Butterfly Beast T03: Entre le sabre et le crucifix, Ochô lutte en beauté

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Dans le tome précédent de Butterfly Beast, Ochô devait lutter à la fois contre un groupe de samouraïs et une secte chrétienne. Face à ces deux groupes coalisés, elle n’a pas pu s’imposer et se retrouve prisonnière. Est-ce la fin pour la courtisane espionne ?

Seule contre tous

Ochô en mauvaise position dans Butterfly Beast

Dans l’ouverture du volume trois de Butterfly Beast, Ochô est ligotée. Malgré cette situation périlleuse, Ochô résiste et cherche à reprendre la main… Elle a été trahie par son partenaire Raizô qui, passé dans le camp des Réprouvés, est sous l’emprise du prêtre Jihyôe Kintsuba. Ce dernier fédère autour de lui les catholiques persécutés et il s’est allié aux soldats rebelles de Kazuma.

Même si cette alliance entre des soldats devenus des tueurs et des chrétiens pacifistes peut paraître surprenante, elle fonctionne. Recrutant de plus en plus d’anciens soldats, le groupe de ronins sort de la clandestinité et déclare la guerre aux espions. La secte catholique rassemble en masse ses fidèles autour de la capitale. Kintsuba est opposé à la violence, mais son allié le manipule afin de déclencher une insurrection millénariste.

Ce volume présente à nouveau le contexte de l’après-guerre civile. Des shinobis sont heureux de retrouver le combat quelle que soit la cause. Butterfly Beast montre aussi une période d’occidentalisation de l’archipel. Des Japonais sont convertis au christianisme à la suite des missions espagnoles et portugaises. On découvre l’hypocrisie de la papauté qui est au courant des massacres, mais ne fait rien. Cette révolte a aussi (et surtout) une cause sociale. Elle est une union des exclus avec les courtisanes, les paysans et les ronins. Les chrétiens sont les plus pauvres, car ils sont séduits par le message égalitaire et le paradis pour tous.

La scénariste et dessinatrice Yuka Nagate nous fait comprendre cela par les dialogues, mais sans jamais en faire une pesante leçon d’histoire. Butterfly Beast suit avant tout les aventures d’Ochô. De la même manière, Nagate modifie sa narration visuelle en fonction du récit. Dans ce tome, on trouve moins de décors et plus de scènes épurées lors des combats de nuits, mais la dessinatrice s’en sort très bien avec un découpage des pages qui laisse traîner le mystère.

La fin du shogun ?

Ochô soutenu par son patron et un traître

La crise ne concerne pas seulement Ochô mais tout le réseau Yoshiwara. La gravité de la situation pousse le patron Jin’Emon à agir pour la première fois. Il compte utiliser un atout : Ferreira un ancien prêtre passé dans le campus du pouvoir. Cet occidental transmet son enseignement aux espions permettant de comprendre la mentalité des chrétiens et d’anticiper en conséquence la meilleure stratégie. Butterfly Beast est une magnifique série d’espionnage qui ne cesse de jouer sur la double identité.

Depuis le début de la série, la lectrice ou le lecteur sait qu’Ochô est à la fois une courtisane et une espionne, mais elle n’est pas la seule. Raizo le chasseur, est aussi Fabian le chrétien. Kazuma est un criminel sans pitié et l’ancien ami d’Ochô. On découvre que même le chef du réseau d’espion a eu un passé inattendu. Chacun est partagé entre son envie personnelle et la raison d’État. Un chasseur peut-il avoir une âme ou doit-il mettre sa mission avant tout ?

De cette tension entre les identités dépendra l’issue du complot, car chacun navigue entre mensonge et vérité, fidélité et trahison. Les espions agissant pour le pouvoir sont les plus menteurs alors que les shinobis respectent la morale du criminel. Cependant tout peut changer en une case…Une révolte récente a une cause personnelle : une trahison ancienne est révélée alors qu’une autre incarne une nouvelle stratégie davantage qu’un changement d’objectif.

Dans ce nouveau volume, Butterfly Beast continue à être un véritable page turner, un récit haletant où plusieurs personnages passionnants sont menacés par l’extérieur, mais aussi en proie à des crises morales internes. Édité avec talent par Mangetsu, la série est aussi bien plus complexe en faisant le portrait d’une époque où certains agents de l’État sont moins honnêtes que les truands. Mais est-ce vraiment une série sur le passé ?

Si vous voulez en apprendre plus sur cette série, vous pouvez lire les chroniques sur le volume précédent et sur le premier tome.