Civilisations précolombiennes et peintures des lointains au musée du Quai Branly

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Inauguré en 2006 par Jacques Chirac, passionné par les arts premiers, le musée du quai Branly est devenu après dix ans d’existence le sanctuaire des arts des civilisations d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques du Néolithique au XXème siècle.

A l’occasion de son dixième anniversaire l’institution devient officiellement le musée Quai Branly – Jacques Chirac en hommage à l’ancien président qui fut son principal bienfaiteur. De nos jours le musée regroupe pas moins de 370 000 œuvres originaires d’Afrique, du Proche-Orient, d’Asie, d’Océanie et des Amériques. Aux cotés de cette impressionnante collection permanente les nombreuses expositions temporaires permettent de découvrir des œuvres inédites rarement vues en France.

Actuellement le Quai Branly présente deux expositions évoquant chacune à leur manière les légendes et les mystères des pays de l’Ailleurs et de l’Autrefois. Jusqu’au 1er avril la mezzanine Ouest du musée met à l’honneur les civilisations andines pré-Incas. Depuis peu, la mezzanine ouest accueille une exposition sur les peintures du lointain jusqu’en janvier 2019. Le titre de l’exposition se comprend tout à la fois comme le symbole de l’attirance de nombreux occidentaux pour les civilisations lointaines, et comme un inventaire mélancolique des siècles de fascination et d’influence. 

 

Le Pérou avant les Incas

Le mythe de l’Eldorado et ses cités cachées au milieu de la non moins mythique Cordillère des Andes continue de faire rêver l’Occident. En revanche l’histoire de cette contrée mystérieuse avant la période inca reste quasiment inconnue malgré l’existence de nombreuses sociétés qui constituèrent la matrice de la civilisation inca.

L’avènement de l’empire inca (XVe-XVIe siècle), le plus vaste de toute l’Amérique précolombienne, a éclipsé les anciennes civilisations du Pérou. L’ambition de l’exposition présentée au musée du Quai Branly – Jacques Chirac est justement de révéler leur importance. Cupisnique, Mochica, Chimú, Lambayeque, ces noms aujourd’hui tombés dans l’oubli façonnèrent pourtant l’histoire du Nord du Pérou en donnant naissance aux premières sociétés étatiques de la région. Bien avant l’empire inca, il y a plus de 1500 ans, les sociétés pré-hispaniques étaient déjà structurées autour de deux sources de pouvoir. Le premier est le pouvoir religieux avec ses prêtres ou prêtresses et le panthéon incarné par les dieux célestes. Le pouvoir terrestre était incarné par l’élite : des seigneurs, des guerriers et au dessus le roi d’essence divine.

Portant le nom évocateur «Le Pérou avant les Incas » l’exposition explore les différentes manifestations et représentations du pouvoir dans les sociétés andines dont les plus anciennes existèrent deux mille ans avant notre ère. La mezzanine Est accueille 300 pièces appartenant au trésor du patrimoine culturel péruvien mis au jour par les archéologues : de remarquables céramiques, ornements ouvragés en or, cuivre et argent issus des plus grands sites archéologiques de la côte nord du Pérou. Au travers des œuvres présentées au public l’exposition explore les différentes manifestations et représentations du pouvoir dans les sociétés andines, avant le début de l’Empire Inca: le pouvoir céleste et le pouvoir terrestre, les Dieux et les Rois, les temples et les palais.

 

photo 1 Civilisations précolombiennes et peintures des lointains au musée du Quai BranlyTimbale, Moche III, 300-400, céramique, 18 x 14,3 x 16 cm ©Trujillo, Huaca de la Luna, Museo Huacas del Valle de Moche. ©Ministère de la Culture du Pérou

Cet portrait d’un homme fut trouvé dans une tombe du site de Huaca de la Luna sur la côte nord du Pérou. L’archéologue Santiago Uceda Castillo, le commissaire de l’exposition décédé le 14 janvier 2018, y diriga des fouilles pendant vingt-six ans. Pour lui, « le façonnage de la céramique des Moche atteint une perfection comparable à celui des statues grecques ».

