Cinemed 2016 : Sélection officielle longs métrages

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Le 38ème Festival du Cinéma Méditerranéen propose de découvrir 9 longs métrages en compétition ainsi que 8 longs métrages en panorama soumis au vote du public. Revenons sur la sélection du cinémed 2016 aux problématiques très variées.

 

Compétition longs métrages 

Nous avons vu six films sur les neuf proposés, nous allons donc revenir en priorité sur ces objets cinématographiques. Cette sélection nous amène de Grèce en Israël en passant notamment par l’Italie, l’Algérie ou encore la Slovénie, nous offrant un  tour d’horizon de la situation en Méditerranée.

  • Vivre et autres fictions de Jo Sol (Espagne) : Le film nous raconte l’histoire de Pepe, condamné pour avoir volé un taxi, et récemment sorti de l’hôpital psychiatrique après avoir purgé sa peine et Antonio, handicapé moteur qui se bat pour faire reconnaître les besoins sexuels des handicapés. Entre le besoin de Pepe de s’adapter et de rentrer dans le cadre d’un monde et le combat peu ordinaire d’Antonio, une amitié va naître. Ces deux hommes vont s’entraider dans leurs entreprises respectives bien qu’ils ne se comprennent pas forcément. Cette amitié interpelle le regard que nous portons sur la vie et nous incite à nous reconnaître en tant qu’anomalie car après tout « Celui qui a envie de vivre, finit toujours par avoir des problèmes avec la vie », tel est le dicton de ce film. Un postulat de départ intéressant mais qui n’aura pas suffi pour nous conquérir. Bien que les personnages soient touchants grâce aux belles performances des acteurs, ce film ne nous aura pas pleinement convaincu. Tout de même un joli essai poétique pour ce réalisateur qui nous rappelle que quelque part, nous sommes tous un peu handicapés dans la vie mais que cela ne l’empêche pas d’être belle. 
    • Demain dés l’aube de Lotfi Atchour (Tunisie) : Dans un registre plus sombre, Demain dés l’aube nous plonge dans une Tunisie en pleine désillusion après la révolution du jasmin. Le film raconte le destin croisé de trois jeunes dont la vie va se retrouver bouleversée par la tournure des événements la nuit de la destitution de Ben Ali. Entre enquête policière et récit intime, on suit ces trois jeunes à la fois en colère, désespérés et plein d’espoir, toujours prêts à lutter. Une mention que le titre du film souligne, s’il fait évidemment écho au poème de Victor Hugo, il se veut aussi porteur d’espoir, l’espoir d’un meilleur lendemain. Le titre arabe renvoie également vers cette vision avec un jeu de mots sur un proverbe arabe qui dit « Si on est toujours vivant, demain. ». Le message est ainsi clair. Le réalisateur livre un portrait impressionniste de la jeunesse tunisienne, qui malgré son désenchantement, n’abandonnera pas et cela est réussi. Nous avons une réelle empathie pour ces jeunes que la vie n’épargne pas. Les personnages sont très bien écrits. Le scénario met en avant que malgré leurs différences sociales et culturelles, leurs problèmes et envies sont les mêmes. De plus, celui-ci est rudement mené. Chaque rebondissement est une vraie surprise et même s’ils sont parfois durs à avaler, ils font la force du film. Un beau moment de cinéma comme on les aime. 
    • Fiore de Claudio Giovannesi (Italie) : Le réalisateur italien qui s’était déjà intéressé aux adolescents dans son précédent film continue sur sa lancée  et nous plonge cette fois dans l’univers carcéral. Fiore nous conte l’histoire de Daphné emprisonnée pour vol et qui va tomber amoureuse de Josh, un jeune braqueur. Toutefois, l’amour est interdit en établissement pénitentiaire. Pour ce film, le réalisateur a fait le choix de tourner avec des acteurs non professionnels, il voulait en effet des jeunes qui connaissaient l’univers carcéral, soit car ils avaient fait eux-même de la prison, soit parce que leurs parents en avaient fait. Le pari est réussi. Les acteurs servent brillamment le récit. Un récit qui cherche à mettre en avant que malgré leurs actes, ces jeunes restent toujours un peu innocents, et quoi de mieux qu’une histoire d’amour pour nous raconter cela. Pour retranscrire au mieux les sentiments de ces jeunes criminels, Claudio Giovannesi a écrit son scénario à partir de lettres d’amour écrites par de jeunes prisonniers qu’il a pu rencontrer. L’histoire est ainsi d’autant plus forte. La relation épistolaire qu’entretienne les deux héros est ce qui rend cette romance vraisemblable et belle. L’absence de téléphone et de réseaux sociaux permet de revenir à des sentiments plus authentiques et renforce cette image d’innocence. La douceur de cette histoire atténue la dureté de l’univers carcéral aussi bien pour les héros que pour les spectateurs. C’est une belle romance qui adoucit les mœurs. Fiore c’est l’éclosion d’une histoire d’amour et d’une jeune fille en fleurs. 
    • L’étoile d’Alger de Rachid Benhadj (Algérie) : L’étoile d’Alger nous raconte l’histoire de Moussa, jeune musicien qui rêve de devenir le Michael Jackson d’Alger. Avec talent et énergie pour tout bagage, il promène son fol espoir en jouant avec son petit groupe de musiciens d’abord dans les mariages, puis dans des boîtes huppées. La nouvelle étoile d’Alger c’est lui, mais il va se heurter à ces djihadistes qui s’approprient l’Islam et sont déterminés à l’empêcher de chanter. Sa passion lui coûtera le prix fort. Ce film bouleversant aura réussi à nous tirer quelques larmes. Jusqu’au bout, nous sommes de tout cœur avec lui et espérons le meilleur pour lui malgré les durs rebondissements mais dans une société où l’extrémisme prend de plus en plus de place, il est difficile d’avoir son happy ending. Le film nous expose la montée du djihadisme et de sa cruauté, mais aussi les vices de la société occidentale pas aussi serviable qu’elle ne pourrait paraître. Un film fort qui vous ne laissera pas indifférent. 
  • Personal Affairs de Maha Haj ((Israël) : Le film se déroule à Nazareth, où un vieux couple vit au rythme de la routine quotidienne alors que de l’autre côté de la frontière, à Ramallah, leur fils Tarek voudrait rester un éternel célibataire, leur fille est sur le point d’accoucher, son mari garagiste décroche un rôle au cinéma, alors que la grand-mère perd le Nord… Pendant ce temps, en Suède, leur fils aîné Hisham attend leur visite. On suit ainsi les couples à trois stades différents d’une relation amoureuse : la découverte de l’autre et la passion des débuts, le mariage avec l’installation d’une certaine routine et  ce qui résulte d’une relation au bout de 40 ans de vie commune. Le film évoque aussi l’enfermement que cela soit dans le couple ou sur le territoire, chacun de ces couples vit dans des villes où ils sont confinés, la situation en Israël et Palestine faisant qu’il est très dur de se déplacer. Or, chaque couple trouvera un moyen de franchir ces frontières qu’elles soient amoureuses ou territoriales. Chaque personnage dépassera ses limites et gagnera ainsi une certaine liberté. Aucune frontière politique, sociale ou sexuelle n’est infranchissable, c’est ce que ce film nous montre avec beaucoup d’humour. En effet, le film privilégie le comique de situation et nous fait vivre ainsi des moments d’anthologie. Ici, le message passe par des situations cocasses voir burlesques pour notre grand plaisir. Un film à voir sans hésitation ! 

