Le danger a un nom, Docteur Radar

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Le Docteur Radar est le génie du mal de l’entre-deux-guerres et il décide dans Mort à Venise de partir dans l’espace alors que le fascisme menace d’ébranler l’Italie. Après deux volumes salués par la critique, découvrez la suite de ses aventures chez Glénat.

Le retour du docteur

Les agents du Docteur Radar

Dans l’Europe bouleversée par les soubresauts de la Première Guerre mondiale, le Docteur Radar a un projet diabolique. La Terre ne lui suffit plus et il veut donc partir sur la lune pour bombarder plusieurs villes. Cependant, pour atteindre cet astre, il a besoin de la formule d’un carburant surpuissant. Il pense l’avoir trouvé mais un de ses agents a été dupé par un scientifique. Dans les premières pages, Radar vient menacer ce menteur mais le savant a donné la formule à l’ennemi de Radar, le journaliste parisien Ferdinand Straub. Pour l’obtenir, quoi de mieux que de prendre en otage toute la cité de Venise ? Pour contrecarrer ce projet, un petit groupe se dresse autour de l’intrépide Ferdinand Straub et de son ami, le dandy Pascin. Mort à Venise devient alors une trépidante lutte à mort entre Rome, Paris et la cité des Doges. Chacun a recours à la modernité de l’époque. Les voitures filent sur les routes tandis qu’un biplan bombarde Venise.

Un fascisme de gare

Le scénario de Noël Simsolo conjugue habilement l’action débridée du roman de gare et le réalisme d’un livre d’histoire. Cette folie créative se marque par le Docteur Radar qui semble venu d’un roman feuilleton de l’époque. Voulant rien de moins qu’être maître du monde, il est la Nemesis parfaite face à Straub. Aussi malin et surexcité que Rouletabille, le journaliste pousse l’action. Débutée en 2014, cette série a la vitesse d’un roman d’Arsène Lupin mais dans une version sombre. Docteur Radar est un méchant nihiliste qui déteste tout le monde, autant les fascistes que les démocrates. C’est par ses actions que l’on découvre la situation très confuse de l’Italie en 1920 qui est bousculée par les interventions de ses nationalistes à Fiume et la montée du futur dictateur Mussolini. Le contexte est aussi littéraire par les références à Gabriele d’Annunzio.

La Seconde guerre mondiale est une sourde menace qui affleure parfois dans les dialogues mais la noirceur se retrouve surtout dans l’image. Tout le début se passe de nuit. Loin de la cité actuelle harcelée par les vagues de touriste, Venise est désertée. Semblant sortir d’un film expressionniste allemand de cette époque, le lecteur ne peut qu’admirer le dessin de Docteur Radar. Ne visant pas le réalisme, Frédéric Bézian installe une ambiance crépusculaire en jouant sur le noir. Derrière une mise en page fixe autour d’un gaufrier de neuf pages, Frédéric Bézian fait un impressionnant travail sur la couleur car chaque case est plongée dans un camaïeu où la seule trace de blanc est la peau blafarde des personnages. On a cependant parfois du mal à repérer les visages.

L'ombre du Docteur Radar

Mort à Venise sait passer cette période angoissante par l’humour. Alors qu’il est prêt à tuer, Radar se fait surprendre par un caniche blanc. Puis, une femme se dit qu’apprendre à tirer peut être utile. Un duo d’agents de Radar échange des paroles amusantes car, sans leur quota quotidien de meurtres, ils se morfondent. Dans l’autre camp, Pascin est aussi très amusant. Ce dessinateur finance sa vie de plaisirs en vendant des dessins S.M.

Arrivé à son troisième tome, Docteur Radar continue à produire une forte impression sur le lecteur en renouvelant la bd historique. Le lecteur profite à la fois d’une histoire bien supérieure au dernier Lupin et d’une description sur la montée du fascisme bien moins barbante que le dernier show de Bern. Débranchez donc la télé pour profiter de cette magnifique série. Il est cependant important de commencer par le premier tome pour profiter pleinement de cette série.

Si vous cherchez des bd historiques enfin dépoussiérées, nous vous conseillons de lire les chroniques sur These Savage Shores et Colt & Pepper.