[Interview] Eddy de Pretto, un artiste cru et franc très sollicité !

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Eddy de Pretto était très sollicité le vendredi à Solidays 2018. C’est lors d’une conférence de presse que nous l’avons rencontré.

30 petites minutes avec Eddy de Pretto pour mieux le connaître et lui poser quelques questions. C’est court, mais finalement c’est déjà une chance dont on a bien profité. Voici un résumé de la conférence de presse.

Cure, le nom de ton premier album, c’est une cure de quoi en fait ?
Eddy de Pretto : Cure de vie, cure de jouvence, tout ! Je voulais m’arrêter précisément sur la sonorité du mot Cure, qui m’intéressait particulièrement ; peut être même plus que le sens qui est un peu hyper établi. Alors oui… ça fait du bien, l’écriture de cet album m’a fait énormément de bien… Surtout sur toute la première partie de ma vie. Mais la consonance de cure me plaisait parce qu’elle venait un peu marquer l’oreille, titiller, taper dans l’oreille. Cure, c’est pas très joli, voir un peu dégueu. C’est ça que j’ai voulu aller chercher dans cette définition de cet album. Quelque chose de pas forcement très agréable à la première écoute, qui peut heurter parfois, qui peut ne pas faire du bien. C’est comme ça que je l’ai écrit, sans me ménager, sans censure. Je trouvais que Cure définissait pas mal ce ressenti.

Cet album est plein de moments de mal être, de moments très personnels sur toi, ta vie de famille… est-ce que ça te fait du bien vraiment de le chanter tous les soirs ?
Eddy de Pretto : Oui je crois. Ce qui fait le plus de bien, c’est que c’est un pur ego trip de dingue : le fait de se retrouver devant des gens de plus en plus nombreux qui chantent tes chansons ! Et je pense que c’est ça qui te rempli jour après jour. Toi tu les chantes et tu as un dialogue chaque soir différent avec le public. C’est comme des rencontres et plus les rencontres sont chaleureuses, plus elles sont grandes, et plus elles te font du bien. Tu te dis qu’il y a du feeling avec ces gens là et c’est génial ! Il y a un vrai échange, de vraies sensations. Le plus dur c’est de retourner dans ma chambre après dormir seul.

Dans tes textes, tu es très cru. Est-ce que c’est une nécessite dans le contexte actuel de ne pas enjoliver les mots ?
Eddy de Pretto : Cette manière d’écrire m’est venu très naturellement. J’ai suivi cet instinct face à mon piano ou mon ordi de comment j’avais envie de préciser les choses. Pour moi cette précision elle amène un côté sans censure, sans avoir peur de heurter. J’ai adoré aller chercher des synonymes de certains mots français qui pouvaient être peu utilisé, qui pouvait être plus direct ou dégueu. Parce que ça me plait ! L’album s’est vraiment fait à l’instinct. Pour un premier album, il fallait que je raconte une première partie de ma vie. J’ai écrit depuis 18/19 ans donc j’avais énormément de matière pour aller piocher dans plusieurs choses, dans plusieurs périodes de toutes ton enfance, adolescence. Il s’est trouvé que c’est ce qui marque dans mon écriture : ce côté âpre, cru, direct. C’est plutôt le retour des gens que le mien d’ailleurs, parce que c’est ma manière de parler dans la vrai vie aussi.

Est-ce que c’était important de parler d’homosexualité ? Est-ce que ça a changé quelque chose ?
Eddy de Pretto : Cure n’est pas un outing, je parle de mes histoires et il se trouve que je parle pas de Vanessa, mais de Jimmy. Mais en dehors de ça, je me sens normal. J’ai pas envie de mettre ça en avant, de faire du sur-texte, de surligner les choses qui sont dans l’album et qui sont pour moi assez claire et banale finalement. Moi je ne différencie pas en fonction de l’orientation sexuelle de l’artiste que ce soit un album fait par un hétéro ou un homo, ça change rien. Les choses n’ont pas changées pour moi non plus !

Eddy de Pretto - Antony Gomes

La médiatisation est montée très vite pour toi, est-ce que ça te fait peur aussi ?
Eddy de Pretto : Ecoute… ça va (rires) ! J’ai grandi avec la télé-réalité, star académie… On a vu des gens émerger comme ça. Pour moi cette médiatisation n’est pas définitive. Ce qui m’intéresse aujourd’hui c’est de confirmer la suite, d’aller encore plus loin et de montrer que ce n’était pas juste une vague, une chance, un coup de bol qui m’a fait arriver jusqu’ici. Prouver qu’il y a encore des choses à dire et pas juste une médiatisation de six mois et après on oubli. C’est un de mes rêves de m’inscrire dans la durée. Ce qui se passe est cool mais ça rend surtout possible le futur !