    Parlons désormais des quatre derniers films que nous n’avons pas eu l’occasion de voir :

  • Suntan d ‘Argiris Papadimitropoulos (Grèce) : Le film raconte l’histoire de Kostis, la quarantaine, qui débarque à Noël comme seul médecin de la petite île d’Antiparos en Grèce. En hiver, c’est le désert et la solitude, mais dès les beaux jours, la horde de touristes débarque sur les plages naturistes. Kostis rencontre Anna, 19 ans et sa bande de copains. Soleil, alcool, sexe libre, Kostis s’initie à un monde qui lui est inconnu et son attirance pour Anna ne cesse de le hanter. Leur histoire prend des allures de tragi-comédie où l’amour, la tension sexuelle et le désespoir se côtoient jusqu’à la folie.
  • Tempête de sable d’Elite Zexer (Israël) : Les festivités battent leur plein dans un petit village bédouin en Israël, à la frontière de la Jordanie : Suleiman, déjà marié à Jalila, épouse sa deuxième femme. Alors que Jalila tente de ravaler l’humiliation, elle découvre que leur fille aînée, Layla, a une relation avec un jeune homme de l’université où elle étudie. Un amour interdit qui pourrait jeter l’opprobre sur toute la famille et contre lequel elle va se battre. Mais Layla est prête à bouleverser les traditions ancestrales qui régissent le village, et à mettre à l’épreuve les convictions de chacun.
  • Nightlife de Damjan Kozole (Slovénie/Macédoine/Bosnie Herzégovine) : Une nuit, un avocat renommé est retrouvé sur le trottoir d’une des rues principales de Ljubljana. Baignant dans une mare de sang, il est à peine conscient et recouvert de morsures de chiens. Tandis que les médecins du centre hospitalier luttent pour le maintenir en vie, son épouse, sous le choc, doit affronter ses plus grandes craintes. Au cours de la nuit, elle va enfreindre toutes les normes morales qu’elle a respectées tout au long de sa vie.
  • Apprenti dEmre Konuk (Turquie) : Alim travaille comme apprenti tailleur pour Yakup depuis quinze ans. À la fois fasciné et terrorisé par la mort, il est prisonnier de la routine d’une existence mondaine. Chaque matin, il ouvre la boutique et fait une sieste ou regarde la télévision jusqu’à l’arrivée de son patron. Tous les soirs, il rentre chez lui en voiture avec Kemal après être allé au café. Lorsqu’il apprend aux informations une alerte sur le danger des voitures roulant au GPL, il se met à vérifier systématiquement si chaque taxi à bord duquel il monte utilise ou non ce système, puis en prend note. Pour ne plus avoir à utiliser un véhicule, il décide d’emménager dans un appartement plus proche de son travail. Ce changement va être un tournant décisif dans la vie d’Alim.