 

Photo 2 Civilisations précolombiennes et peintures des lointains au musée du Quai BranlyBouteille zoomorphe, Moche III, 300-450, céramique, 25 x 13,2 x 17,3 cm ©Paris, musée du quai Branly-Jacques Chirac ©Ministère de la Culture du Pérou.

Les félins étaient divinisés chez les Moche, associés à la chasse et au sacrifice humain. Par ailleurs, l’anse de ce type de bouteille « représente peut-être une rivière et des canaux d’irrigation », explique Santiago Uceda Castillo.

Du 14 novembre 2017 au 1er avril 2018

 

Peintures des lointains

Longtemps reléguée dans les réserves du musée, la collection « Peintures des lointains » enfin exposée rassemble près de deux cent œuvres inédites datées de la fin du XVIIIe siècle jusqu’au milieu du XXe siècle. Tout commence avec la construction du musée des Colonies de la Porte Dorée en 1931 à l’occasion de l’Exposition coloniale internationale. Le musée du Quai Branly hérita ensuite en 2006 de la plupart des collections du musée des Colonies dont les « Peintures des lointains », parmi lesquels figurent des œuvres de Paul Gauguin ou Henri Matisse.

L’exposition révèle, à travers l’époque coloniale, les sources d’inspiration des artistes en Afrique, en Indochine, au Proche-Orient, mais aussi aux Amériques et dans le Pacifique. Les peuples vivant dans ces contrées lointaines tiennent ici le rôle de muse pour de nombreux peintres européens. L’exposition prend la forme d’une longue fresque dépeignant l’évolution de la perception de l’autre dans la peinture occidentale. La vision romantique et exotique du début du XIXème siècle cède le pas au XXème siècle à une approche plus savante à la manière des premiers ethnologues.

 

La première partie, « Séduction des lointains », est consacrée à l’attirance de nombreux occidentaux pour l’exotisme, et comme celui, ironique, de la perte de repères que ce tropisme provoque.


191367 Civilisations précolombiennes et peintures des lointains au musée du Quai Branly
Mosquée dans la basse Egypte, Prosper Marilhat, vers 1834-1840, huile sur toile, 116,3 x 186 cm © musée du quai Branly – Jacques Chirac, photo Claude Germain

 

Le second temps de l’exposition est une vaste galerie de portraits des différentes régions du monde


Peinture lointain 2 Civilisations précolombiennes et peintures des lointains au musée du Quai Branly
Duco Sangharé – Peuhl, Fernand Lantoine (1876-1956), années 1920 – 1930, Huile sur toile, 86.8 x 62 x 2.1, 2005g

 

La dernière partie s’intitule « Appropriations des lointains » donne à réfléchir sur la perception des artistes et sur le contexte de production des œuvres d’art coloniales.

lmop Civilisations précolombiennes et peintures des lointains au musée du Quai BranlyPrincipales productions d’origine végétale, Georges Michel, dit Géo Michel, vers 1930 , huile sur toile, 308 x 276 cm © musée du quai Branly – Jacques Chirac, photo Claude Germain

Du 30 janvier 2018 au 6 janvier 2019

 

« Une société porte son art comme l’arbre ses fleurs, en raison de leur enracinement dans un monde que ni l’un ni l’autre ne prétend faire totalement sien. » 

Claude Lévi-Strauss, Anthropologie structurale

 

Musée du quai Branly – Jacques Chirac, 37 quai Branly, 75007 Paris 

Ligne C Arrêt : Pont de l’Alma / Ligne 6 Arrêt : Bir-Hakeim

Du 1er janvier au 1er avril 2018 : jeudi vendredi samedi fêtes de 11h à 21h, mardi mercredi dimanche fêtes de 11h à 19h.