La jeunesse tourne mal dans Tomorrow

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Dans l’existence, il existe des coïncidences troublantes comme dans Tomorrow lorsque le scénariste Peter Milligan imagine un virus détruisant toute la civilisation quelques mois avant la covid. Trouvera-t-on un vaccin avant la fin de l’humanité ?

Ctrl + covid

Le choc de départ de Tomorrow

Comme dans le titre précédent de Milligan, Tomorrow débute par coup au ventre : Oscar Fuentes, un joueur virtuose de violoncelle trouve sa mère morte puis, en sortant de l’immeuble, plusieurs autres cadavres jonchent le sol. Pourtant, il ne verse aucune larme mais reste figé et ses pensées sont bloquées sur une partition qu’il a du mal à jouer. Le lecteur est totalement perturbé avant de réaliser qu’Oscar est neuro-atypique. Peu après, il part à pied rejoindre de sa sœur jumelle, Cira, pourtant située à l’autre bout des États-Unis.

Tomorrow révèle la cause de cette hécatombe. Un virus informatique est passé des composants au corps humain et provoque un désastre à travers le monde. Cependant, les adultes sont plus touchés que les enfants, habitués aux jeux et à internet. Les mineurs deviennent alors brusquement les chefs. Dans ce monde en transition, ils s’émancipent des codes imposés par la société des adultes et de la morale. Des gangs d’adolescents créent de sanglants rites de passage. Pour le meilleur et le plus souvent le pire, ils deviennent des adultes sans repère.

1+1 = ?

Un génie de la musique dans Tomorrow

Les premiers chapitres de Tomorrow alternent l’intime et le mondial. Le lecteur suit, à travers plusieurs personnages, différentes réactions à la pandémie et découvre par eux comment le monde s’effondre. Treacy est le premier à découvrir les causes de l’hécatombe car cet afro-américain est responsable en cyber sécurité. Il quitte la réunion de crise pour prévenir sa famille. A l’inverse, des collègues d’entreprise en team building au milieu du désert ne sont au courant de rien mais réalisent que quelque chose ne va pas quand on leur tire dessus. Cette mosaïque de personnages est un peu esquissée en si peu de pages. On peut également regretter que le dessinateur Jesús Hervás ne soit pas au niveau de ce scénario très ample. Certes, la lecture est aisée mais le style manque d’originalité.

Le scénario s’intéresse surtout à la jeunesse. Une équipe de foot d’une école privée sort indemne d’un accident de bus. Leur très riche capitaine devient le leader et espère encore faire venir des jets privés pour les récupérer mais son esprit se fissure peu à peu. Oscar et Cira sont les plus réussis. Ils illustrent l’opposition entre la civilisation et la sauvagerie. Ce récit complet édité par Delcourt évite les poncifs sur la jeunesse. Non, les enfants ne sont naturellement pas doux. Loin d’être meilleur, un monde dirigé par eux se révèle dès le départ un cauchemar très violent. Cette vision désabusée de la jeunesse dans un récit d’action évoque la série française Seuls et Sa majesté des mouches est cité. Écrit par Peter Milligan avant l’épidémie, Tomorrow est publié pendant et cela se sent par la tonalité très sombre qui s’installe au fil des pages.

Tomorrow est un récit choral et apocalyptique qui démontre qu’il suffit d’un clavier pour que le monde des adultes s’effondre aussi facilement qu’un château de carte. Hélas, les adolescents ne sont pas plus sensés que leurs ainés…

Si vous avez apprécié ce texte, vous pouvez trouver deux autres chroniques du même scénariste American Ronin et Britannia.