Critique « Alien – Covenant » de Ridley Scott : quand le génial côtoie le médiocre

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Alien : Covenant débarque ce mercredi dans nos salles obscures. Et après l’échec artistique retentissant qu’a été Prometheus, il y avait de quoi être sceptique quant à cette suite à venir. Toutefois, malgré les bases chancelantes laissées par son prédécesseur, ce nouvel Alien semble déterminé à reprendre sa légende en main. L’objectif ? Revenir aux sources avec une suite plus proche de ce qui a fait la renommée de la saga. Retour sur cette opus sombre et esthétisé, où l’excellent côtoie la médiocrité.

Une réalisation sombre et calibrée

Avant des nous attarder sur le scénario, sur ses hauts et ses bas, un détour réalisation s’impose. Car un chose est indéniable, Ridley Scott a fait un travail magnifique. Bien plus sobre que ne l’était son prédécesseur, Alien : Covenant puise dans l’esthétique sale et sombre qui a fait sa renommée. Bien sûr, nous n’échappons pas aux technologies bien plus avancées qu’elles ne devraient l’être par rapport au premier Alien, mais l’effet est cette fois-ci bien mieux maîtrisé et donc beaucoup moins dérangeant. 

L’ambiance crépusculaire est menée d’une main de maître de bout en bout, accompagnée en toute sobriété par une bande son aux sonorités « starwarsiennes » signée Jed Kurzel (Assassin’s Creed). La perte de repères des personnages est aussi palpable que malaisante. Celle-ci se ressent notamment grâce à l’iconisation de décors titanesques et vides de toute vie.

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Quand le « néomorphe » se régale

Outre une très belle photographie, nous avons le plaisir retrouver la saleté et le sang ayant rendu cette saga légendaire. L’hémoglobine et les tripes sont suffisamment présentes pour être jouissives et suffisamment subtiles pour ne pas être outrancières. Ainsi, un très bel équilibre est trouvé entre l’ambiance anxiogène et le gore qui sont tous deux emblématiques dans la saga

Des questions métaphysiques omniprésentes 

Si Alien : Covenant prend son temps pour démarrer afin de poser correctement son atmosphère, les questions métaphysiques sont présentes dès le début : pour le meilleur et pour le pire ! L’avantage étant que ces questions métaphysiques vont en s’améliorant tout au long du film. Les premières grandes questions sont posées dès la première scène mais malheur : nous sommes une fois de plus face à une forme de créationnisme pur et dur, nous rappelant les heures les plus sombres de Prometheus

Mais cela ne dure pas longtemps, puisque nous sommes par la suite confrontés à de véritables interrogations propres à l’espèce humaine, mais également à diverses interrogations concernant l’humanité des machines. Jusqu’où l’homme peut-il jouer à Dieu ? quand sa création le surpassera-t-il ? Qu’est-ce que l’âme et comment la quantifier ? Les émotions sont-elles l’apanage de l’Homme ? Autant de questions que le film nous expose sans pour autant y répondre, mais en nous laissant de quoi réfléchir et prendre du recul. Enfin, nous retrouvons des interrogations philosophiques dignes de la saga Alien. Quel plaisir ! 

Malheureusement, ce plaisir est partiellement gâché pour une raison simple mais que nous allons devoir développer. Et cette raison est que…

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L’arrivé fracassante de David chez nos « créateurs »

Le film ne tient pas ses promesses 

Bon sang de bonsoir ! Alien : Covenant est censé offrir une suite à Prometheus, offrir des réponses à toutes les questions que nous nous sommes posés devant ce premier prequel. S’il est indéniable que ce nouvel Alien est bien mené de bout en bout, il est important de souligner qu’il n’offre pas de réelle suite à Prometheus. Les interrogations sur l’origine de l’humanité ne sont pas réglées, ne serait-ce que partiellement.

A quoi bon faire revenir l’androïde David et développer son background si ce n’est pas pour offrir une réelle suite à son histoire ? Ceci est réellement regrettable puisque le développement spirituel de David est le fer de lance d’Alien : Covenant. Ce personnage est de loin le plus intéressant. Il est celui qui nous fait remettre en perspective toute la vision que nous pouvons avoir de l’âme, des émotions et de la conscience. Il incarne la création humaine dans toute sa splendeur, sa noirceur et sa complexité. Alors pourquoi diantre ne pas avoir axé toute l’histoire sur lui ? Pourquoi ce besoin de mettre en avant une colonie spatiale qui finit par faire de la figuration dans son propre film  ?

Ridley Scott semble tellement vouloir s’éloigner de Prometheus (qui était, rappelons le, très mauvais !) qu’il en a oublié d’en conclure l’histoire. Revenir aux sources de la saga Alien est un objectif très louable et un pari tenu puisqu’Alien Covenant est une belle réussite. Mais cela n’aurait pas dû se faire au détriment de ce que cette nouvelle histoire entreprise par Ridley Scott dans l’épisode précédent. Espérons donc que Scott répondra à toutes ces questions (comme il l’a déclaré) dans le futur Alien : Awakening, qui devrait nous éclairer sur les événements ayant lieu entre Prometheus et Alien : Covenant

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David (Michael Fassbender) face à son concepteur et « père » (Guy Pearce)

Alien : Covenant est une belle réussite filmique et philosophique. Si quelques facilités scénaristiques se font parfois ressentir, celles-ci restent suffisamment anecdotiques pour ne pas être dérangeantes. Toutefois, le film ne répond absolument pas aux questions posées par Prometheus et en rajoute plusieurs par dessus le marché. Ce qui nous offre un film certes calibré, mais un film qui ne tient pas ses promesses. 

 

https://www.youtube.com/watch?v=5VZbQXL8rKY