Critique « L’intégrale de Bloodshot » : l’action politique éclate partout

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Bloodshot est un soldat américain d’élite mais au cours d’une mission en Afghanistan, il découvre que tout son passé a été fabriqué et qu’il n’est qu’une arme vivante et effaçable. Cette arme prend alors sa liberté et va se battre pour retrouver son passé. Ce livre est édité en France par Bliss Comics depuis le 25 avril.

 

Une porte d’entrée idéale

Un soldat se révolte contre des mercenaires

Nous vous avions présenté l’univers de Valiant Entertainment dans un précédent article. Bloodshot marque l’arrivée de premières nouveautés de l’éditeur français de Valiant. Cet épais volume au prix très doux rassemble l’ensemble des 43 épisodes de la série Bloodshot depuis sa relance entre 2012 et 2014. La première partie scénarisée de Duane Swierczinscy (Iron Fist) est orientée vers l’action. Cette période culmine avec le crossover – plusieurs séries se croisent autour d’une même histoire – Harbinger Wars.  Bloodshot s’associe ensuite avec une troupe d’élite génétiquement modifiée le H.A.R.D Corps dans des épisodes écrits par Joshua Dysart (Unknow Soldier, Harbinger War) et Christos Gage. Un nouveau lecteur ne sera pas perdu car l’histoire de Bloodshot commence avec ces épisodes.

Un récit d’action…

Dès les premières cases, l’action démarre par des attaques de l’armée américaine à l’étranger. On est en plein dans le monde contemporain mais simplement modifié par des éléments imaginaires : un enfant a un super-pouvoir et Bloodshot est un soldat à la peau d’ivoire, mis à part un cercle rouge sur le torse. Des robots microscopiques circulant dans le corps de Bloodshot – les nanites – lui permettent de guérir très vite et amplifient ses sens. Ces nanites sont un virus conscient qui peu à peu renforce Bloodshot.

Par des images d’une famille idéale et des discours guerriers, on semble être dans un récit « nationaliste » que ne renierait sans doute par Trump. Bloodshot est-il un cocktail du Punisher et de Wolverine servant la propagande américaine ?

… et politique

Le scénariste fait exploser ce mythe dès le premier épisode. Bloodshot n’est pas un patriote moderne mais une arme dont le projet Rising Spirit efface, voire modifie tout le passé après chaque mission. L’État manipule un citoyen et le pousse à la folie. Duane Swierczinscy, également romancier chez Rivages Noir, construit un splendide récit d’espionnage plein de subtilité politique et d’action violente. Critiquant l’armée, le scénariste se place du côté des médias pour révéler la vérité et de Bloodshot, symbolisant le citoyen libre. Scénariste engagé, Swierczinscy aidé par les dessins vifs et dynamiques de Manuel Garcia, n’hésite pas à montrer la violence de l’armée américaine. Ces épisodes sont pour lecteurs avertis ou des amateurs d’hémoglobine – corps explosent et sang gicle.

 

Un soldat à la recherche de son passé

Très rythmé, on découvre peu à peu différents groupes et personnages – Bloodshot, des terroristes aux motivations floues, le Rising Spirit qui est prêt à défendre les États-Unis par n’importe quel moyen. Non seulement, le scénariste parle de la politique étrangère mais aussi des mensonges du complexe militaro-industriel, du désir d’avoir une famille. Bloodshot s’émancipe de ses créateurs pour partir à la recherche de son passé et ainsi séparer le vrai des souvenirs fabriqués par l’État. Les nanites utilisent ces faux souvenirs pour lui parler mais les autres ne voient rien et le prennent pour un fou. Il cherche aussi à contrôler son corps comme un ado qui découvre les changements de la puberté. Au fil des épisodes, on découvre le passé des différents protagonistes d’une manière très fluide – par exemple Bloodshot contrôlé par les nanites a détruit toute une ville secrète – tout en suivant l’action contemporaine.

 

Des dessinateurs vifs

Toutes ces histoires sont superbement mises en image par un dessin réaliste et dynamique – un fusil qui sort du cadre pour renforcer l’action par exemple. L’encrage et les couleurs numériques sont très finement faites et variées. Avec un si grand nombre d’épisodes, on trouve bien entendu plusieurs dessinateurs dont Manuel Garcia, Arturo Lozzi, Barry Kitson et Emanuela Lupacchino. Garcia réalise des superbes planches et arrive à montrer la pluralité des sources de récit par la typographie des bulles – classiques pour les femmes, pour les nanites en jaune et les dialogues radios par un design encore différent.

hqdefault 1 Critique "L’intégrale de Bloodshot" : l’action politique éclate partout

On ne peut que saluer Bliss Comics pour la superbe édition qu’elle nous offre. Non seulement le prix est imbattable –  49€ pour plus de 900 pages de BD – mais la qualité est aussi irréprochable. Les couvertures des 43 épisodes séparent chaque épisode. L’ensemble est réuni dans un volume solide avec un sommaire très précis sur les équipes créatives. En fin de volume, on trouve de nombreuses pages de bonus avec des recherches sur le design de Bloodshot, des croquis de pages de BD ou de couvertures… Peu d’éditeurs de comics peuvent se vanter d’un tel travail.

Certes sur un tel nombre d’épisodes, il y a parfois des creux, mais l’Intégrale Bloodshot est un superbe volume bien au-dessus de la production actuelle des comics. C’est de plus une bonne porte d’entrée chez Valiant. C’est en effet le début de la relance de Bloodshot et on y trouve des épisodes d’Archer & Armstrong et surtout d’Harbinger, une autre série majeure de Valiant Entertainment.