Critique « Truman » de Cesc Gay

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Porté par Ricardo Darin et Javier Camara, Truman, réalisé par Cesc Gay, est une comédie dramatique espagnole touchante et très réussie. Récompensé par 3 Goya, Truman raconte comment le personnage de Camara va voir son ami interprété par Darin, atteint par la phase terminale d’un cancer. Les deux amis de longue date vont se retrouver et passer quelques jours ensembles.

Une œuvre subtile et spontanée

Truman
Javier Camara et Ricardo Darin

La grande force de Truman réside dans sa spontanéité. Grâce à la maîtrise de Cesc Gay et le talent du duo d’acteurs, le long métrage pourrait être l’histoire dramatique et inévitable de n’importe quelle amitié. Le personnage de Ricardo Darin n’a plus que quelques jours à vivre et la présence de son ami le libère de la tension que cette peur lui procure. Tous les deux vont rencontrer des individus issus de leur passé, des connaissances, retrouver des lieux et de la famille. Truman a la particularité d’être une comédie dramatique réellement bien dosée. Cesc Gay ne tombe jamais dans le pathos, conserve constamment une légèreté salvatrice qui permet au public d’oublier la condition incertaine du protagoniste pour se concentrer sur la beauté de son amitié avec le personnage de Javier Camara. Pudique, spontané, touchant, Truman fait partie de ces films qui parviennent à capter l’identité profonde des individus grâce à une émotivité maîtrisée et pertinente. Truman est le nom du chien du personnage malade, un petit ajout qui cherche à augmenter la dimension émotive. Le héros lui cherche une nouvelle famille, rencontre des possibles nouveaux propriétaires, l’occasion d’insérer quelques personnages secondaires intéressants. Un animal ajoute toujours un plus au degré d’émotivité des spectateurs, Truman n’échappe pas à la règle, et apparaît comme la continuité du héros, un animal triste et bientôt seul, séparé de son maître. Cesc Gay ne montre pas de mort à l’écran, reste fidèle à son engagement envers le film, subtil, décomplexé et optimiste. Le long métrage est une belle conclusion à la fin de vie, mélange de tristesse, de mélancolie et d’optimisme dans la crainte.

Des personnages attachants et proches du public

Javier Camara et Ricardo Darin
Javier Camara et Ricardo Darin

Les acteurs sont talentueux et jouent des personnages attachants, réalistes, des protagonistes qui pourraient être les propres amis du spectateur. C’est là que réside la grande force du long métrage, déverser une empathie puissante grâce à la proximité créée avec les personnages. Cesc Gay traite ses protagonistes avec intelligence et pertinence, il dresse des portraits psychologiques passionnants sur la fin de vie, le regret, l’appréhension de la mort et le relationnel entretenu avec les proches du malade. Truman est un film proche de son public, qui concerne chaque spectateur. C’est un film positif, qui montre que même face à la faucheuse, l’optimisme est présent, prêt à être saisi, pour rattraper ses erreurs et offrir à ses proches un véritable adieu. Ricardo Darin est très subtil dans son rôle de mourant, capable de capter l’émotivité des spectateurs. C’est aussi l’occasion pour le personnage de renouer des liens avec son fils, divorcé avec sa femme, il ne voyait plus beaucoup celui-ci. Prétexte à une excursion à Amsterdam, ce dernier étant en fac là-bas, la relation père-fils, pudique et timide est très touchante et réussie. Cesc Gay réussi ainsi à trouver un équilibre parfait et constant sur toute la durée du film. Truman est une véritable hymne à la vie face à la mort et met en avant la grande délicatesse dont peut être capable l’être humain, il démontre que l’altruisme existe, que le pardon est possible et que l’Homme ne reste pas impassible devant la détresse. 

Truman est une comédie dramatique efficace et aboutie, qui esquive avec brio le pathos, pour se concentrer sur une empathie puissante, presque un avertissement à l’égard du public : profitez de la vie avant qu’il ne soit trop tard.