Jusqu’au 21 juin 2015, la Pinacothèque de Paris présente l’exposition « Au temps de Klimt, la Sécession à Vienne », qui retrace le rôle fondamental de ce mouvement artistique à cheval entre deux siècles, représenté par le grand Gustav Klimt.
La Sécession viennoise
Officiellement fondée en 1897, la Sécession ou Sezessionsstil, veut rompre avec l’académisme trop strict des institutions artistiques de l’époque, internationaliser les échanges entre artistes et penseurs, et développer un art total.
L’art total, notion alors totalement inédite, se veut de mêler harmonieusement différentes disciplines : peinture, musique, architecture, sculpture ; avec des objets d’art mineur et d’artisanat. La célèbre Frise Beethoven de Klimt, reproduite grandeur nature et pièce phare de l’exposition, en est la représentation parfaite. Dédiée à la 9ème symphonie du compositeur, elle assemble peinture/dessin, bas-relief, bijoux, tout en étant destiné à décorer un édifice architectural. Saluée tout autant que vivement critiquée (l’œuvre fut taxée de pornographie), elle fut le symbole du modernisme apporté par la Sécession.
L’exposition est rythmée par les travaux de Gustav Klimt (et de ses frères) à travers quelques pièces rares ou incontournables. Le parcours souligne les premières années de la Sécession, de la présidence du mouvement par Gustav Klimt, aux rôles importants des revues Jugend et Ver Sacrum (dont plusieurs couvertures ont été réalisées par Klimt), à l’architecture de l’Art Nouveau ; jusqu’aux travaux des grands penseurs de l’époque qui influencèrent le mouvement, comme le très sulfureux psychanalyste Sigmund Freud, qui « autorise » à l’époque la question de la sexualité à rentrer dans les débats publics comme artistiques.
L’exposition aborde quatre thèmes esthétiques : la frise Beethoven, la Femme fragile/fatale et son étude psychanalytique des artistes (comme la Judith I de Klimt qui travaille sur la sensualité féminine), le portrait, le paysagisme et le picturalisme.
Klimt et son héritage
L’exposition -globalement chronologique dans son parcours- marque bien la rébellion d’un art jusqu’à là académique et l’héritage artistique qu’a pu apporter la Sécession aux nouvelles générations, en permettant une expression encore plus libre, osée et personnelle, qui n’est pas non plus étrangère aux travaux de Sigmund Freud : l’expressionnisme. Soit un art décoratif et lyrique qui ouvre doucement la voie à une peinture fracassante, écorchée et psychanalytique. On peut ainsi voir la transition entre les portraits calmes ou sensuels du début du siècle viennois, et la rage et la folie apportées par de nouveaux peintres tels Koloman Möser, Oskar Kokoschka, ou Egon Schiele…
Outre la présence (obligatoire) de quelques petits maîtres guère passionnants pour les moins avertis, le projet de la Pinacothèque est réussi. Entre la rétrospective historique et le parcours intimiste nous faisant redécouvrir deux immenses mouvements artistiques du 20ème siècle, cette exposition est à voir. Complète, claire et précise. Il est de plus extrêmement jouissif de pouvoir contempler en France quelques chefs d’œuvres incontournables comme Le Baiser et la Frise Beethoven ou Judith I de maître Gustav.
[Autres artistes présents qui renforcent l’exposition : Josef Engelhart, Josef Hoffman, Arthur Strasser, Carl Moll (Bosquet de bouleaux au crépuscule) ou encore Adolf Loos.]