Portrait de Zack Snyder : Rétrospective de 300 à Sucker Punch

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A l’occasion de la sortie d’un des films les plus attendus de l’année, Justice League, faisons un petit point sur la carrière et l’oeuvre de Zack Snyder. Qui est-il donc ? Retour sur son oeuvre avant Man of Steel, qui a marqué un changement de style radical chez le réalisateur, qui continuera dans cette voie avec Batman V Superman

Zack Snyder est l’un des réalisateurs les plus talentueux parmi les cinéastes américains. Après un Batman V Superman : Dawn of Justice ayant déchiré le public et la critique, entre fans criant au chef-d’oeuvre et haters se moquant de certains points du film (la simple mention de Marta suffit à enflammer internet), Snyder nous revient avec le nouveau film DC ComicsJustice League. Il rassemble cette fois Batman, Flash, Aquaman, Cyborg, Wonder-Woman et, bien évidemment, Superman.

Mais dans le fond qui est Zack Snyder ? Snyder est l’un des réalisateurs ayant l‘une des relations amour-haine avec la critique et le public les plus fortes de son époque. Simple faiseur de blockbusters à la Michael Bay, revendiquant une esthétique numérique immonde ? Ou auteur de films, travaillant chacun de ses plans pour leur donner un aspect de tableau de maître, comme Ridley Scott ? Réalisateur de films machos et masculinistes (300, Watchmen) ? Réalisateur de films pour ados soi-disant philosophiques (Sucker Punch)  ? Ou juste réalisateur de films bourrins et pop-corn (L’armée des morts, Man of Steel, Batman V Superman…) ? Peut-être tout cela à la fois. Mais si Snyder était tout bonnement un grand réalisateur ?

Après avoir fait de nombreuses pubs, ayant été remarquées et récompensées (il obtiendra deux Clio Awards), Snyder se lance dans le cinéma avec L’Armée des morts, remake du légendaire Zombie de George Romero, qui reçoit un accueil critique et public favorable. Tout cela lui permet de se lancer dans sa première adaptation de comics (elles seront au nombre de 5, sur une filmographie de 8 films) : 300 d’après l’oeuvre de Frank Miller.

photo gerard butler 964410 Portrait de Zack Snyder : Rétrospective de 300 à Sucker Punch

300 est un mix entre le péplum et la fresque d’héroïc-fantasy, racontant l’affrontement de 300 spartiates, défendant leur île contre l’envahisseur Perse. Visuellement incroyable, voire révolutionnaire (on n’avait jamais vu un film pareil avant sa sortie en terme visuel), 300 est un film parfaitement critiquable sur le point de vue politique. Si 300 reste un film de divertissement puissant, distrayant et à couper le souffle (on se souviendra pendant très longtemps du fameux « This is Sparta !!! » source inépuisable de memes sur internet), c’est un film qui, au mieux, peut être vu comme une occasion de raconter un épisode historique et de faire n’importe quoi avec, en rajoutant une surenchère d’action. Au pire, 300 peut être vu comme un film de propagande raciste, produit et créé uniquement pour justifier les guerres d’Irak et d’Afghanistan. Un moyen de justifier la suprématie occidentale envers le reste du monde et tout spécialement le Moyen-Orient. Sans aller jusqu’à affirmer cela, on peut voir quelque chose de dérangeant chez 300 de par son manichéisme. Reste que c’est un film galvanisant, spectaculaire et redoutablement efficace. Il permet aussi au style Snyder de voir le jour : nombreux ralentis, actions brutales, violence, couleurs contrastées et plans extrêmement soignés dans le moindre détail grâce aux effets spéciaux. Style que Snyder va continuer d’élaborer avec son prochain film : Watchmen

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Si on ne devait retenir qu’un film de la carrière de Snyder, ce serait celui-là. Watchmen est sans aucun doute un chef-d’oeuvre, l’un des meilleurs films de super-héros de l’histoire (un cran en dessous de The Dark Knight) et le meilleur film de son auteur. C’est d’ailleurs la meilleure adaptation d’Alan Moore, l’un des plus grands auteurs de bande-dessinée de l’histoire. De quoi parle Watchmen ? Le film raconte l’enquête d’un super-héros masqué, violent et psychotique à propos du meurtre de l’un de ses « collègues » : le comédien. Alors que la guerre froide menace sérieusement de se réchauffer, cette enquête pourrait mener vers la fin du monde. Poétique, sombre, très violent, intelligent et non manichéen (contrairement à 300), Watchmen est un sommet super-héroïque. Tout d’abord, par ses personnages complexes, profonds, extrêmement bien écrits et ayant chacun leur identité propre. Chacun de ces héros est un être divin ayant des tourments profonds et personnels. La vie intime de ces personnages prend une part aussi importante que leur enquête et a une répercussion bien plus importante que prévue. Watchmen est un film qui a le mérite de traiter les héros comme ce qu’ils sont : des êtres extraordinaires, mais aussi comme étant des gardiens faillibles, oubliant leur tâche essentielle qui est de protéger l’humanité. Le seul problème est que toute l’intrigue est plus ou moins recopiée sur le comics. Si cela n’est pas un défaut en soi, cela est plus compliqué de juger les talents de narrateur de Snyder (malgré une modification du twist final, qui se retrouve être parfaitement choisi dans le film de par sa pertinence). Visuellement, Snyder affirme son style de nouveau en continuant à s’exercer. Il multiplie les ralentis, les couleurs contrastées et numériques… Une esthétique que l’on peut admirer ou critiquer, car pouvant ressembler à un comics animé. Pour finir sur Watchmen, il convient de citer la musique, reprenant certains des meilleurs morceaux de son époque, à commencer par l’utilisation de The time they are a changin de Bob Dylan, qui est sans aucun doute au cœur de la meilleure séquence jamais réalisée par Zack Snyder. 

Vient ensuite Sucker Punch. Le seul véritable film original de Snyder. Une aberration filmique. Sucker Punch est le film ultime de Snyder. Celui où ce dernier se permet absolument tout et n’importe quoi. L’intrigue est impossible à résumer à part que le film essaye de raconter comment une jeune fille emprisonnée de force dans un asile va essayer de s’échapper, à la fois littéralement, mais aussi en plongeant dans son imagination. Sucker Punch est un labyrinthe mental. Un piège dans lequel il est aisé de se perdreSucker Punch est une sorte de poème visuel, mélangeant les différents univers (Première Guerre mondiale, jeu vidéo, mangas…) et explorant les limites de l’imagination. Un film fascinant, autant dans sa splendeur que dans ses échecs, puisque Sucker Punch peut passer pour un film pour ado soi-disant philosophique, mais n’étant que de la bouillie philosophique à la destination des teenagers. 

Sucker Punch movie image Emily Browning Portrait de Zack Snyder : Rétrospective de 300 à Sucker Punch

 

Au final, Snyder est un réalisateur de films radicaux. Autant dans leurs réalisations, que dans leurs propos. Pratiquant un cinéma reposant en grande partie sur les effets spéciaux numériques, Snyder est sans aucun doute l’un des réalisateurs qui maîtrisent le mieux ce nouveau médium. Chaque aspect de ses films bénéficie d’une imagination et d’une créativité visuelle sans limite. C’est aussi l’un des rares réalisateurs contemporains à avoir un style identifiable dés la première seconde de film. Un réalisateur qui n’est  pas banal, ce qui fait de lui l’homme idéal pour réaliser un film comme Justice League, un projet compliqué à mettre en place. Reste à savoir si le pari est réussi. Réponse aujourd’hui-même…

 

Bande-annonce Justice League :