Que vaut la suite de Keiji, le manga historique de Tetsuo Hara ?

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Mangetsu vient de sortir le tome trois de Keiji, le manga historique qui suit les aventures d’un samouraï ou plutôt d’un kabuki-mono. Ce troisième opus continue à rendre cette série indispensable.

Des plumes et des sabres

Keiji le flamboyant samouraï

Les deux premiers tomes de Keiji ont familiarisé le lecteur avec les kabuki-mono. Ces hommes étaient à la fois des soldats d’élite, de bons vivants aux armures flamboyantes et des aventuriers cherchant à vivre selon leurs règles. Keiji est l’un d’entre eux. Il vient de prouver sa valeur lors d’un siège dans le tome précédent et pense pouvoir se reposer dans les bras d’Hotaru. L’ancienne amie de Keiji retrouve petit à petit goût à la vie en sortant de la domination d’un homme malveillant mais tout n’est pas si simple quand on est un soldat…

Keiji est dans une situation complexe en raison de son arrogance… et de ses succès militaires. Son oncle, par ailleurs le chef de son clan, le déteste. Il l’avait envoyé dans une mission suicide pour se débarrasser de ce soldat irrespectueux et dangereux. Les menaces grandissent donc pour Keiji et arrivent jusqu’à son palais. Cependant, derrière le sérieux, le scénario devient également de plus en plus délirant avec des kamikazes idiots ou des chauves-souris tueuses.

Cette lutte nous fait paradoxalement rire car certains ennemis sont parfois des bouffons maladroits et ridicules. Dans ce tome Keiji se retrouve confronté à un nouveau shinobi. Kômori du clan Takeda qui semble au départ sorti d’un comics Batman. Ce colosse tout de noir vêtu mange des chauves-souris crues qu’il cache dans son manteau. Mais le tatouage de croix sur son visage montre qu’il n’est pas dans le camp du bien. La confrontation avec le héros de la série donne lieu à des scènes impressionnantes mais aussi assez gores.

Un héros aux multiples visages

Keiji contre Batman ?

En dehors des combats, ce troisième tome fait le portrait d’un anti-héros baissant parfois la garde pour révéler une grande tendresse. Quand il parle avec Hotaru, il est très poétique puis donne une fortune à un enfant. Le lecteur découvre ensuite l’amour de son père adoptif et l’enfance de Keiji qui était déjà insupportable et téméraire. Il n’est finalement pas le fils indigne que les autres voient. Cette seconde partie est à ce jour la meilleure partie de la série. Keiji n’est pas une exception car tous les hommes de cette série sont complexes. Ils affichent un rigide code de l’honneur devant leurs fidèles. Mais, pour arriver au sommet du pouvoir, ils engagent des ninjas qui ne respectent rien. La morale n’existe plus.

Le scénariste Keiichirô Ryû alterne avec talent les différentes registres graphiques. Cependant, ce qui rend cette série unique ce sont les dessins du maître Tetsuo Hara. Il ne cache pas la violence mais montre crûment des corps coupés en deux et le sang qui coule comme une fontaine. Il arrive dans chaque case à rendre à la fois le dynamisme des combats et la précision du cadre historique. Ce n’est donc pas un hasard de découvrir que cette série était publiée dans le plus grand magazine du Japon, le prestigieux Weekly Shônen Jump.

En cette saison automnale, ce ne sont pas les feuilles qui tombent dans Keiji mais les doigts. Cependant, cette série va bien au-delà de ces quelques scènes violentes. Les deux auteurs réalisent une fresque sur un Japon divisé entre clans et dépeignent le portrait d’un homme complexe à la fois combattant d’exception et musicien sensible.

Si cette chronique vous intrigue, vous aurez plaisir à découvrir sur ces liens les débuts de la série et un manga historique plus féminin du même éditeur, Butterfly Beast.