Critique « Davy Mourier vs Cuba » chez Delcourt : récit d’un voyage raté

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On continue le shampooing… Enfin, la lecture de la collection Shampooing chez Delcourt après Le guide du mauvais père et les Petits riens avec Davy Mourier vs Cuba sorti le 6 juin.

Un voyage de plus en plus compliqué

Depuis qu’elle a de graves problèmes de dos, la mère de Davy Mourier a décidé de parcourir le monde. Son mari refusant les voyages, c’est à chaque fois son fils qui l’accompagne. Pour ses 60 ans, elle décide de visiter Cuba avec sa nièce, son fils et un ami mais le voyage sera bien différent des espérances ou des craintes de chacun

Davy Mourier contre la révolution castriste

Mourier nous présente toujours avec humour à la fois un guide de voyage (ses méfiances sur La Havane, comment se faire avoir avec les arnaques à touristes et cela en différentes monnaies, comment trouver de l’essence après une tornade ?) mais aussi le carnet quotidien de voyage compliqué. Il joue à notre grand plaisir le candide qui découvre un pays : le logo Apple présent partout par dégoût du communisme, la difficulté d’avoir internet ou de manger sans attraper la tourista. Les problèmes de la vie quotidienne avec l’embargo le surprennent. Le groupe expose ses craintes de partir dans une dictature. Fiers, ils choisissent de loger chez l’habitant pour un tourisme éthique. Cependant, ils se sentent voyeurs car tout est fait par l’État pour récolter son argent et cacher la réalité. La réalité de la dictature est exposée : ils apprennent par internet et par un étranger qu’un ouragan terrible arrive mais personne ne leur avait rien dit.

Au milieu du livre, tout bascule avec la venue d’Irma, le plus puissant ouragan depuis 1980 mais le plus drôle est que ces Français n’ont rien vu car ils sont restés cloîtrés dans une ancienne hacienda bien protégée. Cependant, ils doivent rester une semaine de plus. Il n’y a pas de vol car l’ouragan a coupé l’électricité à l’aéroport. La BD montre bien le stress de ne pas être sûr de partir. Mourier hésite mais profite de sa notoriété en ligne pour rentrer plus vite.

Le plus pénible de tous ?

L’auteur présente une réalité sans fard sur sa famille : son père névrosé et sa mère parfois perdue, mais toujours avec humour et tendresse. Surtout, il se moque plus de lui que sa famille. Il apparaît parfois comme un fils à maman qui a peur de voyager car sa famille n’a pas quitté l’Ardèche. C’est le râleur et le pessimiste de la bande qui admet la beauté de quelques lieux uniquement en comparant la vallée de Viñales à Grenoble. Il n’arrive ensuite pas à apprécier la beauté par peur de l’ouragan et est incapable de se déconnecter du travail. Tout à la fin du séjour, il faut qu’il passe à Trinidad pour être émerveillé.

Ses compagnons de voyage paraissent bien plus ouverts que lui (sa nièce et son meilleur pote Rémy). Le lecteur se demande souvent quelle est la part de biographie et quelle est la part d’invention comme souvent dans les récits d’autofiction.

Une édition originale

Dur, dur le voyage...

Tout est en noir et blanc et Mourier inclut ses photos. Le dessin est très personnel. Les visages très simplifiés sont transformés par un trait stylisé moderne et un encrage très épais qui peut faire penser au graffiti. Loin d’être froid, le dessin de Mourier rend les visages très expressifs en déformant les yeux ou la bouche. Le paysage est également simple mais par des détails (les colonnes, les palmiers, les stations essence), l’imagination du lecteur reconstitue très bien le paysage cubain. Il n’y a pas de cases mais des scènes sans bord avec un texte autour. Bien écrit, cela rend les images encore plus drôles et émouvantes.

Ce livre tient dans la poche et pourrait facilement se glisser dans une valise cet été. Delcourt innove aussi avec ce livre en réalité augmentée. On peut obtenir des bonus en téléchargeant une application. Cette BD est aussi hyper connectée avec un lien YouTube sur le tournage de la série.