[Critique] Black Mirror, saison 4 : le cauchemar technologique est de retour

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Rendez-vous incontournable des binge-watchers et autres sériephiles, la série Black Mirror fait sensation depuis quelques années et sa quatrième saison est sortie le 29 décembre dernier sur Netflix. Toujours entre les mains de son créateur et unique scénariste Charlie Brooker, la série dépeint les multiples possibilités que nous offrent les technologies dans des futurs plus ou moins proches, le plus souvent pour en dénoncer les possibles mauvaises tournures qu’elles pourraient prendre. Cette saison ne fait pas exception à la règle : entre un Tinder sur-sophistiqué, un jeu de réalité virtuelle un peu trop perfectionné et des mini-Terminators, découvrez notre critique épisode par épisode de la saison 4 de Black Mirror !

 

U.S.S. Callister (S4E1)

Robert Daly est le créateur d’un jeu de réalité virtuelle à succès appelé Infinity. Il crée, pour son usage personnel, sa propre version du jeu où, chez lui le soir, il prend le commandement d’un vaisseau et d’un équipage constitué de ses collègues de travail dans la vraie vie. Toutefois, ce micro-univers n’est pas aussi beau qu’il n’y paraît…

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Le concept de ce premier épisode est excellent : l’idée même de donner une conscience à des clones numériques dans une prison qu’une sorte de tyran a construit pour les contrôler, on adhère totalement. L’intrigue soulève des sujets plutôt intéressants tels que la violence virtuelle ou encore l’utilisation abusive de technologie mais pointe également vers une dénonciation des codes outrepassés de la SF et même vers une analyse comportementale au sein d’une entreprise. En offrant des codes visuels plus vintage, cet épisode se démarque en sortant des normes instaurées par Black Mirror.

Toutefois, U.S.S. Callister est l’épisode le plus long de cette saison (74 minutes) et malheureusement, cela se ressent. Le rythme n’est pas toujours bon et on entre bien trop tard dans le vif du sujet. Malgré un casting formidable, les personnages sont trop peu développés, à l’exception de Robert Daly et Nanette Cole, antagoniste et protagoniste de l’épisode.

Verdict : 7/10

 

Arkangel (S4E2)

Une mère angoissée par le bien-être de sa petite fille décide d’utiliser la technologie Arkangel : grâce à un implant, elle peut surveiller ses déplacements, voir à travers ses yeux et même censurer certaines violences pour la protéger. Alors que sa fille grandit, cette technologie commence à prendre une place de plus en plus dérangeante.

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L’épisode Arkangel était très certainement le plus attendu de tous car réalisé par nulle autre que Jodie Foster. L’idée même de cet implant plaçait l’épisode sur une très bonne lancée : technologie à la fois rassurante et terrifiante, elle offre à débattre sur de nombreux fronts, comme la censure parentale ou le rapport des enfants à la violence. Le jeu de Rosemarie DeWitt dans le rôle de la mère était en somme convaincant et puissant, juste milieu entre l’amour maternel et la détresse extrême.

Malgré tout, Arkangel est plutôt une déception. Le déroulement de l’intrigue ne nous a pas entièrement satisfait : plutôt facile à anticiper et trop peu approfondi par endroits, le scénario donnait au final l’illusion de n’être rien d’autre qu’un grand panneau « Stop » à l’intention des parents surprotecteurs. On aurait aimé un travail plus poussé du rapport qu’entretient cette jeune fille à la violence, qui aurait pu être tellement plus intéressant à développer et beaucoup moins survolé. Le dernier bémol est bien moindre mais nous tenions à souligner qu’il était très dérangeant de voir une jeune actrice de 21 ans endosser le rôle d’une adolescente de 15 ans : niveau crédibilité, on a vu mieux…

Verdict : 3,5/10

 

Crocodile (S4E3)

Une jeune femme et son petit ami gardent sous silence un accident causé dans leur jeunesse qui a entraîné la mort d’un homme. Plusieurs années après, les événements remontent à la surface et sèment le chaos dans la vie de la jeune femme, Mia. En parallèle, une enquêtrice d’assurance mène une enquête pour reconstituer le déroulement d’un accident à l’aide d’une machine permettant d’extraire les souvenirs.

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S’inscrivant dans le registre d’un bon thriller, Crocodile est, par plusieurs aspects, l’épisode le plus décevant de cette saison. Il faut bien avouer que le décor est captivant (les paysages de l’Islande ne cesseront jamais de nous fasciner) et le travail sur l’ambiance très approfondi, mais malgré tout, même la performance d’actrice impeccable d’Andrea Riseborough ne permet pas à l’épisode de remonter la pente glissante dans laquelle il s’engage.

S’il fallait déterminer un épisode complètement en dehors de cette saison, il s’agirait bien de Crocodile. Son problème majeur est le manque cruel de technologie auquel la série nous a habitué : la machine à extraire les souvenirs, qui est pourtant une idée à la hauteur de nos attentes, est bien trop absente et exploitée d’une telle manière que le dénouement de l’intrigue en devient prévisible. S’ajoute à cette lacune une effroyable cruauté gratuite envers les personnages, un aspect qui avait déjà été critiqué dans certains épisodes de Black Mirror.

