Savage, une plongée saisissante dans une Angleterre dévastée

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Les éditions Delcourt ont su s’installer sur le marché français des comics grâce à des choix pertinents pour leur line-up. Passionnés de bandes-dessinées, vous connaissez certainement les produits de leurs licences les plus célèbres telles que Star Wars et The Walking Dead. Il y a moins de chances que le comic-book Savage fasse partie de vos étagères. Et pourtant, cet ouvrage dessiné en noir et blanc est réalisé par un duo d’artistes confirmés: Pat Mills et Charlie Adlard. On a décidé de débuter notre cycle de critiques pour la saison estivale avec cette histoire complète.

Savage est une histoire uchronique. Cela signifie que l’histoire a été réécrite à partir de la modification d’un élément du passé. Dans cet univers développé par une paire de créatifs bien rodée,  les Volgans, une faction issue de l’ancienne Union soviétique a pris possession de l’Angleterre. Les deux puissances se partageant le monde sont les Etats-Unis et les Volgans. Tous les locaux n’acceptent pas cette domination. La résistance menée par un homme impitoyable, Bill Savage, se met en place.

Bill Savage, un leader charismatique.

Lorsque l’on observe Bill Savage évoluer au fil des planches de Charlie Adlard, on a la sensation d’être en présence d’un Punisher œuvrant pour une cause politique. Le style du dessinateur rompu au genre et la personnalité bien trempée du personnage permettent à cet anti-héros de ne pas être un simple ersatz du justicier arborant une tête de mort de Marvel Comics. Bien que plongé dans un contexte où tout est contre lui, Bill Savage avance tout droit. Il ne laisse aucun obstacle qui se dresse sur sa route l’empêcher de parvenir à ses objectifs. On pourrait reprocher à Pat Mills de ne pas explorer suffisamment la psychologie de son personnage principal, et résumer « Savage » à un récit simpliste où le protagoniste semble indestructible. Heureusement, même si l’auteur ne s’appesantit pas sur les origines de ses personnages, il prend la peine de mettre en place quelques scènes marquantes où l’on peut cerner les contours de Bill Savage. Dans ses relations avec les autres, Bill Savage dicte sa loi à son entourage. Il ne prend pas en compte les sentiments de ses hommes et de ses proches qui l’accompagnent dans sa guerre face à l’oppresseur Volgan.

L’une des réussites du scénariste est qu’il a créé une fratrie autour de son personnage principal. Les deux frères de Bill Savage semblent être de parfaites copies. Même si on n’a pas l’occasion de voir Bill interagir avec les deux autres, les éléments distillés par l’auteur sont suffisamment percutants pour que l’on ressente le besoin de suivre leur histoire. L’intrigue de Patt Mills est à réserver à un public averti. Les échanges musclés entre les deux camps sont détaillés et pourraient heurter les plus sensibles.

Des planches magnifiées par un expert du noir et blanc: Charlie Adlard

Une bande dessinée en noir et blanc rebutera peut-être certains d’entre vous. Pourtant, Savage est dessinée par l’un des maîtres en la matière, Charlie Adlard. L’artiste est mondialement connu grâce à ses prestations sur le comic-book devenu un véritable phénomène de société, The Walking Dead. Le style graphique déployé par Adlard correspond parfaitement à l’univers sanglant du monde post-apocalyptique de Robert Kirkman. Ses dessins conviennent aussi à l’histoire de Savage. Il jongle habilement entre les nuances de noir et blanc pour accentuer le fait que ses personnages vivent dans une Angleterre qui est en proie à des affrontements constants. Adlard livre ici une galerie de personnages réalistes qui se démarquent des productions habituelles par leurs traits marqués, symboles de l’époque difficile dans laquelle ils vivent.