Sumiyoshi, c’est la virtuosité avec laquelle elle plonge le lecteur dans un univers défini. Chacune de ses œuvres bénéficie d’une mythologie fouillée et dense. Et Ashidaka – The iron hero ne fait bien sûr pas exception. Outre le combat biblique entre un Dieu et un Démon, la mangaka explore la question de la descendance, en mettant en lumière, dans le second tome, la ressemblance entre Ashidaka et l’un de huit héros ayant affronté le Démon rouge, celui-là même qui a attaqué la ville dans le premier volume. Par ailleurs, il semblerait qu’Ashidaka dispose de capacités hors du commun… mais le mystère reste entier ! De plus, Genji non plus n’est pas en reste puisqu’il pourrait être le dernier représentant d’une grande lignée…

Les autres personnages ne sont pas oubliés. Qu’ils soient alliés ou ennemis, tous ont une présence solide et une psychologie travaillée. Le graphisme exceptionnel dont bénéficie Ashidaka – The iron hero permet de mettre en valeur leurs mimiques faciales tout comme leurs mouvements. Les combats sont dynamiques et fluides. Leur intensité et leur chorégraphie millimétrée font que nous avons parfois le souffle suspendu jusqu’à leur issue. Malgré tout, la multiplicité des détails et la mécanique complexe des multibras parfaitement retranscrite, rendent certaines planches un peu floues. Néanmoins, cela nous permet de revenir dessus et de les contempler longuement pour prendre toute la mesure du talent de dessinatrice de la mangaka !

En conclusion, Ashidaka – The iron hero tire son épingle du jeu par son identité graphique très marquée. Le talent de Ryo Sumiyoshi se déploie avec force dans ces deux tomes, au service d’une mythologie fouillée et de personnages forts et attachants. Le côté steampunk se retrouve dans l’esthétique des multibras des protagonistes,  rappelant ainsi l’excellent Levius (Haruhisa Nakata, éditions Kana) et ses combats intenses. Nous avons hâte de connaître la suite de cette saga de grande qualité !

Pour lire un extrait, c’est par ici ! Le tome 3 est prévu pour le 3 novembre 2021.