Critique « Bécassine ! » de Bruno Podalydès : une parenthèse bretonne enchantée

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Au cœur d’une polémique violente mettant en exergue le caractère stigmatisant et « clichéique » du personnage iconique breton, le Bécassine ! de Bruno Podalydès aura constitué un projet a priori destiné à la catastrophe.

En se plaçant à la ligne d’arrivée d’une pénible liste d’adaptations bédéesques ayant essuyé les échecs et en se focalisant sur une figure désuète et peu séduisante pour le grand public, on ne peut réellement affirmer que le film fut le plus attendu de l’année dans l’horizon français. La surprise est d’autant plus totale que la réussite est grande. Le talentueux réalisateur de Comme un avion parvient à un miracle en transformant un projet périlleux en un conte de fées à la naïveté attachante. Mieux encore, il se permet le luxe de l’inventivité et de la poésie onirique.

Bécassine mais pas bécasse 

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Partant d’une intrigue simple mais pas simpliste, le film narre les envies citadines d’une paysanne (Bécassine superbement incarnée par Emeline Bayart) rêvant de la capitale. Au moment du grand départ, elle devient, dans un concours de circonstances, la nourrice d’une attachante petite fille, Loulotte (Maya Compagnie). S’en suit alors la rencontre avec une galerie de personnages hauts en couleur portés par un casting luxueux. De la Marquise Grand-Air interprétée par Karin Viard à son conseiller et ami monsieur Proey-Minans en passant par le fantastique et touchant oncle Corentin joué par Michel Vuillermos sans oublier Josiane Balasko, Vimala Pons et Bruno Podalydès lui-même, force est de constater que le résultat est probant (Podalydès s’étant entouré d’une grande partie d’acteurs avec qui il collabore depuis un moment). Car contrairement au procès d’intention qu’on lui prête, Podalydès (et ses acteurs) ne surplombe jamais ses personnages ni la Bretagne. Au contraire, il corrige l’Histoire en leur octroyant une finesse et une intelligence que les auteurs de la bande dessinée leur avaient jusqu’ici refusées. Bécassine n’est donc pas le personnage idiot dont on se moque mais une jeune femme naïve et intelligente qui se donne les moyens de réussir. Avec sa caméra, le réalisateur balaye la Bretagne en lui restituant toute sa splendeur. 

Poésie du conte

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Mais au-delà d’un mythe sérieusement retravaillé et nuancé, Podalydès injecte la poésie qui a toujours irrigué sa filmographie. Véritable ode à la simplicité et à l’émerveillement, il se laisse aller à de véritables rêveries formelles. Ainsi, l’inventivité du personnage se recoupe dans celle d’une mise en scène ingénieuse et magique. Le personnage symbole étant celui de Rastaquoueros, personnage ambivalent et marionnettiste s’affichant comme un double de son réalisateur qui nous invite à continuer à transmettre les histoires racontées. 

Grande surprise de ce mois de juin, Bécassine ! est loin d’être la production honteuse que la rumeur dit. Elle est au contraire une belle fable sur l’enfance et sur la dichotomie entre la ville et la campagne. Loin de poser un monde archaïque, le film s’avère bien plus ambitieux sur sa forme et son fond. A voir seul(e) ou en famille, mais à voir pour enfin dire qu’on tient là la plus belle adaptation de bande dessinée de ces dernières années. Rafraîchissant !

Bande-annonce de Bécassine !