 

Panorama Longs métrages 

Nous avons eu l’occasion de ne voir que deux films de ce panorama, le documentaire sur le groupe Massilia Sound System et Tramontane sur lesquels nous allons vu dire quelques mots avant de vous présenter les autres films.

Massilia Sound System,le Film retransmet avec justesse la communion qui règne entre ce groupe et son public. Ce documentaire à la fois divertissant et informatif nous propose de suivre à la fois le groupe en tournée et de découvrir son histoire depuis 30 ans, un bel hommage au groupe qui a su conquérir toutes les générations. On y découvre un groupe aussi simple dans la vie que sur scène et qui se bat depuis 30 ans pour survivre indépendamment. Un beau documentaire.

Tramontane nous raconte l’histoire de Rabih, un jeune chanteur aveugle, qui est invité avec sa chorale à se produire en Europe. Lors des formalités pour obtenir son passeport, il découvre qu’il n’est pas le fils biologique de ses parents. Un mensonge qui l’entraîne dans une quête à travers le Liban, à la recherche de son identité. Son périple dresse aussi le portrait d’un pays meurtri par les conflits, incapable de relater sa propre histoire.Un portrait sur un jeune homme et un pays en pleine crise identitaire très bien réalisé. La musique qui accompagne cette quête souligne brillamment les difficultés pour trouver des réponses. Entre enquête et émotion, nous traversons avec empathie toutes les étapes de cette recherche sans jamais s’ennuyer.

Voici les autres films qui étaient à découvrir dans ce programme :

  • Julie – Alba González de Molina : Julie décide de partir précipitamment de chez elle en abandonnant tout ce qui lui est cher. Sa fuite la conduit dans un village isolé dans les montagnes où elle espère pouvoir oublier la réalité. Personne ne connaît Julie. Personne ne sait réellement quel secret se cache derrière ce regard insaisissable.
  • La puerta abierta – Marina Seresesky : Rosa est prostituée, tout comme Antonia, sa mère, qui se prend pour Sara Montiel et transforme son quotidien en véritable cauchemar. Rosa ne connaît pas le bonheur. Elle ne sait tout simplement pas comment l’atteindre. Pourtant, l’arrivée inattendue d’un nouveau membre dans sa famille si particulière (et absurde) va lui offrir l’occasion inespérée d’apprendre à être heureuse…
  • Bravo virtuose – Lévon Minasian : Alik, 25 ans, clarinettiste, est le virtuose d’un orchestre dont l’existence est gravement menacée lorsque son mécène est assassiné. Une nuit, après s’être retrouvé en possession du téléphone d’un tueur à gages nommé « le virtuose », il décide d’usurper son identité.
  • Timgad – Fabrice Benchaouche : Lorsqu’il foule le sol algérien, Jamel, archéologue français d’origine algérienne, vient pour effectuer des fouilles sur les sublimes ruines romaines du village de Timgad. Le passé s’offre à lui, et le présent lui tombe dessus lorsqu’il est propulsé entraîneur de foot de l’équipe locale, «La Juventus de Timgad». Des gamins qui jonglent avec un quotidien chiche, qui n’ont ni maillot ni chaussure, mais dribblent avec talent. Entre vestiges antiques et plaies des luttes récentes, Jamel découvre sur ce terrain les racines tortueuses et les jeunes pousses d’une Algérie qui se rêve réconciliée…et championne de foot.
  • Tombé du ciel – Wissam Charaf : Beyrouth, de nos jours, Omar est garde du corps. Un jour, Samir son frère, un ancien milicien, revient. Samir est supposé être mort depuis une dizaine d’années…