Pour vous souvenir de l’été, vous prendriez bien une glace ? Un conseil, ne choisissez pas le van d’Ice Cream Man qui revient dans un deuxième tome chez Huginn & Muninn.
Ice Cream, un vent de fraîcheur dans l’horreur
Le deuxième volume d’Ice Cream Man s’inscrit dans la continuité de la série. On y retrouve l’organisation en chapitre avec, à chaque épisode, une nouvelle horrifique le plus souvent aussi inquiétante que réussie. Le cadre est le même. Dans la ville de St. Generous, le glacier avec sa camionnette colorée ne distribue pas seulement des sucreries mais également diffuse la folie et l’horreur. On garde la même équipe créative avec le plaisir de retrouver le dessinateur Martín Morazzo et la coloriste Chris O’Halloran.
La précision du dessinateur contraste avec un décor fait de grands aplats de couleur. Dans le premier épisode, Martín Morazzo joue sur la perspective avec un sentiment de vertige et le cercle concentrique de la folie. Chaque case est importante pour réussir à raconter un récit en quelques pages. C’est particulièrement le cas dans le deuxième épisode en grande partie sans dialogues. On comprend la répartition entre le scénario de W. Maxwell Prince et les dessins Martín Morazzo par les extraits du scénario en bonus. Maxwell Prince commente également les études des personnages

Si chaque chapitre décrit les maux de l’humanité, les nouveaux épisodes d’Ice Cream Man abordent des thèmes différents. Plusieurs épisodes parlent du deuil et on voit un rapport à la religion : un suicidaire fait sa confession avant de mourir. Dès la première page, un cadre en costume cravate se jette d’un immeuble. Cette image sinistre est désamorcée dès le début par un décalage vers l’étrange. Il commente sa chute et ce qu’il voit à travers les fenêtres. La page suivante bascule dans l’horreur. Dans une salle de réunion, un vautour dévore les yeux de dirigeants mais une femme veut rester pour préserver sa prime. Une autre ne bosse que pour financer un projet artistique. L’amour au bureau tourne au crime.
Un nouveau volume glacé et acide
A travers le genre horrifique, W. Maxwell Prince dénonce la mise en esclavage et l’aliénation des employés. Le monde hyper artificiel et aseptisé des open spaces est envahi par des animaux rejetés (un vautour, des rats et des cloporte) et correspondant à des insultes. La vision de l’humanité transmise par le scénariste W. Maxwell Prince est souvent pessimiste. Dans le deuxième épisode d’Ice Cream Man, sur les trois futurs possibles, deux sont des désastres et le dernier est de vivre seul dans la forêt avec un chien, on a connu plus favorable. L’humanité est souvent néfaste. Les gens ne s’écoutent pas et l’égoïsme domine. Dans ce tome, c’est la revanche des parents car ce sont ici les enfants qui souffrent.
Ice Cream Man est une anthologie d’horreur où chaque épisode forme un récit complet donnant une forme très littéraire. L’horreur est un magnifique prétexte du genre pour jouer sur la narration et, à chaque fois, le scénariste W. Maxwell Prince va plus loin. Le premier épisode suit en parallèle une chute verticale et des événement horizontaux dans des bureaux que le corps du suicidé traverse à la fenêtre. On voit également une séparation entre le monologue intérieur d’un homme sur ce qu’il pense et la frayeur d’une femme sur ce qu’elle voit. Le deuxième épisode joue sur la couleur. Un jeune homme a pris trois boules de glace ce qui donnent trois couleurs de récits sur trois futurs différents. On peut régulièrement trouver ce jeu sur les lignes narratives, W. Maxwell Prince aimant multiplier les récits. le troisième épisode suit les aventures d’une jeune fille avec un fantôme et ses dessins d’enfant. Cette nouvelle est d’ailleurs un hommage à la littérature, consolatrice des peines.
En revanche, Ice Cream Man suit également un fil narratif continu sur l’ensemble de la série. Ce lien passe par deux personnages désormais. En effet, le démoniaque glacier tout de blanc vêtu n’apparaît plus à chaque épisode. C’est parfois sa némésis, un cow-boy tout en noir. Dans le livre précédent, le lecteur apprenait uniquement qu’il voulait lutter contre lui. On découvre dans ce deuxième tome qu’il entend la pensée du fantôme du suicidé. Il vient sauver une femme mais sans rien dire ou attendre une récompense. On découvre leurs prénoms. Le cow-boy se nomme Caleb et le glacier se métamorphosant en monstre, a pour nom Riccardus.
Cette suite d’Ice Cream Man ne dépasse toujours par la date de consommation. En effet, les nouveaux récits sont toujours aussi inquiétants en proposant également des pistes narratives malines et un dessin très efficace. Cela ne peut vouloir dire qu’une chose : une troisième saveur dans la suite ne peut être que savoureuse
Retrouvez sur le site la chronique du premier tome et Silver Coin, une autre série d’horreur chez Huginn et Muninn