Exposition Vigée Le Brun : du raffinement et de la féminité au Grand Palais

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C’est demain et jusqu’au 11 janvier 2016 que se tient au Grand Palais la première rétrospective autour de l’oeuvre de Elizabeth Louise Vigée Le Brun, femme portraitiste de renom à l’époque de Louis XVI. Un événement RMN à ne pas manquer !

Depuis 1982 aux Etats Unis, aucune exposition n’avait été consacrée au peintre officiel de Marie Antoinette. Portraitiste exceptionnelle au talent incontestable, Elizabeth Louise Vigée Le Brun a du s’imposer en tant que femme pour faire valoir son art auprès de la cour. Sa vie s’étend sur une période historique riche et tumultueuse, englobant la fin de la monarchie et le début de l’empire. L’exposition rend compte de la production prolifique de Vigée Le Brun à travers plus de 150 œuvres : peintures, dessins, pastels, provenant des plus prestigieux musées du monde. Ici, ce sont essentiellement des portraits, même si on lui connaît quelques paysages et peintures mythologiques, dont La Paix ramenant l’Abondance, qui lui value son entrée à l’Académie royale. Mieux qu’un parcours biographique, le Grand Palais nous offre autant un aperçu sur une carrière brillante qu’un annuaire des cours d’Europe, relatant à chaque tableau une tranche de vie des personnalités qu’à rencontrer et peint Elizabeth Louise Vigée Lebrun.

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Fille de pastelliste, elle fut destinée dès sa naissance à l’art. Elle s’exerça en premier lieux sur ces proches et fit aussi de nombreux autoportraits, lui permettant de faire la démonstration de son talent très rapidement. Entourée et soutenue, elle étudia dans les ateliers de Blaise Bocquet, Pierre Davesne et Gabriel Briard tout en recevant les conseils de peintre préstigieux tel que Joseph Vernet et en fréquentant des artistes contemporains comme Jean-Baptiste Greuze. Elle profita aussi des collections et des œuvres issues du commerce de son mari, le marchand de tableaux Jean-Baptiste Pierre Le Brun.

S’inspirant des anciens (Raphaël puis Rubens) elle développa une gamme de couleurs douces pour les chaires et colorées pour les apparats. Ses compositions offrent une originalités remarquable pour l’époque et sa technique impressionne son entourage puis sa clientèle de plus en plus nombreuse grâce à son époux, son frère dramaturge et leurs relations respectives. Bourgeoisie, petite noblesse, aristocratie, la cour s’intéresse progressivement à la jeune artiste qui devient le peintre officiel de la reine en 1778, à l’âge de 23 ans.

Elle fut alors reconnue pour son pinceau flatteur et sa capacité peindre de façon réaliste des portraits sublimés.Au-delà de l’apparence, Vigée Le Brun va aussi attacher de l’importance à représenter ces modèles avec une liberté qui annonce déjà une sorte de féminisme. L’artiste avait de l’admiration pour ces figures et ce qu’elles pouvaient dégager. Ainsi, elle peint les femmes en chemise (qui deviendra une mode à la fin du 18ème siècle), avec sensualité, parfois provocante, presque érotique, recherchant à magnifier ses modèles.

Mais elle est aussi le peintre de l’enfance et de la maternité. Sensible au texte Emile de Rousseau, elle peint de nombreux portraits de bébé, d’enfant et de mère avec leurs enfants avec beaucoup de douceur et d’affection. Elle tentera de redorer le blason de la reine en la mettant en scène entourée de sa progéniture et représentera mainte fois sa propre fille, Julie (avec ou sans elle), soulignant ainsi l’importance des liens maternelle et la tendresse partagée.

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L’histoire de Vigée Le Brun, c’est aussi la volonté d’une artiste de s’imposer et d’exceller dans un domaine masculin, entraînant à sa suite d’autres femmes ambitieuses qui formeront elles aussi quelques apprenties. Ainsi, certaines de ces amies et d’autres concurrentes eurent une carrière artistique  qui se finira tristement avec la révolution française. Elizabeth Louise fut quant à elle contrainte à l’exil.

C’est l’élégance à la française qui fera sa renommée en Europe.

Vigée Le brun fut en effet obligée de fuir la France pour une longue absence qui dura plus de 12 ans. D’abord en Italie où elle fut accueillie par des amis, elle réussi à se constituer un nouveau réseau qui lui permis de subvenir à ses besoins. Puis en Autriche où elle retrouva la famille de Polignac dont elle était proche à la cour de France ; c’est là qu’elle apprit la mort de la reine et qu’elle rencontra d’éminentes familles russes qui lui ouvrirent les portes de Saint-Pétersbourg. Elle y arrive en 1795 et y rencontre Catherine II qui lui offrira l’opportunité de travailler pour la famille impériale et l’aristocratie russe. Elle retrouve alors une vie mondaine à laquelle elle était habituée à Paris.

Ce n’est qu’en 1802 qu’elle reviens sur le sol français et retrouve sa famille et ses amis. Elle rencontre alors Joséphine Bonaparte et prête son pinceau au consulat et à l’empire, malgré sa préférence pour les aristocrates européens. Elle poursuit ensuite ses voyages en Angleterre et en Suisse où elle effectuera près de 200 pastels de paysages. Ce retour à la nature annonce la fin de sa carrière et les débuts du romantisme.

A travers l’oeuvre de Vigée Le Brun, c’est un témoignage d’une période faste et trouble à la fois. L’artiste ici relate l’histoire des cours d’Europe à travers son pinceau et nous laisse une trace de ce passé majestueux et raffiné. Elle eut toujours à cœur d’embellir et de permettre à ces modèles de transcender le temps.

Aujourd’hui ces merveilleux visages nous sourit et nous enchante. Le sublime portrait de la belle Elizabeth Louise Vigée Le Brun reste le plus marquant, symbole d’une ascension sociale, professionnelle et d’une ambition seine et tranquille.