Critique « Laissez bronzer les cadavres » d’Hélène Cattet et Bruno Forzani : une série B furieuse

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Spécialisés dans le Giallo, Hélène Cattet et Bruno Forzani signent avec Laissez bronzer les cadavres leurs troisième long-métrage. Un film mixant film de gangster et western qui sent les seventies, avec nombreux hommages au cinéma d’exploitation et de série B, cela promet un film qui mérite le détour. Focus.

Malgré une histoire somme toutes classique, Laissez bronzer les cadavres est un film sur lequel les auteurs ont posé leur marque. Un film à l’ambiance qui sent bon les westerns spaghettis, avec des qualités visuelles proches de l’hallucination. C’est aussi un film post-moderne qui se permet de suivre un personnage avant de revenir légèrement en arrière pour retrouver le point de vue d’un autre personnage. 

Laissez bronzer les cadavres Critique "Laissez bronzer les cadavres" d'Hélène Cattet et Bruno Forzani : une série B furieuse

D’ailleurs, les personnages parlons-en. Laissez bronzer les cadavres est avant tout un film choral, un film qui se concentre sur plusieurs personnages. L’intrigue est fort simple. Une journée dans les années 70 en plein sud de la France. Trois braqueurs ont volé 250 kilos d’or et se cachent dans un village abandonné appartenant à un artiste en manque d’inspiration. Des invités inattendus débarquent : parmi eux, deux flics. A partir de là, le film se transforme en huis clos et en un joyeux massacre enragé et sanguinolent. Adapté d’un roman de Jean-Patrick Manchette et Jean-Pierre Bastid, le scénario n’est prétexte qu’à une série B jouissive et nous offre de nombreuses scènes de fusillades, des images léchées et stylisées, ainsi qu’un casting de gueules et d’excellents acteurs. 

Esthétiquement parlant on l’a déjà dit : le film est superbe. Les couleurs arrivent à rendre grâce à la lumière du sud de la France, grâce à des teintes chaudes et chaleureuses, qui font du film un beau film. Ensuite, il y a un sens du cadre certain chez les deux cinéastes, qui vont à l’essentiel et arrivent à raconter une histoire de manière purement visuelle. Un cadrage et des plans qui rendent hommage à tout un pan de cinéma bis, allant de Mad Max (les flics vêtus intégralement de cuir qui renvoient au premier volet de la saga de George Miller) au cinéma de Dario Argento. 

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Un autre élément marquant dans la réalisation est le traitement sonore. L’ambiance se crée en grande partie grâce aux sons. Des vêtements qui craquent, du vent, une cigarette qui s’allume, des œufs qui cuisent… Tous ces éléments pourraient permettre à Laissez bronzer les cadavres d’obtenir facilement une nomination pour le César du meilleur son. Les sons permettent de créer une ambiance sale et grinçante. Quant à la musique, elle est absolument fantastique. Renvoyant encore une fois aux westerns spaghettis et aux films de genre italiens, elle dégage une grâce qui emporte le film vers une dimension lyrique et baroque. 

Concernant le casting, on notera la présence d’Elina Lowenshon, qui joue une femme forte et imprime sa présence et sa prestance dans la pellicule (le film est tourné en pellicule). Impressionnante de charisme, l’actrice roumaine est à surveiller de très près et nul doute qu’elle deviendra une figure importante chez les auteurs de film de genre français (elle sera d’ailleurs à l’affiche de l’excellent Les Garçons Sauvages).

1508322476911 1502976356261 shellac laissez bronzer les cadavres image 2153 Critique "Laissez bronzer les cadavres" d'Hélène Cattet et Bruno Forzani : une série B furieuse

Le seul problème concerne l’histoire. Celle-ci est certes plutôt bien menée dans un premier temps. Cependant, elle finit par devenir prétexte à des scènes de fusillade et à un véritable exercice de style qui montre bien la fascination des deux réalisateurs pour un certain cinéma. Si cela est fascinant et galvanisant à faire, cela n’est pas très passionnant à regarder et finit par mener à l’ennui pour le spectateur.

Laissez bronzer les cadavres est donc un film imparfait qui mérite cependant le coup d’œil, ne serait-ce que pour le fun que peut représenter le visionnage de ce film et le plaisir cinéphile. En fin de compte, comme l’a dit James Cameron, « il vous semblera meilleur entre amis, après avoir descendu chacun la moitié d’un pack de bières ! »

Bande-annonce Laissez bronzer les cadavres