Adaptation du roman d’André Aciman et réalisé par Lucas Guadagnino, Call me by Your Name a remporté dans la nuit de dimanche à lundi l’oscar du meilleur scénario adapté. Sorti en salle mercredi dernier, le film, intime et juste, avait déjà marqué le Festival de Sundance.
1983 : Elio Perlman a 17 ans. Issu d’une famille d’érudits polyglottes, il passe son été dans leur maison au cœur de l’Italie. Comme chaque année, les Perlman accueillent un hôte le temps des vacances. C’est ainsi qu’Oliver, jeune américain de 24 ans, débarque dans la vie d’Elio.
L’ode d’un été suspendu
L’été vit au travers du chant des cigales, des places ensoleillées, des baignades dans le ruisseau, des balades à vélo. Il s’égrène au détour des déjeuners sous les arbres et des matins en terrasse. La chaleur accablante se devine au cours des après-midis passés à l’intérieur, volets fermés, des lectures à l’ombre ou dans la piscine. Il alanguit et accompagne l’entrée dans l’intimité des personnages. Un été qui n’en finit plus de réchauffer l’âme. Un été aux signes universels qui, sans la bande-son et les quelques détails d’époque, ferait presque oublier qu’on est en 1983. C’est l’été d’hier et de demain.
Une révélation nommée Timothée Chalamet
Timothée Chalamet (Interstellar, Lady Bird) interprète Elio. Il livre une performance pleine de justesse et de douceur, comme s’il enfilait une seconde peau. Lui-même polyglotte, l’acteur franco-américain passe de l’anglais à l’italien pour revenir au français avec une aisance déconcertante. Chaque phrase qu’il prononce laisse entrevoir un autre pan de son personnage, qui se découvre un peu plus au fil de ses mots. Dix-sept ans, c’est un âge de passion, mais aussi de maturité. Elio oscille entre les deux tout au long de l’été. Il s’élance, dérive, reprend son souffle, s’ennuie, se perd, renaît. Et c’est autant de Timothée Chalamet qui crève l’écran. Son jeu trouve toute sa force dans ses échanges avec Armie Hammer. L’interprète d’Oliver lui offre la possibilité de virevolter avec talent entre humour et désarroi, angoisse et séduction, ivresse et souffrance. Un talent qui transpire dans chaque plan où l’acteur est présent.
L’intimité universelle
Abordant la thématique du premier amour, du passage à l’âge adulte mais aussi du désir sexuel dans toute son ambiguïté, Call me by Your Name réussit à éviter les stéréotypes. Le film de Lucas Guadagnino (Amore, A Bigger Splash) balaye le superflu pour donner force aux détails. Chaque mot, chaque regard, chaque contact, trouve sa place dans l’indicible qu’est le premier amour. Le Elio, plongé dans son quotidien estival rythmé par ses lectures et ses partitions de musique, s’éveille tout à coup avec l’arrivée d’Oliver. Il explore sa sexualité sous toutes ses formes. L’écran s’illumine du naturel insufflé dans chaque frémissement et geste esquissé. Et ce, sans jamais se départir de la touche de légèreté et d’insouciance que seul procure l’été. Les deux hommes se devinent sans se toucher, se retiennent, aux regards des autres, pour mieux se découvrir. Ils s’oublient ensemble. Une complexité dépeinte sans faux-semblants et nimbée de bienveillance grâce à l’entourage d’Elio. Comme si chaque détail du film lui murmurait à l’oreille : « Vas-y, profites-en, vis ce que tu as à vivre, le reste peut attendre ».
Call Me by Your Name, scénarisé par James Ivory, se détache des clichés et nous embarque avec l’élégance de la simplicité dans la parenthèse brûlante d’un été infini et pourtant trop court.