Verdict : 3/10

 

Hang the DJ (S4E4)

Une application de rencontre très spécifique a été mis en place pour permettre aux individus de trouver leur âme sœur. Pour arriver à cela, ils doivent passer par une série de relations dont ils ne choisissent rien : le système détermine pour eux le partenaire, la date de commencement de la relation ainsi que sa date d’expiration.

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Hang the DJ est ce qu’on pourrait appeler le San Junipero (S3E4) de la saison et est à nos yeux le meilleur épisode des six révélés le 29 décembre dernier. Sur fond de comédie romantique, l’épisode dépeint une évidente critique de Tinder, Meetic et leurs comparses sur lesquelles sont inscrits grand nombre de célibataires en quête de l’âme sœur. Parlant de la recherche de l’amour et de la peur de la solitude, Charlie Brooker met également en avant notre dépendance à la technologie : c’est elle-même qui guide notre vie, jusqu’à nous assister pour forger nos relations amoureuses et, en conséquence, notre vie.

Le casting principal de Hang the DJ n’est pas innocent dans le charme de l’épisode : Georgina Campbell et Joe Cole sont plus qu’attachants et ont d’ailleurs l’heureuse chance d’incarner deux des quelques personnages ayant droit à une sorte de happy ending dans la série. Loin de nous avoir déçu, le twist final a su nous surprendre malgré les multiples indices laissés tout au long de l’épisode pour aider le spectateur à anticiper le dénouement potentiel de l’intrigue.

Verdict : 9/10

 

Metalhead (S4E5)

Dans un futur post-apocalyptique, une femme cherche à échapper à un robot-tueur à travers le paysage écossais après qu’elle ait essayé de voler le contenu d’un carton dans un entrepôt.

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Quand le meilleur ami de l’homme devient son ennemi, tout bascule. L’allure canine du robot-tueur qui poursuit le personnage de Bella intervient ici comme messager d’une morale qui nous colle depuis les premières avancées technologiques : il n’est pas impossible que ce que nous tenons pour acquis (et donc nos propres créations) se retournent un jour contre nous et nous rendent plus que vulnérables.

Metalhead est l’unique épisode de cette saison qui nous est offert sans mise en place d’un contexte : on ignore tout de ces chiens-Terminator et on cherche tout le long à comprendre quelle apocalypse a bien pu frapper l’humanité. L’esthétique de l’épisode est absolument prenante, notamment grâce à l’utilisation judicieuse et maîtrisée du noir et blanc, permettant presque d’embellir l’impressionnante violence au sein de cette traque sans fin.

Verdict : 6/10

 

Black Museum (S4E6)

Une jeune fille visite un musée du crime en attendant que sa voiture se recharge dans une station-service en plein milieu du désert. Le maître des lieux lui raconte alors les histoires fascinantes derrière trois des éléments exposés à l’intérieur du musée.

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C’est dans une ambiance aride que prend place l’épisode final de cette quatrième saison de Black Mirror, qui s’avère être une sacrée réussite. Le personnage de l’hôte, incarné par le sensationnel Douglas Hodge, nous guide tout au long de l’épisode à travers des crimes marqués par son passage et tous liés à son ancien travail sur les technologies neuro-cérébrales. Creepy à souhait, Black Museum est un épisode truffé de références à d’autres épisodes de la série, tel que le scanner d’ADN de U.S.S. Callister (S4E1) ou encore les abeilles de Haine Virtuelle (S3E6) : un moyen de faire comprendre qu’au final, les univers des différents épisodes ne sont pas si indépendants les uns des autres !

Toutefois, le public commence à connaître le fonctionnement de la série et c’est bien à cause de ces habitudes que l’épisode peut trouver des défauts. En effet, quoi de plus Black Mirror-esque qu’un twist final abracadabrant qui chamboule tout sur son passage ? La fin peut d’ailleurs être presque anticipée et c’est bien dommage car cela fait perdre un peu de sa grandeur à cet épisode foncièrement bon. Enfin, (attention spoilers) on pourrait voir la scène finale de l’épisode comme un message de la part de Brooker : le musée qui brûle, emportant avec lui les vestiges des autres épisodes, pourrait-il être un signe quant à l’avenir de la série, à savoir la fin de ces technologies nuisibles à l’humanité au profit d’un renouveau plus heureux ?

Verdict : 8/10

 

Dans l’ensemble, cette quatrième saison de Black Mirror a été assez satisfaisante, malgré une carence évidente quant au traitement scénaristique des technologies. Ce vide semble d’ailleurs vouloir être rattrapé dans le dernier épisode, c’est un peu dommage. Toujours fidèle à ses habitudes, la saison a su tout de même nous nourrir en émotions et sensations, et qu’est-ce que c’est bon ! Une cinquième saison n’a pas encore été commandée par Netflix mais cela ne saurait probablement tarder au vu des dernières réactions des fans de la série. En attendant, les quatre premières saisons de Black Mirror sont disponibles sur Netflix !

 

Bande-annonce – Black Mirror, saison 4