Le risque d’un ego surdimensionné est un thème récurrent dans l’album, est-ce que ça t’arrive d’en avoir un ?
Eddy de Pretto : Tous les jours ! (rires) Non je sens pas… J’essaye de le mesurer au maximum, de rester très calme et de mettre une certaine distance avec tout ça. Justement, de pouvoir le questionner, en parler avec mes amis. Revenir à l’essentiel : avec mes potes je n’ai pas changé ! Et même pour eux je n’ai pas changé. Ce qui me trouble c’est que cette notoriété, c’est surtout le regard des autres qui change sur toi et c’est ça qu’il faut travailler. Montrer à ces gens qui pensent que tu n’es plus accessible, de leur dire je n’ai pas changé, je suis la même personne, il n’y a pas de soucis, on peut se parler comme avant. Souvent les gens mettent une sorte de hiérarchie sociale, vis à vis de ce que tu es devenu. Et ça, c’est un peu emmerdant parce que ça t’enferme. Il y a quelque chose d’assez cloisonnant dans cette notoriété parfois.

Est-ce que cette nouvelle notoriété va déclencher une carrière dans le cinéma d’après toi ?
Eddy de Pretto : Peut être… J’ai des demandes, des propositions. Je vais resté focus sur la musique pour le moment, sur le texte, l’envie de vouloir dire des choses et on verra ce que le cinéma pourra m’offrir ensuite.

Tu disais ne pas rentrer dans le moule physiquement, est-ce que c’est une sorte de revanche sur la vie aujourd’hui ?
Eddy de Pretto : Je sais pas. J’ai refoulé quand j’était petit le fait d’être un peu différent. Je voulais m’inclure le plus possible et être avec les autres, être comme tout le monde, même si je sentais des différences assez claires. Le fait que je joue aux Barbies par exemple, ça me rendait différent. Au delà de toute connaissance de sexualité, j’ai rejeté tout ça, ça n’a pas été conscientisé de cette manière. Alors aujourd’hui, oui, ça me fait du bien d’être là, d’avoir une certaine reconnaissance, mais je ne sais pas si c’est en réponse à quelque chose…sûrement… mais je pourrais pas l’affirmer. 

La démesure est ton rêve, est-ce que Solidays te permet de le réaliser ?
Eddy de Pretto : Ouais ! Je crois que mon objectif est pas précisément défini, mais en tout cas ça fait parti d’une avancée, d’un certain accomplissement. Le fait de jouer devant énormément de gens comme ça, c’est un rêve. Je pensais pas que je pourrais jouer sur des grandes scènes comme celle là. Je voyais ça de très loin quand j’étais plus petit et là de le faire, c’est assez dingue et j’ai un peu peur je vous l’avoue.

Est-ce que le fait que Solidays soit un festival engagé t’a incité à y participer ?
Eddy de Pretto : Non, pas forcement, même si je suis tout à fait en accord avec la lutte contre le SIDA. On a travaillé avec mon équipe sur les festivals qu’on pouvait faire cet été, Solidays est arrivé et je trouvais ça très bien et me voilà !

Il y a quelqu’un qui est aussi présent sur le festival, c’est Martin Dust des Sœurs de la Perpétuelle Indulgence, qui a écrit une chanson pour toi. Comment s’est fait la rencontre ?
Eddy de Pretto : On s’est rencontré à l’institut supérieure de la scène où il travaillait. C’est ma prof de chant qui me l’a fait découvrir. Il a écrit Rue de Moscou, cette chanson magnifique, et j’avais travaillé la compo. C’est une des rares collaborations de cet album que j’ai adoré. C’est la seule que j’ai gardé sur l’album.

Barbara Pravi a fait une reprise de Kid et on voulait avoir ton avis sur cette version féminisée et féministe.
Eddy de Pretto : Cool ! Très bien. C’est cool que toutes les personnes qui ont été touchées puissent reprendre un titre à leur sauce et de manière totalement différente c’est génial. C’est une réadaptation, plus qu’une reprise. Je suis ravi. Bravo Barbara Pravi !

A quoi ressemble le futur d’Eddy de Pretto ?
Eddy de Pretto : J’ai envie de ressortir des trucs. Je recommence à écrire et travailler donc j’ai encore des choses à dire sur ce que je ressens, ces questionnement là… Ces sensations nouvelles que j’ai depuis un an bientôt. On parlait de notoriété : il y a aussi ce désir d’anonymat une fois que tu as cette notoriété, ce travail d’évolution par rapport aux gens… ça c’est un thème qui pourrait m’exciter ! Raconter la banalité des choses aussi ; c’est ça que j’ai envie de garder. J’ai envie de rester dans le plus précis dans les émotions que j’ai en dehors de la notoriété.

Eddy de Pretto sera sur de nombreux festivals cet été avant de poursuivre sa tournée qui l’emmènera jusqu’à l’Olympia le 6 novembre prochain. On lui souhaite bonne route !

Page Facebook de Eddy de Pretto

Photos : Antony Gomes – http://www.antonygomes.com/